L'annonce par Iyad Ag Ghali, le chef du groupe Ançar Eddine, d'un retrait de l'offre d'arrêt des hostilités faite à Alger dans le cadre d'un «partenariat» avec le MNLA est inquiétante. Il serait cependant faux de croire qu'elle constitue une surprise. A Bamako, on a choisi d'ignorer cette initiative en développant un discours exclusivement guerrier sur la base d'une lecture tronquée d'une résolution du Conseil de sécurité autorisant, sous condition, une action militaire au nord du Mali. Ceux qui suivent la situation à Bamako n'ont pas manqué d'observer que les politiciens - et les militaires - qui sont en grande partie responsables du désastre malien sont dans une euphorique fuite en avant. Au lieu de s'attaquer au fond du problème posé depuis des décennies par les Touaregs (ce sont des Maliens, faut-il le rappeler) par la voie de la négociation, ces politiciens et militaires adoptent une posture revancharde. Et surtout ils escomptent que cette intervention militaire adoubée par le Conseil de sécurité va les «débarrasser» du problème targui. Iyad Ag Ghaly n'a pas tort de dire qu'à Bamako on ne veut que la guerre et qu'il s'y exprime une volonté «d'écraser les populations du nord du Mali». Si ses accusations sur le «recrutement de mercenaires» par les autorités de Bamako restent à prouver, le discours ultra-guerrier à connotation ethno-raciste est bel et bien en vogue chez les politiciens maliens. Il est vrai aussi que le discours des dirigeants ouest-africains relayant apparemment celui des militaires français est déjà dans la guerre. Le ministre français de la Défense a même raccourci l'échéance de l'intervention au «premier semestre» 2013 (Prodi parlait d'automne 2013 avec une forte insistance sur la solution politique). Un spécialiste français des affaires militaires a fait remarquer que le ministre français avait annoncé, en octobre dernier, une action militaire dans «quelques semaines». Il a souligné également que les responsables français ont fait beaucoup de déclarations et de «gesticulations» au cours de l'année. «Prenant sans doute leurs désirs pour des réalités, des «spécialistes» expliquaient que le Sahel allait remplacer l'Afghanistan comme nouveau terrain de jeu de l'armée française», a-t-il observé. A l'évidence, ces déclarations et gesticulations sont prises au premier degré à Bamako. Il serait sans doute nécessaire que le secrétaire général de l'Onu rappelle que la résolution du Conseil de sécurité ne parle pas que d'action armée ; elle parle aussi de processus politique et de négociations. Il est probable que cette déclaration d'Iyad Ag Ghaly soit destinée à cet objectif d'alerte. Elle peut également répondre au fait que des dirigeants d'Ançar Eddine qui ont accepté, de mauvais gré, d'aller à la négociation ont fait valoir que l'offre de négociation ne recevait que du mépris à Bamako. Le chef d'Ançar Eddine les satisfait en retirant l'offre d'arrêt des hostilités mais il cherche visiblement surtout à préserver la possibilité d'une négociation. Plus que jamais, le gros du problème se trouve à Bamako.