C'est avec le dossier de la préparation de la prochaine visite d'Etat du président français François Hollande en Algérie sous le bras, que Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée des Français de l'étranger et de la Francophonie, est venue à Alger. Cette réalisatrice d'origine algérienne, née à Lille (1957), rompue à la politique, a été en fait chargée par le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius de défricher le terrain et préparer les grands dossiers qui seront abordés lors de la visite, avant la fin de l'année - la date n'étant pas encore fixée - de François Hollande en Algérie. Dans une déclaration à la presse à son arrivée jeudi, elle a confirmé «être venue dans le cadre de la préparation de la visite du président Hollande en Algérie». Pour elle, «une très bonne mentalité» accompagne cette préparation, soulignant que le ministre de l'Intérieur, M. Manuel Valls, se déplacera lui aussi à Alger dans le cadre de la préparation de la visite du président Hollande. «Nous préparons cette visite avec vraiment beaucoup de joie. Ce n'est pas un terme que l'on emploie souvent en diplomatie, mais moi je vous le dis», a-t-elle précisé, avant de rappeler que Hollande a déjà séjourné en Algérie du temps où il était étudiant. La ministre française a, par ailleurs, estimé que la prochaine rencontre en Algérie entre les présidents Abdelaziz Bouteflika et François Hollande aura des effets «bénéfiques» sur les relations bilatérales. D'autre part, les entretiens qu'elle a eus avec le ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, M. Abdelkader Messahel, ont notamment porté sur le développement de la coopération entre les deux pays, ainsi que sur des thèmes relevant de l'agenda de la Francophonie. L'Algérie n'est pas membre mais seulement observateur du système de la Francophonie, qui réunit les pays ayant le français comme langue principale, et est le pendant du système du Commonwelth. Selon une note du gouvernement français, «la visite en Algérie de Mme Benguigui permettra d'approfondir les échanges en vue de l'élaboration du nouveau document-cadre de partenariat devant tracer les grandes lignes de la coopération franco-algérienne dans les années à venir». POLITIQUE ET ECONOMIE L'annonce de la visite prochaine de Hollande en Algérie donne ainsi la conviction pour le commun des observateurs que la France est en train de construire une nouvelle page avec l'Algérie. C'est, du moins, l'impression que laissent présager les gestes de bonne volonté de Paris et le nouveau locataire de l'Elysée, François Hollande. Dès son intronisation à la tête de l'Etat français, Hollande, qui a séjourné à Alger alors qu'il était étudiant et qui dit en garder de bons souvenirs, a appelé le chef de l'Etat pour lui exprimer «son attachement profond aux relations d'amitié franco-algériennes», avait indiqué un communiqué de l'ambassade de France. Mieux, et prenant à contrepied ses détracteurs et ses opposants de la droite, le président français a fait part à M. Bouteflika «de sa volonté de développer encore les nombreux liens existant entre la France et l'Algérie et de renforcer le partenariat entre les deux pays dans tous les domaines. Ce partenariat devra renforcer encore la proximité qui unit déjà les peuples français et algérien et contribuer à construire une communauté de destin entre les Etats de l'espace euro-méditerranéen». Et, pour renforcer, sinon confirmer sa volonté d'aller de l'avant avec Alger, Hollande a dépêché comme «éclaireur» son chef de la diplomatie, Laurent Fabius, pour déblayer le terrain et préparer les grands dossiers qui seront mis sur la table des discussions entre les deux chefs d'Etat dont la rencontre est prévue avant la fin de l'année. Il est clair que le dossier Algérie figure en haut des priorités de l'agenda de Hollande, qui aura en fait sur la table deux copieux menus: relancer le traité d'amitié algéro-français, bloqué par la droite, pour une réelle refondation des relations plurielles entre les deux pays, les deux peuples. Avec tout ce que cela suppose comme «devoir de mémoire» et la restitution des biens algériens pillés du temps de la colonisation. En second lieu, les deux chefs d'Etat doivent également discuter «économie, investissements, commerce, industrie». C'est en fait ce volet qui devrait huiler les relations futures algéro-françaises. Bien sûr que l'Algérie, avec un programme quinquennal de 286 milliards de dollars, et autant comme plan de charge pour les entreprises engagées dans ce programme, et ses réserves de change de plus de 200 milliards de dollars, est devenue un pays dont aucun Etat européen ne refuse le détour. Avec une dure crise financière qui lamine petit à petit tous les pays de l'UE, y compris la France, les mégaprojets en cours en Algérie sont autant de possibilités pour les entreprises françaises de décrocher des contrats. Dans ce registre, Hollande a déjà pris ses devants et chargé M. Jean-Pierre Raffarin de poursuivre sa mission de développer le partenariat entre les entreprises françaises et algériennes. Et, à ce titre, deux grands projets attendent d'être totalement finalisés et lancés: le projet Sonatrach-Total pour une usine de vapocraquage à Arzew, et l'usine Renault qui doit voir le jour à Oued Tlélat, près d'Oran. Tout cela, c'est du boulot, et c'est en quelque sorte pour cette importante raison que Benguigui a fait le déplacement à Alger, et après elle celle du ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, avec lui aussi des dossiers importants comme la circulation des personnes et la reconduction des accords consulaires concernant la communauté algérienne établie en France. Par ailleurs, concernant son engagement depuis 20 ans contre la discrimination et pour les droits des immigrés dans la société en France, Mme Benguigui a affirmé que «c'est un combat qu'on ne laisse pas à la porte d'un ministère et qui fait partie de mon identité et de ma personnalité». Lors de sa visite de travail à Alger, Mme Benguigui a eu des entretiens avec plusieurs responsables de l'Etat.