T out ce que le régime syrien et son président peuvent proposer comme changement ou réformes au peuple syrien en révolte est dépassé, irrecevable, car ils ont perdu toute légitimité à participer à la définition de ce que sera la Syrie dans l'avenir. Entre ce régime, son président et le peuple révolté, la confrontation est si sanglante qu'il n'est plus permis d'envisager une issue à la crise syrienne passant par le dialogue et la négociation entre les deux camps antagonistes. Les manifestants, qui poursuivent leurs démonstrations de rejet du régime et du président Bachar El-Assad, malgré la violence inouïe de la répression déchaînée contre eux, n'ont qu'une seule revendication et un unique slogan : « mettre fin au régime et à sa dictature ». Ce point de non-retour que marque la détermination des manifestants a été perçu au plan international, où la question du départ du président syrien n'est plus éludée désormais. Les Etats-Unis, suivis par l'Union européenne, font même maintenant de ce départ une exigence non négociable. Ces puissances ont finalement renoncé à prôner au président syrien la « retenue » dans la riposte du régime à la révolte populaire et ont assimilé que la situation en Syrie ne se prête plus à la médiation entre le pouvoir et le peuple révolté. Depuis une semaine, les pressions internationales, inspirées par l'attitude devenue plus ferme de ces puissances, se font plus fortes sur Damas et s'accompagnent de sanctions dont la sévérité va finir par affecter les capacités du régime à exercer son contrôle du pays. Les observateurs soulignent avec pertinence la virulence dont les Etats-Unis font montre depuis quelques jours contre le régime syrien, qu'ils ont pourtant ménagé alors que la répression faisait déjà couler un fleuve de sang. Ces observateurs voient dans le durcissement de la position américaine à l'égard du président syrien, que Barack Obama a franchement sommé de partir, un signe émis par Washington en direction d'abord et avant tout de cercles du régime pour les inciter à forcer la main à Bachar El-Assad et ainsi sauver peut-être ce qui peut l'être du régime et de ses partisans. Il ne faut pas croire en effet que les Américains et les Européens voient d'un bon œil la révolte populaire qui secoue la Syrie et dont ils appréhendent les incertitudes qu'elle fait peser sur leurs intérêts géostratégiques dans la région et les menaces dont elle peut être porteuse pour la « sécurité » de leur protégé israélien. Un scénario à l'égyptienne en Syrie ne serait pas pour les contrarier. Sauf que l'armée syrienne, pour des raisons historiques et compte tenu de l'appartenance de la majorité de son encadrement supérieur à la communauté alaouite, est peut-être encore plus radicalement opposée à l'idée du changement et encore plus à la chute d'un régime bâti autour du principe de la primauté de cette communauté dans la direction des affaires de la Syrie. La question est de savoir si les Etats-Unis, l'Union européenne et le reste de la communauté internationale sauront s'entendre sur ce qu'il y aurait lieu de faire contre le régime de Damas au cas où ni Bachar El-Assad ni l'armée syrienne ne tiennent compte des signaux qui leur ont été envoyés.