La voix sur IP, ou «VoIP», est une technique qui permet de communiquer par la voix sur le réseau Internet. Elle a pu révolutionner la téléphonie traditionnelle, aussi bien des particuliers et des entreprises, dans les pays développés et s'imposer comme une offre de téléphonie incontournable à moindres coûts. Lancé depuis près de 10 années, ce service a été mal défendu par Algérie Télécom, qui exerce un monopole sur l'accès à l'Internet, alors que les usagers continuent à payer cher les communications vers l'étranger. Considéré comme l'un des marchés prometteurs dans le secteur des TIC à son lancement en 2004, après une exploitation expérimentale jugée «satisfaisante», la voix sur IP (VoIP), qui devait supporter le service de la téléphonie sur le réseau Internet, donne l'apparence de stagner voire même de régresser. Sur les onze opérateurs autorisés à fournir ce service, en sus des opérateurs téléphoniques traditionnels et bien évidement du fournisseur de bande passante Algérie Télécom, seuls quatre sont opérationnels, selon les statistiques de l'ARPT (Autorité de régulation de la poste et des télécommunications). Il est tentant de considérer que les conditions d'exploitation des autorisations, très dissuasives et contraignantes, sont à l'origine de la disparition de près de deux tiers des fournisseurs de VoIP en moins de cinq années. En effet, la licence d'exploitation d'un service VoIP est vendue à 30 millions de dinars, et chaque opérateur doit également verser 10% de son chiffre d'affaires annuel à l'ARPT. Mais contre toute vraisemblance, la raison est tout autre. «On n'a pas mis en place les mécanismes adéquats pour permettre une plus grande concurrence et de liberté. C'est ce qui a contraint bon nombre d'opérateurs à cesser leurs activités», dénonce Mebarek Boukaaba, ancien Président de l'AFSI (Association des fournisseurs de services Internet). Selon lui, «les textes sont très rigides». Il incrimine la loi 2000-03, très dépassée à ses yeux, même au moment de sa promulgation il y a 12 ans, et qui pénalise tout le secteur des TIC en Algérie. «La VoIP est la convergence entre la téléphonie et l'informatique. Tout le monde passe à la VoIP parce que c'est la technologie de demain», a-t-il insisté, regrettant la mainmise d'Algérie Télécom sur tout ce qui passe par le canal Internet. Des offres limitées et des besoins croissants Pour Younès Graar, consultant en TIC, ce qui bloque le développement de la VoIP c'est le fait de devoir passer par un opérateur téléphonique qui, de toute évidence, préfère promouvoir sa propre offre via le réseau traditionnel au lieu de créer lui-même sa propre concurrence. «Il y a une concurrence des opérateurs téléphoniques eux-mêmes qui veulent même offrir ce service», a-t-il précisé, soulignant la possibilité pour ces derniers de faire transiter l'appel par Internet en le faisant passer pour un appel sur le réseau conventionnel, devant l'absence de contrôle de ce genre d'activité. Le passage d'un appel par le réseau internet coûte dix fois moins cher que sur les réseaux traditionnels. Les opérateurs VoIP n'offrent pas tous de «larges» possibilités d'appeler à l'étranger à moindre coût. Les offres destinées pour le grand public, à l'image des cartes internationales «El Alamia» et «Ahla», sont limitées. La raison derrière cette limitation, est qu'il est impossible de posséder un numéro entrant géographique VoIP-in «DID», plus communément appelé «numéro virtuel», à partir de l'étranger, sauf pour Algérie Télécom. Cette dernière a donné l'exclusivité à Iristel pour commercialiser les numéros algériens à l'étranger. Selon l'ARPT, ces opérateurs VoIP peuvent offrir ce service «puisqu'ils ont des numéros alloués à l'objectif de mettre à la disposition d'un client un numéro pour appeler à l'étranger avec des prix très réduits». Cette situation est dénoncée par de nombreux fournisseurs de contenus sur Internet qui voient en cette exclusivité un déni de droit d'appeler à l'étranger à moindre coût. C'est le cas de Samy Slimani fondateur de Radio Dzaïr et fournisseur de streaming, qui considère qu'AT bloque systématiquement tout ce qui est VoIP. Il faut noter aussi que l'ARPT a suspendu la délivrance des autorisations d'exploitation du service VoIP depuis 2008. Les raisons invoquées par le régulateur : évaluer l'expérience du VoIP et sortir avec une nouvelle réglementation plus adaptée aux exigences de l'activité. Près de quatre ans après cette suspension de la délivrance des autorisations d'exploitation du service VoIP, l'évaluation promise n'a pas vu le jour. Est-ce un blocage définitif qui ne dit pas son nom ?