Comment fabriquer du vent avec du vent ? En gonflant les joues. Pour son université d'été à huis clos, entre amis et proches, entre fidèles et apparatchiks, le FLN a fait preuve d'une formidable ruse : revendiquer la victoire (imaginaire) sur un complot (imaginaire). Biologiquement, c'est dans la tradition du vieux parti : continuer la guerre de libération dans sa tête, rejouer de temps à autre la bataille d'Alger et faire croire qu'il est jeune, qu'il a des armes, qu'il habite dans le maquis et pas à Zéralda et qu'il aime le pays, pas la pension. Comment donc rebondir dans un film que personne ne regarde ? En jouant sur la fameuse affaire de l'appel «sioniste» à une révolution du 17 septembre dernier. Cette affaire, et le chroniqueur en est certain, restera dans les annales cachées du manuel du Manipulateur des foules. Montée, inventée, payée, fabriquée, elle servira à créer un vrai faux maquis pour stopper tout mouvement de foule vers le soleil. On y a fabriqué des équations majeures qu'il s'agit de rappeler : toute demande de démocratie est une demande du chaos, tout chaos est une porte ouverte à l'Otan, toute intervention de l'Otan est la fabrication de BHL. Conclusion ? Toute demande de démocratie et de changement est la preuve que vous êtes sioniste et donc contre l'Algérie. L'Algérie étant le régime bien sûr et vice-versa. Aujourd'hui, après le grand bluff, la suite du film : le FLN, par la bouche de Belkhadem, revendique «sa» victoire à lui contre les comploteurs. C'est ce qu'il a dit ce week-end durant son discours d'ouverture de l'université d'été de «son» parti. Du point de vue des essences philosophiques, cela se tient : un parti imaginaire revendique une victoire imaginaire sur un complot imaginaire avec des armes imaginaires. Du point de vue de la ruse, cela reste une splendeur : le FLN revendique l'appel du 1er Novembre en revendiquant le contre-appel du 17 septembre. Du point de vue du discours, le jeu est clair : puisqu'on a inventé un ennemi extérieur, le héros intérieur ne peut être que le FLN. Pas le vieux parti qui a rassemblé les libérateurs du pays, mais le néo-vieux parti qui partage le butin et les biens-vacants. Car après sept ans de guerre contre les Français, le FLN met 50 ans à partager le butin. On comprend donc vers où iront les choix et les âmes. Avec ce parti, on peut se faire élire, ne jamais mourir, même si tout est en train de pourrir. Mais pour le chroniqueur, c'est le recours à l'arnaque du 17 septembre qui reste fascinant : on invente une guerre et on se dit en être le héros. Un jour, vous aurez des anciens moudjahidine du 17 septembre, un cimetière imaginaire des victimes du 17 septembre, le procès de quelques comploteurs imaginaires de l'imaginaire 17 septembre. Des mémoires seront écrites, des témoignages réunis, des colloques organisés et des coordinations vont être créées pour regrouper les enfants des moudjahidine anti-17 septembre. On donnera des licences de bains, de taxi, des primes. Pour ceux qui ont donc raté l'affaire de mars 62 et la naissance des premières générations de faux combattants, voici une chance unique de revoir le phénomène, à l'œil nu, en live et maintenant. L'affaire mérite vraiment un roman.