L'observatoire de la société civile met aujourd'hui en place son centre opérationnel au niveau de l'hôtel d'El-Biar pour observer le déroulement des élections locales dans 18 wilayas du pays. Ce sont 30 bénévoles qui seront chargés de le faire fonctionner jeudi, jour du vote, dès 7h30 du matin. Une quinzaine d'entre eux interceptera les appels téléphoniques des 1.000 représentants (bénévoles eux aussi) qui seront au niveau des centres de vote de 18 wilayas pour leur fournir les données nécessaires au déroulement du scrutin. Les quinze autres jeunes seront aux commandes des computers pour les enregistrer. Les wilayas concernées sont, entre autres, Oran, Tlemcen, Alger, Tamanrasset, Mascara, Tizi Ouzou, Béjaïa, Adrar. " Nous avons eu des contacts avec le réseau associatif local pour établir les listes des volontaires qui ont bénéficié de formation par des ONG internationales, nous les avons équipés de kits logistiques d'observation, avec un guide, et 3 formulaires (un questionnaire, un document de base pour la collecte de données et un 3e pour inscrire les dépassements, au cas où ils sont repérés) ", nous explique le président de l'observatoire qui note que le choix des wilayas s'est fait sur la base de l'existence chez elles ou pas de formateurs. " C'est aussi une question de moyens que nous n'avons pas pour élargir l'observation à un plus grand nombre ", avoue-t-il. Nouredine Benbraham souligne que la formation de formateurs en matière d'observation des élections a été lancée il y a 15 jours dans 4 wilayas (Alger, Annaba, Oran et Adrar). " On a pu former 87 formateurs avec un encadrement de grands centres de formation comme le Centre El Hayat de Jordanie qui regroupe 150 ONG locales et qui a une grande expérience en la matière. " Il cite aussi la collaboration d'un expert algérien résidant en France et un autre américain. Créé par Adwaa Rights, une ONG algérienne, à partir d'une idée discutée avec ODIHR (office américain de la démocratie et des droits de l'homme), l'observatoire de la société civile du processus électoral a été mis en place par 11 ONG nationales. La faisabilité de l'idée sur la base de standards internationaux a été examinée en marge d'un forum sur la démocratie et les droits de l'homme tenu en décembre dernier à l'hôtel Essafir d'Alger où étaient présents des universitaires, des avocats, des représentants de 15 partis politiques, de 25 ONG nationales et internationales ainsi que ceux des institutions internationales accréditées en Algérie. «UN PLAIDOYER POUR INSTITUTIONNALISER LA CITOYENNETE ACTIVE» " Nous avons jugé nécessaire de travailler en réseau pour la promotion de la démocratie et les droits de l'homme, et surtout impliquer les jeunes dans la citoyenneté active ", nous disait hier Nouredine Benbraham, le président de l'observatoire. Il considère que " la citoyenneté active est un pilier de l'Etat de droit, un Etat qui accepte la transparence et surtout de rendre compte ". Le plus gros de la concertation a tourné, rappelle-t-il, sur " le rôle de la société civile dans l'observation du processus électoral ". Ce sont, selon lui, des ligues algériennes des droits de l'homme qui ont proposé l'organisation d'assises sur l'observation citoyenne des élections. Benbraham fait remarquer que la loi algérienne ne prévoit pas ce genre d'observation " mais ne l'interdit pas non plus ". Pour l'instant, il reconnaît que l'observatoire est un réseau informel, une coalition d'ONG. Plus de 25 ONG ont adhéré à l'observatoire dont le comité de pilotage s'exerce à construire un plaidoyer solide pour défendre l'idée de son institutionnalisation. Sa première expérience en matière d'observation, il l'a eue lors des dernières élections législatives pour laquelle, souligne son président, " il y a eu une mobilisation de près de 500 observateurs au niveau de 15 wilayas, nous avons partagé nos observations avec les observateurs de l'UE, de Carter Center, NDI et la mission du SG des Nations unies ". Il note d'ailleurs que " l'une des 35 recommandations de l'UE propose l'intégration de la société civile dans l'observation locale des processus électoraux ". «ON PARLERA MOINS DE FRAUDE» Adwaa Rigts, l'ONG dont Benbraham est aussi le président, compte bien saisir l'opportunité de la prochaine révision de la loi électorale, " l'année prochaine peut-être, dit-il, pour bâtir un plaidoyer en faveur d'une consécration légalisée de l'observation (et non pas le contrôle) des élections par la société civile ". Jeudi à 14h commence, selon lui, les premières estimations des résultats des élections locales. " Le centre opérationnel de l'observatoire devra commencer à donner ses premières impressions sur le déroulement de l'opération de vote. " De 7h 30 du matin à 14h, le centre devra avoir reçu 2.000 appels téléphoniques de ses représentants à travers les 18 wilayas observées. Un point de presse sera organisé à la même heure par ses responsables " pour en faire le point ". Ils prévoient d'élaborer un rapport final portant les observations et recommandations du centre. Rapport qu'ils rendront public et qu'ils transmettront aux institutions nationales et internationales, aux partis politiques ainsi qu'à toutes les parties concernées par les élections. " Cette implication citoyenne dans l'observation des processus électoraux renforce la transparence du vote et, par conséquent, garantit sa crédibilité ", estime Benbraham. Il va même plus loin en affirmant que " si un vote est jugé crédible par la société civile par la force d'une citoyenneté active, les réactions à ses résultats ne peuvent pas être violentes comme c'est le cas pour certaines élections, ce qui favorise l'instauration d'un milieu politique sain et d'un climat social serein. " Le tout contribue, selon lui, à " la réhabilitation de la confiance et à l'apprentissage effectif de la pratique démocratique ". Au QG de l'observatoire qui sera installé aujourd'hui à l'hôtel d'El-Biar, à Alger, seront aussi présents en plus des jeunes bénévoles, des experts américains, jordaniens et un expert algérien. " Ils auront à charge de veiller à la bonne gestion des outils informatiques puisqu'ils en sont spécialistes ", dit Benbraham. Il insistera beaucoup sur " l'autonomie, l'indépendance et la neutralité de l'observatoire " parce que, pense-t-il, " avec une citoyenneté active et une observation de la société civile indépendance, on parlera moins de fraude ".