La demande de report du scrutin des élections législatives exprimée par certains des partis qui viennent d'obtenir leur agrément officiel n'est pas dénuée de fondement. L'on voit mal en effet comment les nouveaux partis vont pouvoir s'engager dans la compétition électorale alors qu'ils n'auront même pas eu un laps de temps raisonnable pour mettre en place leurs structures organiques et avoir ainsi une visibilité sur le champ politique. Ce ne serait que justice si les pouvoirs publics accèdent à leur demande. Différer les législatives de quelques semaines ou mois n'est pas une impossibilité, ce serait même une initiative pertinente qui rassurerait sur la détermination du pouvoir à aller vers une assemblée à la légitimité la plus large possible. Le temps du report permettrait de même que soit effectué l'assainissement du fichier électoral dont la confusion est décriée. Mais il y a peu de chance que le pouvoir donne satisfaction à la demande des nouvelles formations. Certaines d'entre elles même handicapées par le manque de temps auquel elles sont confrontées pour leur structuration organique sont susceptibles d'être de redoutables rivales électorales pour les partis de l'alliance présidentielle. Le Front de la justice et de la démocratie (FJD) conduit par Abdallah Djaballah et le Parti de la liberté et de la justice (PLJ) de Mohamed Saïd, pour ne citer qu'eux, ne partiront pas dans la compétition pour faire uniquement de la figuration. L'un et l'autre seront en situation de réserver de désagréables surprises aux partis de l'alliance et de plus amères encore si comme ils le demandent ils obtiennent le recul de l'organisation du scrutin leur permettant de se mettre en ordre de bataille. La participation au scrutin à chance égale entre les nouvelles formations et les anciennes est une obligation à caractère de justice et d'esprit démocratique. Elle peut se révéler un incitatif à prendre le chemin des urnes pour une bonne frange de l'électorat abonnée à l'abstention. Son non respect confortera et amplifiera la désaffection populaire à l'égard du devoir électoral. La crédibilité des réformes politiques dont le point d'orgue sera le projet de révision constitutionnelle qui sera soumis à l'approbation de l'assemblée issue du scrutin de mai prochain, sera contestée inévitablement s'il s'avère que faute de temps, les nouveaux partis ne vont pas être en situation de se faire entendre de l'électorat. Ce dont le porte-parole de l'une de ces formations a prévenu et mis en garde en estimant que «si les pouvoirs publics veulent réellement aller vers une assemblée nationale représentative, il faut donner le temps qu'il faut aux partis politiques en cours de constitution pour mieux se préparer d'autant plus que la mission de cette assemblée portera sur la révision de la Constitution. Il faut associer un maximum de partis pour que nul ne remette en cause la prochaine APN». C'est la voix de la sagesse que n'écoutera pas forcément le pouvoir atteint d'autisme pour tout ce qui vient d'ailleurs que ses sphères. Convaincu de cette disposition d'esprit du pouvoir, Sid Ahmed Ghozali a d'ores et déjà fait savoir qu'il n'engagera pas sa formation le Front démocratique dans la bataille électorale dans les conditions contraignantes devant lesquelles elle est placée en terme de temps.