La loi doit criminaliser la corruption, a proposé le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (Cncppdh), Farouk Ksentini, devant l'ampleur prise par ce phénomène. Les crimes liés à la corruption doivent être «sévèrement» punis et les auteurs ne doivent bénéficier d'«aucune circonstance atténuante», a ainsi déclaré, jeudi à l'APS, M. Ksentini, dans le sillage du rapport annuel pour 2012 de la Commission qu'il préside. Il insistera sur le caractère délictuel de l'acte de corruption et demande à ce que ce dernier soit «qualifié de crime passible d'une peine très sévère sans aucune circonstance atténuante». Il soulignera que la corruption qui «ne cesse de gangrener le pays», «fait du tort» à l'économie nationale en décourageant l'investissement rejoignant ainsi le rapport de la Cncppdh qui estime que la corruption «se banalise et, l'impunité aidant, risque d'entraver toute démarche destinée à atteindre les objectifs socioéconomiques». Me Ksentini fait également valoir l'image de l'Algérie largement déformée par la corruption, ce qui la place toujours au rang des pays les plus corrompus de la planète lors des différents classements établis par l'ONG Transparency International. Depuis une décennie, l'Algérie ne cesse d'occuper les dernières places de ce classement et dans son rapport annuel rendu public le 9 juillet dernier, Transparency International a épinglé l'Algérie en la classant au 105e rang sur 107 pays concernés par le sondage de cette ONG. Selon le rapport de l'ONG, la corruption s'est généralisée en touchant tous les secteurs d'activité. Une sentence qui se base sur un sondage d'opinion puisque 74% des Algériens pensent que le milieu des affaires est gagné par la corruption, ajoute la même source. 72% des sondés pointent du doigt la corruption dans la justice, suivent les services de sécurité, les partis politiques, les parlementaires, les médias, l'éducation et la santé. Rappelons que le baromètre mondial de la corruption de Transparency International est fondé sur les résultats d'un vaste sondage portant sur 114 000 personnes à travers le monde. En 2011, et sur les 183 pays concernés par le rapport de Transparency International relatif à l'indice de perception de la corruption, l'Algérie obtient la très mauvaise note de 2,9 sur 10, la même que celle de l'année d'avant, et la 112e place, reculant de 7 places par rapport au classement de 2010. Selon l'Association algérienne de lutte contre la corruption (AACC), «une note inférieure à 3 sur 10 signifie l'existence d'un haut niveau de corruption au sein des institutions de l'Etat». Le Cncppdh, dans son dernier rapport, interpelle justement «les hautes autorités nationales» pour éradiquer ce fléau à travers des actions profondes et continues en permettant notamment «au pouvoir judiciaire d'exercer pleinement, sereinement et de manière indépendante l'ensemble de ses prérogatives légales». Le constat fait par Transparency International rejoint dans le fond le rapport annuel de la Commission et ne fait que le confirmer. Me Ksentini a affirmé entre autres, à travers la lecture de ce bilan, que « la corruption a pris des proportions éminemment dangereuses. Elle est pratiquée tout le temps et dans tous les lieux, surtout pour contourner les lourdeurs et les lenteurs bureaucratiques ». En Algérie, il existe deux types de corruption, celle qui s'est banalisée touchant à tous les secteurs, entrant dans les mœurs sociales alors que la deuxième concerne de grosses affaires impliquant des cadres de l'Etat dans le cadre de transactions internationales ou des détournement à grande échelle de deniers publics. Reste à savoir maintenant l'option officielle qui sera prise pour essayer de stopper cette corruption rendue banale à force d'être encouragée.