Il a été donné hier le coup d'envoi de la campagne électorale officielle. Pendant les trois semaines qu'elle durera, les quarante-quatre partis politiques mais aussi les représentants des listes indépendantes vont aller à la rencontre des citoyens pour tenter de les convaincre, d'abord à se rendre aux urnes et ensuite de voter de préférence pour leurs candidats respectifs. La tâche s'annonce malaisée pour eux concernant le premier objectif, à considérer l'indifférence affichée par les Algériens pour la chose électorale et l'agitation post-campagne officielle à laquelle elle a donné lieu dans les milieux se préparant pour l'échéance du 10 mai. Pourtant les Algériens démontrent qu'ils sont friands des joutes électorales et des débats qu'elles suscitent comme le prouve leur intérêt soutenu pour l'événement de ce genre qui se déroule en France. Il semble qu'autant ils se sentent concernés par les enjeux de l'élection présidentielle française, autant ils ne voient pas l'intérêt qu'ont pour eux les élections législatives nationales. Ce paradoxe, s'il en est, n'est pas pour surprendre, car si les Algériens se passionnent pour des élections étrangères plutôt que pour celles de chez eux, c'est qu'en Algérie la chose électorale a toujours donné lieu à des mascarades dont ils ont fini par se lasser et à refuser de leur servir de caution. Depuis qu'elles ont fixé l'échéance des élections législatives, les autorités, et Bouteflika au plus haut de leur niveau, ont tenté de persuader les Algériens que le scrutin du 10 mai se déroulera dans les conditions qu'ils apprécient et envient pour ceux qu'organisent les Etats démocratiques. Les partis politiques ayant opté pour la participation à ce scrutin leur ont emboîté le pas pour essayer de convaincre ces citoyens qu'effectivement le 10 mai va constituer une rupture avec la malsaine tradition électorale dont l'Algérie a été coutumière, pour peu néanmoins qu'ils aillent voter massivement. Maintenant qu'ils sont descendus dans l'arène, ces partis sauront-ils développer les arguments qui feront tomber la défiance populaire affichée et marquée à l'égard d'une compétition électorale qui se résume pour beaucoup de citoyens à la course à une fonction lucrative. C'est mal parti pour eux en raison du peu ragoûtant spectacle qu'ont donné à voir d'eux certaines de ces formations à l'occasion de la confection de leurs listes électorales. Le pouvoir lui aussi a peu fait pour imposer la certitude qu'il y a réellement du nouveau qui a été apporté aux mœurs électorales algériennes. Il a certes pris l'initiative d'une batterie de dispositions censées garantir la transparence et la régularité du scrutin. Mais celles mises à l'épreuve à l'amont de ce scrutin ont révélé la virtualité de leur efficacité. Ce qui a fortiori fait déjà proclamer à une fraude électorale déjà en action par des partis engagés dans la compétition. Autant dire que ce n'est pas ce qui va inciter les citoyens à se départir de leur indifférence. Ce n'est pas par ailleurs en interdisant de campagne les partisans du boycott électoral que les autorités vont parvenir à faire aller les électeurs aux urnes. Un pareil arbitraire ne fera au contraire que justifier aux yeux de beaucoup qu'il n'y a rien de changé dans la pratique électorale algérienne et donc qu'il y a inutilité à voter le 10 mai.