Grand paradoxe de ce début d'année 2012 : Oran n'a pas connu de mémoire d'homme une opération de relogement social aussi large et aussi prometteuse. Pourtant, jamais aussi vive n'a été la tension sociale autour du logement dans la cité aux onze siècles d'existence. Au total, 3.959 décisions de préaffectations ont été délivrées aux habitants du vieux bâti. Les heureux élus devront recevoir leurs clés dans un délai variant entre 8 et 15 mois, échéances prévues par les pouvoirs publics pour l'achèvement des logements actuellement en chantier et boucler ainsi ce quota de près de 4.000 logements consacré au vieux bâti. Cependant, l'opération de remise des pré-affectations entamée le 09 janvier dernier n'a pas fait que des heureux. Les sièges de la daïra d'Oran, de la wilaya et des secteurs urbains de quartiers concernés par l'opération sont presque quotidiennement pris d'assaut par des groupes de citoyens dont les noms, semble-t-il, n'ont pas été retenus par les commissions chargées de distribuer ces fameuses pré-affectations. A priori et vu leur nombre plus ou moins important, particulièrement dans le quartier de Médioni où des centaines de demandeurs de relogement sont descendus dans la rue pour contester leur mise à l'écart, les cas de ces «oubliés» du relogement ne peuvent s'expliquer par les 439 demandes exclues après enquête par le filtre national car leurs auteurs possédant déjà un bien immobilier. Pour prendre comme exemple les deux quartiers d'El-Hamri et de Médioni, la daïra d'Oran leur a destiné 1.984 décisions de pré-affectations pour le premier et 705 autres pour le second, soit un total de 2.669 logements. Cela n'a pas empêché, mercredi dernier, des centaines de citoyens, hommes, femmes et enfants de prendre d'assaut le siège du secteur urbain, en colère pour avoir été mis à l'écart. Une exclusion, disent les contestataires, qui n'a aucun justificatif. Natifs pour leur majeure partie des deux quartiers sus-cités, et ne les ayant jamais quittés pour un autre lieu de résidence, ils partagent aussi la caractéristique d'habiter dans des conditions précaires : exiguïté et bâtisses menaçant ruine. Le nom du responsable communal, qui a chapeauté l'opération de remise des pré-affectations, était sur toutes les lèvres durant cette protestation. «On exige de le voir pour s'expliquer devant tout le monde des raisons ayant amené à l'exclusion de centaines de familles. A son arrivée devant la foule, le responsable en question avait «admis que des omissions ont bel et bien été enregistrées et qu'elles étaient actuellement en train d'être prises en charge. Il existe des familles qui ont été enregistrées et qui n'ont pas reçu de pré-affectations, alors qu'il y en a d'autres, dans des immeubles à Médioni notamment qui n'ont carrément pas été recensés», avait-t-il affirmé, avant de promettre que «chaque famille qui a droit recevra sa pré-affectation et que ce n'était qu'une question de temps». Un discours qui résonne creux pour les «exclus» qui considèrent cette thèse de «l'omission» ou de «l'erreur administrative», trop peu convaincante. «Si notre confiance dans la personne du chef de l'exécutif de la wilaya reste intacte, car on sait que c'est un homme qui est venu à Oran pour travailler et changer les choses, on a, en revanche, de sérieux doutes sur des commissions dont les membres ont fait preuve d'autisme et de peu de scrupules à l'égard d'une grande frange de familles, parmi les plus anciennes de Médioni», affirme un habitant de la rue Benaouda El-Houari, grand-père de son état, habitant le quartier de Médioni depuis 1958. On ne peut pas confier l'opération de recensement et de remise des pré-affectations à une commission composée de communaux qui jusque-là étaient employés comme agents de sécurité ou éboueurs. Franchement, ce n'est pas sérieux. En même pas une semaine, on m'a demandé de déposer un dossier cinq fois de suite, a-t-il affirmé.