Pour une première tranche de 200 milliards de dinars Alger va se donner une autre dimension urbaine. Au centre de son développement, de grands équipements. Notamment ceux qui changent la mobilité urbaine. La courbe de la baie dessine le plan de développement 2030. Comme il y a un siècle et demi. Avec de nouveaux concepts et surtout une autre demande citadine. Le plan stratégique de développement de la ville d'Alger à l'horizon 2030 est une des attentes majeures de l'ensemble des acteurs de la ville depuis déjà plus de dix ans. Le projet est grandiose. Le coût des seuls projets prioritaires prévus d'ici à 2016 et contenus dans les programmes de structuration et de mobilité, de cohésion urbaine, de revitalisation et d'aménagement de la baie d'Alger avoisine les 200 milliards de dinars dont la moitié est totalement disponible presque exclusivement sur des financements publics. Dans le plan quinquennal 2010-2014, près de 150 milliards de dinars sont prévus pour donner corps au lancement de la reconquête du front de mer (Place des Martyrs et terrasses du port), la réhabilitation du centre historique, la restauration des équilibres écologiques, le réaménagement de quelques quartiers autour des grands équipements en chantier (Hussein Dey et l'Ilot du Bey), la structuration de la périphérie, le plan lumière et le macro-maillage en transports en commun. Une partie de ces projets portaient l'espoir de les voir finalisés pour le cinquantenaire de l'indépendance, mais la réalisation a pris tellement de retard que leur réception a été renvoyée de deux années au moins. La crainte est que les investissements colossaux qui vont être mis dans le plan stratégique ne débouchent pas sur une amélioration sensible du cadre de vie des citoyens du fait notamment de leur éloignement des centres de prise de décision. L'EFFET METRO ET TRAMWAY Le développement, même rudimentaire du tramway puis du métro a cependant commencé à redonner vigueur au centre d'Alger. Les foules qui ont envahi le centre ville durant les soirées du mois de ramadan passé ont permis de tester l'utilité du métro et la facilité qu'il offre pour se déplacer et de montrer l'incapacité du centre ville d'Alger d'accueillir autant de monde. La stratégique démultiplication prévue dans la partie revitalisation du projet va restructurer la ville autour de plusieurs centres : le Triangle d'Hussein Dey avec 100.000 m2 pour les activités tertiaires et autant pour l'hôtellerie et le commerce, l'embouchure de Oued El Harrach dans la même zone et avec le même périmètre à valoriser, et enfin l'Ilot du Dey avec ses 16 000 m2 d'hôtellerie et 5000 m2 de commerce. Ces projets à vocation commerciale dépassent les 80 milliards de dinars. Situés sur le parcours des grandes lignes de transport urbains, ces projets vont effectivement reconfigurer la ville, d'abord autour des promenades du front de mer et de la baie. La première ligne de développement reprend l'extension historique de la ville d'Ouest en Est le long de la baie, de la place des martyrs à l'embouchure de Oued El Harrach puis, plus tard, au Lac de Reghaia. Une deuxième ligne de développement intègre les quartiers intermédiaires de l'amphithéâtre algérois comme le Télémly. La promesse d'éviter d'en faire un autre Dubaï doit être une garde fou pour garantir au visiteur d'Alger et aux algérois une ville moderne et accessible adossée à une riche patrimoine qui lui insufflerait l'âme qu'elle a quelque peu perdu durant ces deux dernières décennies. RETABLIR LA FONCTION SOCIALE DU CENTRE Le développement anarchique de la ville d'Alger, conjugué à longue phase d'insécurité a participé à la grave dégradation du statut du centre de la ville qui s'est peu à peu vidé de ses activités commerciales et de loisirs. Le vieillissement du tissu urbain et la faiblesse des transports en commun ont poussé les habitants de la ville à se replier sur les quartiers jadis périphériques ou résidentiels pour en faire des lieux de vie bricolés pour répondre à des besoins de consommation d'abord basiques, construits autour d'un tryptique : manger, communiquer et s'habiller puis se nourrir. C'est le modèle fastfood, taxiphone et cyber puis boutique de vêtements de jeunes. C'est ainsi que des quartiers jadis résidentiels se sont rapidement transformés en lieux marchands, sans réelle planification ni participation autant des riverains que des organisations professionnelles et des élus locaux. L'aspiration à plus de mobilité et de loisirs, le désir de s'éloigner du quartier pour profiter de l'anonymat des grands centres urbains va pousser les «houmistes» à s'éloigner de lieu d'habitation pour animer des espaces plus vastes et plus anonymes. Une promesse de réhabilitation sociale et civique du centre ville historique autant que celle de l'émergence de nouveaux centres urbains à Alger.