Un congrès scientifique arabe sur la protection du consommateur a été organisé à Oran les 20 et 21 mars dernier. Une opportunité de questionner les spécialistes algériens sur le dispositif de défense des droits des consommateurs. La réponse est sans ambages : la protection est faible voire inexistante Le consommateur algérien n'a pas de véritable existence. Dans tous les dispositifs sérieux de protection du consommateur on prend en charge en général huit droits essentiel : celui de la sécurité, d'être informé, de pouvoir choisir, d'être entendu, de satisfaire des besoins de base, d'obtenir réparation, le droit à l'éducation du consommateur et enfin le droit à un environnement sain. Ces droits sont-ils garantis pour le consommateur algérien ? La réponse est négative. Pour le Dr Boudali Mohamed, recteur de la faculté des droits à l'université de Sidi Bel Abbès, la dispersion des dispositifs de protection des consommateurs réduisent sensiblement leur impact. Selon lui, pour qu'il y a un impact sérieux de ces dispositifs, il «faut une la loi pour la protection du consommateur regroupée dans un code car elle comporte un côté législatif et un côté règlementaire. Ces deux concepts regroupés ensemble donnent à cette loi la force de son application». Les spécialistes algériens interpellent à cet effet les pouvoirs publics pour aller vers l'élaboration d'un tel code comme cela se pratique en Europe et même dans certains pays arabes. Outre la dispersion, le constat est fait du peu de cas accordé, dans la pratique, par la justice à la protection du consommateur. ANARCHIE EN MATIERE DE PUB «Pour une affaire d'étiquetage ou de non affichage des prix, l'affaire est traitée en dernier avec juste des amendes. Donc, aucune importance n'est donnée à ce volet pourtant essentiel pour la protection du consommateur», révèle le Dr Boudali. En matière de publicité sur les produits de consommation, il n'existe pas de règles fixées par le législateur. Chacun fait comme il veut et, souligne notre interlocuteur, aucun organisme habilité n'existe pour interdire une publicité qui bafoue les règles déontologiques. En France, il existe un bureau de contrôle de la publicité qui a la prérogative d'intervenir pour arrêter une réclame anormale sur un produit quelconque. Sur ce terrain, les spécialistes notent qu'en Algérie la publicité comparative est totalement alors qu'elle ne manque pas d'utilité pour permettre au consommateur de choisir comme cela se passe dans d'autres pays. L'on relève que cette publicité comparative est très répandue dans les pays développés, par contre l'idée même de ce concept est inexistante en Algérie «alors qu'il s'agit d'un moyen d'information pour le consommateur». UN DROIT DE SAISINE DE LA JUSTICE INEXISTANT En matière de contrefaçon, le Dr Boudali est catégorique : la loi protège plus le professionnel que le consommateur. Ce dernier n'a pas le «droit de déposer plainte quand il y a arnaque sur un produit. L'association de protection des consommateurs n'a pas le droit de se constituer partie civile dans les affaires liées à la contrefaçon». Interrogé sur la démarche à suivre pour faire une réclamation sur un défaut de fabrication, il relève que la question est abordée dans le droit civil (Art 140) et non dans la loi sur la protection du consommateur. Les Egyptiens ont intégré la question dans le code du commerce alors que les Français ont consacré 18 articles sur le produit défectueux. Dans la loi algérienne, deux articles seulement parlent de défaut de fabrication». Qui est responsable du produit défectueux ? «Dans la loi algérienne, si le producteur est identifié, il assume sa responsabilité. Mais s'il n'est pas identifié, la responsabilité revient à l'Etat, tout simplement. En France, le cas est différent puisque la responsabilité du produit défectueux ou dangereux est assumée par le fournisseur en premier lieu et c'est à lui de trouver la faille. En Egypte, il a été décidé de faire un jumelage avec la communauté européenne. Un jumelage qui comporte une directive européenne sur la responsabilité du produit dangereux». Le congrès tenu à Oran a également débattu d'un acteur relativement nouveau : le consommateur électronique. «Toutes les discussions sont axées sur le consommateur classique alors qu'avec le boom du net, le consommateur fait ses courses via internet. Et là aussi la question se pose : comment le protéger puisque le professionnel n'est pas visible sur la toile .Tout se fait de façon virtuelle» estime un spécialiste. Il y a un accord général sur le besoin de règles spéciales «pour protéger le consommateur électronique et lui éviter les arnaques sur les produits achetés sur le net».