La problématique soulevée par certains hommes de loi concernant l'obligation de traduire en langue arabe, les pièces d'une requête en justice, introduite par l'article 8 du code de procédures civile et administrative (CPCA) en vigueur depuis 2009, se pose de moins en moins. Deux dispositifs ont aplani, progressivement, les difficultés qui se posaient sur le plan pratique : le renforcement de l'effectif des traducteurs agréés et l'intégration de l'acte de traduction juridique dans le champ de l'assistance judiciaire. Le premier répondait à un manque évident de traducteurs assermentés lors de l'entrée en application du CPCA, accentué par l'absence d'une équipartition géographique de ces auxiliaires de justice, le deuxième quant à lui, devait prendre en charge le problème des frais élevés de la traduction pour les justiciables nécessiteux. Si, dans le principe, l'article 8 ne faisait l'objet d'aucune réserve de la part des légalistes -les avocats notamment- et des justiciables -qui en sont directement concernés- puisque la justice est l'expression de la souveraineté nationale et doit, de ce fait, rendre les décisions en langue nationale, dans la pratique, en revanche, il y avait quelques griefs. A juste titre. Le sujet de la traduction juridique a refait surface, en fin de semaine, à l'occasion de deux rendez-vous tout à fait indépendants, l'un de l'autre. Dans les deux cas, le département du ministère de la Justice a eu à répondre à des interrogations sur ce thème. Ainsi, Tayeb Belaïz, ministre de la Justice et garde des Sceaux, a répondu, jeudi devant le Sénat, à une question à ce propos, posée par un membre du Conseil de la Nation, Messaoud Bouderradji. Le ministre a souligné que la traduction des documents et pièces judiciaires «constitue une garantie pour un procès juste». M. Belaiz, cité par l'APS, a indiqué que l'article 8 du code de procédures civile et administrative, en vigueur depuis 2009, stipule que «les documents et pièces judiciaires doivent être présentés en langue arabe ou accompagnés d'une traduction officielle». «Les débats et plaidoyers doivent s'effectuer en langue arabe pour permettre aux demandeurs et defendeurs de se défendre», a soutenu M. Belaiz, affirmant que «les documents et pièces dans les procédures et actes judiciaires non écrits en langue arabe, étaient «irrecevables». Il a ajouté que le secteur de la Justice qui est «l'expression de la souveraineté nationale doit impérativement rendre les décisions en langue arabe» soulignant que «tous les pays à travers le monde rendent, les décisions de justice dans leur langue officielle». Dans ce contexte, M. Belaiz a réfuté que des justiciables aient renoncé à leur action judiciaires en raison de leur incapacité de supporter les frais de traduction des documents et pièces judiciaires, précisant que le Trésor public prenait en charge les frais de traduction de ces documents au profit des personnes nécessiteuses, dans le cadre de la loi sur l'assistance judiciaire. Le ministre de la Justice a estimé que le nombre des traducteurs travaillant dans le secteur de la Justice était «suffisant», soulignant le recrutement récemment de 500 traducteurs. Pour sa part, le directeur des Affaires civiles et du Sceau de l'Etat, auprès du ministère de la Justice, M. Ahmed-Ali Salah a apporté des éclairages sur la problématique de la traduction juridique, lors d'un point de presse tenu en marge d'un séminaire régional organisé à Oran, sur le code de procédures civile et administrative. Selon ce responsable, «le problème de la traduction juridique ne se pose plus en Algérie». «La production en langue nationale des documents officiels est désormais possible pour toutes les langues étrangères», a-t-il précisé. Pas moins de 414 traducteurs sont opérationnels à l'échelle nationale et seront prochainement rejoints par 500 autres, permettant ainsi à chaque tribunal du pays de disposer, en permanence, d'un minimum de 2 traducteurs officiels, a annoncé M. Salah. Le renforcement de l'effectif des traducteurs a pour but de répondre aux attentes des justiciables y compris pour certaines langues qui accusaient auparavant un déficit en compétences, comme le chinois, le russe ou l'italien, a-t-il souligné. «Aucun Etat au monde n'accepte de travailler dans une langue autre que sa langue souveraine », a ajouté M. Salah, en estimant que les contraintes signalées au début de la mise en application du nouveau code, étaient simplement dues à un problème de compréhension du contenu de la loi. Il a précisé que le texte fait référence aux seuls documents à caractère «déterminant» dans la solution d'un litige, par opposition à ceux dits «accessoires». Seuls les documents déterminants sont frappés de nullité s'ils ne sont pas présentés en langue arabe, a insisté M. Salah en citant, entre autres exemples, l'acte de propriété en cas de litige foncier et le rapport d'expertise, dans le cas d'une avarie de marchandise. Le CPCA s'est traduit par une «facilité remarquable dans l'accès à la justice car le formalisme a été allégé et les droits du citoyen renforcés», selon M. Salah. Les nouveaux dispositifs confèrent, de même, un rôle positif à la mission du juge civil pour qui désormais, l'essentiel est de parvenir à une solution équitable entre les deux parties (défendeur et demandeur). D'autres avantages ont été mis en relief, tels ceux ayant trait à l'assistance judiciaire, limitée auparavant à la défense, alors qu'elle est aujourd'hui élargie à l'expertise, aux actes notariés, à la traduction et aux procédures d'exécution. Notons que les chefs des cours de justice et des juridictions administratives de l'Ouest ont pris part à ce séminaire organisé au profit des magistrats et auxiliaires de justice à l'instar des avocats, experts, huissiers, notaires et commissaires-priseurs.