A la fin de la projection de «Andalousie mon amour», Mohamed Nadif, le réalisateur, a été submergé de questions. Preuve s'il en faut que ce film, traitant un sujet familier aux Algériens, en l'occurrence la question des harraga, a accroché le public, néophyte ou averti. Et pour cause, le film traite le sujet avec humour et légèreté. «C'est une comédie», ne se lassera pas de répéter le réalisateur. Ce qui ne l'empêche pas de pointer ceux qui profitent de la misère des jeunes habités tous par la chimère de «l'eldorado du Nord». «Une sorte de tumeur que tout le monde traîne au Maroc», dira Nadif. Le politique, illustré par un responsable local, l'homme de religion, partie prenante de la bande qui exploite les harraga venus d'horizons différents, le militaire, supérieur d'un gendarme du village, sont tous mis à l'index dans ce film. Avec des stratégies bien roulées. Le cannabis est offert à profusion aux candidats à l'installation sur la terre ibérique, en plus des images de rêve de la société de consommation: la blonde plantureuse et la voiture flambant neuf. Au lieu de verser dans la facilité et de décrire la misère des harraga dans les camps en Espagne, Nadif a choisi de décrire leur calvaire sur le territoire marocain. Une manière peut-être de signaler que le traitement de ce dossier doit engager les pays concernés en premier lieu. Pour sa part, l'instituteur, harrag dans sa tête, échoué lui aussi sur ce lieu non-dit à quelques encablures des côtes espagnoles, trompant dans de sales combines et affichant des ambitions politiques, ne jure que par «l'espanisation» de son pays. Une manière de dire que le Maroc, et partant les autres pays pourvoyeurs de harraga, peuvent prétendre à une situation semblable à celle de l'Espagne. Peut-être pour des raisons de coût de production, le réalisateur ne pouvait pas épuiser toutes les questions que soulève ce sujet. Donc, il s'est contenté de clins d'œil. En distribuant, entre autres, un acteur algérien (Hichem Mesbah) et un autre sénégalais (Paulin F. Foudououp), pour dire que le phénomène des harraga concerne le Maghreb et l'Afrique subsaharienne. Le film, digeste, léger, se laisse voir. Nadif, le réalisateur, qui provient du théâtre, joue le rôle de l'instituteur, le plus attachant puisqu'il est omniprésent. Sans prétention, ce qui a fait dire à certains critiques que Nadif a opté pour le soft et le clean pour traiter une question grave. «Andalousie mon amour» a tout simplement plu. Il semblerait qu'il a eu un accueil semblable lors de sa projection récemment au festival de Marrakech. Ce qui n'est pas le cas de «Combien je t'aime», film de Fatima Zohra Zaamoum. La réalisatrice n'a pas pu se déplacer à Oran, mais a chargé sa sœur d'animer les débats à sa place. Comme si ce genre de compétence se délègue ! Le film traite lui aussi d'un sujet très grave : les répercussions des divergences des parents sur les enfants. Autrement dit, des problèmes de la famille actuellement. Mais le rythme très long du film a rendu sa vision laborieuse. L'essentiel du film se passe dans une cage à lapins dans un quartier d'Alger. Ce qui limite le champ d'action. En plus, les dialogues entre des grands-parents et leur petit-fils ne peuvent être que limités, codés. Ce qui a desservi encore plus le film. Pourtant, la prestation des acteurs, notamment l'enfant Racim Zennadi et Nadjia Debbahi, est irréprochable. Techniquement, le film ne manque pas de réussite. Certains plans, notamment de gros plans, méritent d'être signalés. D'autres s'apparentent à des œuvres photographiques. Mais malheureusement, il y a énormément de décalages dans cette œuvre. Peut-être que la réalisatrice a péché par excès d'ambition. Soulignons que la programmation du film pour la seconde séance, c'est-à-dire à dix-huit heures, a cassé un peu l'enthousiasme du public. Ainsi, le coup d'envoi de cette édition du FOFA a été maghrébin. Ce qui n'a pas échappé et n'a pas déplu au public qui attend toujours l'entrée en lice du cinéma égyptien.