Depuis quelque temps, Abdelaziz Belkhadem, secrétaire général du FLN, mais aussi ministre d'Etat et ministre conseiller du président de la République, réclame ouvertement et avec insistance un changement de gouvernement. Ce qui oblige à croire que cette question serait en débat dans les sphères de décision du pouvoir ; et si tel est le cas, Belkhadem exprime le point de vue pour lequel pencherait Bouteflika. L'on imagine mal en effet cette personnalité exprimer une opinion qu'il sait ne pas être partagée par ce dernier. C'est bardés de cette certitude que des confrères ont avancé l'hypothèse que les jours de l'actuel exécutif que préside Ahmed Ouyahia sont comptés, bien que le Président ait fait savoir, lors du dernier conseil des ministres, qu'il lui confie la mise en œuvre du processus des réformes dont il a fait l'annonce à la nation. Il peut apparaître quelque peu inconvenant que le chef de l'Etat réfléchisse à procéder au changement sous peu d'un gouvernement sur qui il a déclaré compter pour l'exécution de son programme de réformes. Mais avec Bouteflika, il faut s'attendre à tout, tant il a démontré qu'il peut, du jour au lendemain, dire une chose puis faire son contraire. Il reste que si Bouteflika envisage vraiment de procéder au changement de gouvernement, pour une fois son intention rejoindrait les desiderata qui s'expriment dans l'opinion publique, majoritairement remontée contre un exécutif dont l'action et le bilan font l'objet des plus sévères dénonciations et condamnations. C'est le moins que puisse faire Bouteflika que se séparer d'une équipe dont les citoyens et les acteurs politiques et sociaux doutent qu'elle soit en capacité d'adhérer aux réformes envisagées par lui et donc d'œuvrer à leurs concrétisations. Presque tous les partis de l'opposition ont, à un moment ou à un autre, formulé la nécessité d'un changement de l'équipe gouvernementale. Certains font même de cette exigence un préalable dont la satisfaction ou pas sera révélatrice du degré de sincérité de la volonté affichée par le président de la République de conduire des réformes en profondeur dans le pays. Que pour d'autres considérations évidemment, Belkhadem exprime au nom du FLN la même demande que les partis de l'opposition, voilà ce qui effectivement peut rendre probable l'annonce à court terme du changement gouvernemental. Un nouvel exécutif, de nouvelles figures, surtout s'ils sont moins marqués du point de vue de l'appartenance partisane, contribueraient peut-être à créer un climat moins chargé de suspicion à l'endroit du processus retenu par Bouteflika pour engager les réformes annoncées. En tout cas, l'insistance de Belkhadem à réclamer un changement d'exécutif a fait s'amplifier la spéculation et les rumeurs circulant sur le sujet. Au point que la seule question que se posent ceux qui estiment que Bouteflika devra nécessairement se résoudre à cette solution s'il veut dissiper un tant soit peu les préventions contre son projet de réformes, c'est celle de savoir si le changement prendra la forme d'un vaste coup de balai ou celle d'un lifting limité de l'actuel exécutif. Alors qu'il promet le changement profond, Bouteflika ne peut s'autoriser, en cas de remaniement, à recourir à « l'alternance » si décriée entre Belkhadem et Ouyahia. L'imposer à nouveau est le meilleur moyen d'écoeurer définitivement la société algérienne, qui en tirerait alors l'inéluctable conclusion qu'elle n'a plus rien à attendre du système et du régime.