Utiliser le téléphone portable pour consulter le solde de son CCP, transférer de l'argent et payer les factures courantes d'électricité, d'eau, de téléphone est encore impossible en Algérie. Alors que le mode de paiement s'est généralisé dans le monde, en particulier dans des pays d'Afrique dont nos voisins du Maghreb, l'Algérie accuse un retard important qui n'est pas près d'être comblé. Le ministre de la Poste et des Technologies de l'information et de communication, Moussa Benhamadi, avait annoncé, il y a plus d'une année, que le paiement électronique via le mobile (m-payement) allait devenir possible pour les 12 millions d'utilisateurs du Compte courant postal (CCP) d'Algérie Poste. Il avait annoncé des services primaires qui permettraient aux clients d'Algérie Poste de consulter leurs avoirs, de recharger leurs crédits chez les trois opérateurs (Mobilis, Djezzy et Nedjma), ou payer leurs factures ADSL, avant d'aller, dans une seconde étape, vers le transfert d'argent de compte à compte. A ce jour, ces services ne sont pas opérationnels. Et ce n'est certainement pas dû à l'absence de la technologie 3G de la téléphonie mobile, soutient l'expert en télécommunication, Ahmed Hamoui, dans une communication sur la téléphonie mobile en Algérie. La technologie 3G, développée dans le début des années 2000, et qui permet la transmission de données avec des vitesses allant de 144 Kbps à plus de 3 Mbps, n'est pas nécessaire pour faire du téléphone portable un terminal de paiement. M. Hamoui en veut pour preuve l'expérience kenyane dans ce domaine. Dans ce pays, qui reste à la pointe du développement en matière de TIC en Afrique, 30% des transactions commerciales sont réalisées via le mobile. La technologie utilisée est celle de communication de proximité (quelques centimètres) lancée par Sony et Philips, le Near Field Communication (NFC) qui permet d'échanger des données entre un lecteur et n'importe quel terminal mobile ou entre les terminaux eux-mêmes et ce, à un débit maximum de 424 Kbits/s. Le m-payement regroupe toutes les solutions de paiement via le mobile. Le portable peut représenter un canal comme les autres pour l'émission de transactions. Pour développer des solutions appropriées, il faut maîtriser les risques et sécuriser le processus de transferts d'argent, estime Mme Nawel Benkritly, DG de la Société d'Automatisation des Transactions Interbancaires et de Monétique (SATIM), qui explique que la partie technologie n'est pas la plus difficile et le blocage de cette solution est réglementaire. Toutes les conditions s'y prêtent Les pouvoirs publics veulent aller vers le paiement direct via le mobile et ensuite vers le transfert d'argent sur le modèle des Postes. Un pari difficile à réaliser. Il n'y a en effet actuellement que 850.000 cartes électroniques de paiement en circulation pour seulement 3500 commerçants, pour la plupart à Alger, qui ont accepté d'être payés par ce moyen. Avec un taux de pénétration de la téléphonie mobile avoisinant les 100% et une tendance à la hausse des ventes de smartphones, l'Algérie éprouve du mal à exploiter un service qui est pourtant à sa portée alors que les obstacles techniques ne se posent même pas. Cette technologie exige cependant un haut degré de coopération entre les opérateurs de téléphonie mobile et la Poste ou la banque qui doit délivrer un code confidentiel qui lui est strictement réservé. Dans ce domaine, et dans d'autres secteurs des TIC, les Tunisiens et les Marocains ont une bonne longueur d'avance. La Poste tunisienne et l'opérateur Tunisiana ont lancé un service de paiement mobile baptisé ''Mobiflouss'' accessible à tous les porteurs de la carte e-Dinar Smart et ainsi qu'aux abonnés de Tunisiana, même les non bancarisés d'entre eux. "Mobiflouss" permet le transfert d'argent, le paiement, la consultation des factures et la recharge d'une ligne prépayée Tunisiana et d'autres opérateurs. Il est prévu une extension de cette offre afin de permettre la gestion, à travers un téléphone mobile, d'un compte CCP, ainsi que l'émission et l'encaissement d'un mandat sans déplacement dans un bureau de poste. Bien avant la Tunisie, Maroc Telecom a lancé, en 2010, en partenariat avec Attijariwafa Bank et la Banque Populaire, le service MobiCash de transfert d'argent et de paiement par téléphone mobile. La législation dans ces deux pays permet depuis longtemps le recours à ce mode de paiement qui rencontre un grand succès, comme toutes les autres formes de paiement électronique, laissant l'usager algérien sur sa faim.