Comment revenir à la croissance dans un contexte marqué par les graves incertitudes à propos de plusieurs pays dont la Grèce et l'Espagne ? C'est la question cruciale à laquelle sont confrontés les membres de l'Union européenne (UE) et plus particulièrement ceux de la zone euro. On le sait, la question ne date pas d'hier. Depuis plusieurs années, l'Europe est confrontée à un sévère ralentissement de son économie et les multiples crises financières (subprimes, dettes publiques) n'ont fait qu'aggraver la situation. Aujourd'hui, c'est la manière avec laquelle la zone euro peut renouer avec la croissance qui divise. L'INCONTOURNABLE RELANCE On connaît le débat qui agite l'Europe. Prenant en compte la dégradation des finances publiques de plusieurs Etats, l'Allemagne et nombre d'économistes orthodoxes estiment qu'il faut d'abord mettre de l'ordre dans les comptes quitte à pratiquer une sévère cure d'austérité. C'est ce qui se passe d'ailleurs en Allemagne même, où les salaires ont été contenus depuis le milieu des années 1990, et où l'Etat fédéral n'est guère enclin à dépenser plus que ce que lui permettent ses moyens financiers. C'est aussi ce qui caractérise actuellement la Grèce avec une situation des plus dures marquées notamment par la baisse des salaires et des retraites ainsi qu'une diminution drastique des dépenses publiques. A l'inverse, de nombreux économistes et partis politiques de gauche ou de centre-gauche, estiment que seule une relance keynésienne permettra de rompre le cercle vicieux de la stagnation économique couplée à la dégradation des comptes publics. La méthode est connue depuis la Grande Dépression. Dans un contexte déprimé, l'Etat, par ses dépenses et ses investissements (infrastructures, chantiers urbains,…) relance l'activité économique et permet ainsi la création d'emplois. C'est ce que réclame par exemple le président français, François Hollande, qui estime que c'est à l'Europe d'être le moteur d'une telle dynamique. Encore faut-il pouvoir financer cette relance. Dans le cas présent, il n'y a que deux moyens possibles. Le premier reste l'endettement. Pour lancer de grands projets, il faudrait que l'Union européenne puisse s'endetter directement sur le marché en émettant par exemple des obligations ou eurobonds. Une possibilité à laquelle l'Allemagne, garante de l'orthodoxie monétaire en Europe, s'oppose avec force. Une autre piste, moins ambitieuse, consiste à mobiliser les ressources financières dont dispose déjà l'Union européenne, notamment les fonds structurels, afin de lancer une politique de grands travaux européens. Une idée défendue au milieu des années 1990 par Jacques Delors alors qu'il présidait la Commission européenne. UNE CRISE D'INSTITUTION Au-delà de l'opposition de vues entre la France et l'Allemagne, on voit bien que le problème est aussi institutionnel. Pour Berlin, il n'est pas question que le rôle de l'Union européenne évolue vers plus d'autonomie et de prise de décision. Dans la configuration actuelle, les Etats membres restent les maîtres absolus de la décision en matière de solution économique à la crise. Les semaines qui viennent diront si cela pourrait changer avec une Europe disposant de plus de prérogatives – notamment celle de lever l'impôt et de pouvoir s'endetter directement. Ce qui, en clair, signifierait une évolution vers plus de fédéralisme.