Il y a des hommes qu'on n'oublie pas. Ils laissent des traces indélébiles de leur passage ici-bas, de par leurs engagements, leurs combats et leur dévouement pour leur prochain, leur pays. Feu Aboubakr Belkaïd était de ceux-là. Mais son parcours a été interrompu brutalement, le 28 septembre 1995 au square Port-Saïd, à Alger. Il a été assassiné. Il avait 61 ans et encore beaucoup à donner à son pays et ses trois enfants devenus subitement orphelins. Il y a 18 ans disparaissait un homme hors du commun, un humaniste mort pour son engagement de mort violente. C'était le fils d'un artisan-brodeur de Tlemcen, né le 19 mars 1934 à Tlemcen. Un 19 mars, drôle de coïncidence ! Aboubakr Belkaïd a dédié toute sa vie au service de l'Algérie, d'abord pour sa libération, ensuite pour son édification et son développement économique, social, scientifique et culturel. A l'âge de 15 ans, il faisait déjà partie des «achbels» du MTLD et était fasciné par la personnalité et le charisme de Messali Hadj dont il gardera le souvenir intact. En 1956, Aboubakr quitte Tlemcen pour se rendre à Alger d'où il rejoindra la France pour intégrer les cellules de la «Fédération de France». Une fois le pays libéré, Aboubakr Brelkaïd sera de tous les fronts. Aboubakr Belkaïd avait fait partie de l'opposition, critiquant la stagnation et la situation de crise permanente que connaissait le pays. Il a été membre du PRS (Parti Républicain Socialiste) fondé en exil par Mohamed Boudiaf, puis membre fondateur du FFS. D'autre part, son engagement en faveur des droits et des libertés se manifestera dans la clandestinité. Il se distinguera en faveur des libertés politiques, intellectuelles et culturelles. Sans jamais perdre d'illusion, il avait, de 1964 à 1992, occupé plusieurs postes de responsabilité, dont notamment ministre du Travail et de la Formation professionnelle, vice-ministre chargé de la Construction (1984-1987), ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche (1987-1988), ministre de l'Intérieur et de l'Environnement (1988-1989), ministre chargé des Relations avec l'APN et ministre et les Associations (1991), ministre de la Communication et de la Culture (1991-1992). Auparavant, en 1964, il fut chargé de mission puis sous-directeur au ministère des Affaires sociales, puis directeur des services techniques de la formation professionnelle en 1965. En 1967, il a été directeur de l'Institut national de la Formation professionnelle et, en 1973, directeur de la Présidence de la République. En 1977, il occupa le poste de Secrétaire général du ministère de l'Habitat. Ses qualités tant humaines que scientifiques ont fait de lui une référence dans toute l'Algérie, voire dans la région du Maghreb et de cette rive de la Méditerranée. Son combat était également aux côtés des dévoués de la promotion de la science, de la culture et l'ancrage des valeurs démocratiques et de la modernité en Algérie. Les batailles que l'on perd sont celles que l'on n'engage pas, c'est l'épitaphe qu'on peut lire sur le marbre de la pierre tombale d'Aboubakr Belkaïd qui repose au cimetière d'El-Allia depuis septembre 1995.