Les combats entre troupes pro-Kadhafi et les insurgés se poursuivaient hier samedi près des villes pétrolières de l'Est du pays, à Brega notamment, alors que deux bavures de la coalition ont été enregistrées au cours de ces trois derniers jours. Sur le front diplomatique, l'après-Kadhafi se prépare activement, dans le plus grand secret, entre Londres et Tripoli. Dans la nuit de vendredi à samedi, un avion de la coalition passée sous le contrôle depuis jeudi de l'OTAN a tiré et tué au moins treize personnes. Neuf insurgés et quatre civils ont été tués par une frappe aérienne près du site pétrolier de Brega dans l'Est de la Libye, a indiqué samedi un responsable politique de la ville d'Ajdabiya chargé des relations avec les insurgés. Un avion de la coalition a ouvert le feu à une quinzaine de km à l'est de Brega sur un convoi de cinq ou six véhicules, dont une ambulance, après qu'un rebelle a tiré en l'air à la mitrailleuse avec des balles traçantes, en signe de joie, a précisé Issa Khamis. «C'est une erreur (du rebelle), les avions ont cru qu'on leur tirait dessus et ils ont tiré sur le convoi», a expliqué M. Khamis. Neuf insurgés ont trouvé la mort dans cette frappe, ainsi que les quatre occupants de l'ambulance, le conducteur et trois étudiants en médecine de Benghazi (est), a-t-il ajouté. L'OTAN a de son côté indiqué qu'elle enquêtait sur ces informations, sans pour autant avoir ouvert d'enquête formelle. «Nous examinons ces informations. Nous prenons toujours au sérieux les informations concernant des pertes civiles», a déclaré à Bruxelles la porte-parole de l'Alliance atlantique, Oana Lungescu. L'autre bavure de la coalition s'est passée mercredi dernier, lors d'un autre raid aérien de la coalition qui aurait fait sept morts et 25 blessés à Zawia el Argobe, un village situé à 15 km de Brega. Les tirs ont ciblé un camion chargé de munitions, mais l'explosion qui en a résulté a détruit deux maisons proches. Combats, tractations et barbouzes Après trois jours de violents combats, les insurgés ont regagné du terrain et annoncé samedi la prise de contrôle du site pétrolier de Brega, théâtre de violents affrontements à l'arme lourde. Dans la matinée, les combats ont cessé aux abords de la ville. Seul le bruit de chasseurs-bombardiers de l'Otan survolant la région pouvait être entendu. A plusieurs centaines de kilomètres à l'ouest, un autre front continue de faire rage. Dernière grande ville de l'Ouest aux mains des insurgés, Misrata est la cible de tirs nourris des forces fidèles à Kadhafi. «Ils ont utilisé chars, roquettes, obus de mortier pour bombarder aujourd'hui. C'étaient des bombardements au hasard et très intenses. On ne reconnaît plus la ville. Les dégâts sont indescriptibles», a déploré un porte-parole de la coalition. Ces tirs ont fait 28 morts en trois jours, selon la rébellion. Samedi, au moins six civils ont été tués. La coalition avait bombardé vendredi soir «des cibles civiles et militaires» dans deux villes libyennes, Khoms et Arroujban, a rapporté la télévision libyenne, citant un responsable militaire. Khoms est située à une centaine de km à l'est de Tripoli tandis qu'Arroujban est à environ 190 km au sud-ouest de la capitale. Le régime libyen a refusé de discuter de l'offre de cessez-le-feu offerte vendredi par l'opposition dont le siège est à Benghazi. Dans un communiqué, le régime du colonel Mouammar Kadhafi, qui a accusé vendredi la coalition internationale de commettre des «crimes contre l'humanité» en bombardant des civils, notamment dans l'Est du pays, a rejeté les conditions du cessez-le-feu émises par les insurgés, affirmant que ses troupes ne quitteront pas les villes occupées. L'offre des insurgés portait sur un cessez-le-feu sous conditions, notamment le retrait des forces de Mouammar Kadhafi des villes de l'Ouest de la Libye, selon le chef du Conseil national de transition, Moustafa Abdeldjeïl, lors d'une conférence de presse commune à Benghazi avec l'émissaire spécial des Nations unies en Libye, Abdelilah al Khatib. L'Union européenne s'est dite, pour sa part, prête à déclencher, à condition que l'ONU en fasse la demande, une opération militaire humanitaire afin de répondre à la situation de crise en Libye. L'opération baptisée «Eufor Libya» est d'ores et déjà dotée d'un budget de 7,9 millions d'euros et sera commandée par le vice-amiral italien Claudio Gaudiosi, a précisé l'UE dans son communiqué. L'offre de l'UE intervient au moment où un proche conseiller du fils de Mouammar Kadhafi, Mohammed Ismail, serait reparti vers tripoli après des pourparlers avec le gouvernement britannique pour préparer le départ de Kadhafi, selon The Guardian. Citant une source anonyme, le journal a affirmé que la rencontre secrète n'était que l'une de celles organisées ces deux dernières semaines entre les deux pays. Elle aurait porté sur la possibilité d'une sortie de crise pour le colonel libyen. Sur le front de la 'guerre de l'ombre'', des agents de la CIA mais aussi des services britanniques et français sont déployés sur le terrain libyen depuis plusieurs jours pour tenter de déterminer s'il est avisé ou, au contraire, risqué de leur livrer des armes. Ces agents, rapporte CNB, ont assisté le pilote américain dont l'avion s'est récemment écrasé dans l'Est de la Libye, coopérant sur ce dossier avec les forces d'opposition basées à Benghazi.