Le ministre des Affaires étrangères égyptien, Nabil Fahmy, est, depuis dimanche, à Alger pour des «consultations diplomatiques» avec son homologue algérien, Ramtane Lamamra. Cette visite intervient dans une conjoncture particulière, du fait de la destitution du Président Morsi, suite à un putsch orchestré par le ministre de la Défense et chef d'état-major de l'armée égyptienne, le général Abdelatif Sissi, devenu, désormais, célèbre pour ces positions radicales à l'encontre des Frères musulmans. La visite aurait pu passer inaperçue si ce n'est que notre pays est le principal instigateur d'une résolution de l'Union Africaine (UE) qui ne reconnaît pas les régimes africains, arrivés au pourvoir par la force armée. Et pour ce qui est du cas de l'Egypte, il s'agit bel et bien d'un coup d'Etat contre un président élu démocratiquement après la chute de Hosni Moubarek, qui a tenu, faut-il le rappeler, le pays d'une main de fer, durant plusieurs décennies. Lors d'une conférence de presse, organisée hier, au ministère des Affaires étrangères, le chef de la diplomatie algérienne, Ramtane Lamamra, a été plus «diplomatique» que d'habitude, en expliquant que la suspension de l'Egypte de l'Union Africaine n'était pas une «suspension» à proprement dite, mais simplement un «gel temporaire» pour inciter au retour du pouvoir constitutionnel. Quelque peu gêné par la question qui revenait, à chaque fois, Lamamra lâchera : «nous n'avons de leçons à recevoir de personne» dira-t-il en soulignant que l'Algérie n'a jamais cautionné l'exclusion d'un quelconque pays de l'Union Africaine. Au contraire, ajoute le ministre, notre pays a toujours soutenu le règlement pacifique des conflits, tout en évitant de s'immiscer dans les affaires internes de pays souverains. La visite du ministre égyptien entre dans le cadre de la relance des relations bilatérales et de concertation, autour d'un certains nombre de dossiers, dira Ramtane Lamamra qui précise, qu'en dépit du manque de temps, Nabil Fahmy a pu rencontrer plusieurs responsables algériens, à leur tête le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika. «Nous avons affaire à des Etats et nous nous interdisons de s'ingérer dans les affaires internes de l'Egypte» renchérit le chef de la diplomatie algérienne qui ajoute, toutefois, que l'Algérie suit également avec intérêt les aspirations du peuple égyptien. Comme il fallait s'y attendre, on a eu droit, hier, tout au long de la conférence de presse, à la langue de bois de notre ministre, dans un souci évident d'éviter de «froisser» son invité et son homologue qu'il dit connaître depuis une trentaine d'années. De son côté Nabil Fahmy a été très clair. La destitution de Mohamed Morsi est une décision souveraine de l'Egypte, a-t-il déclaré, en appelant, au passage, la Communauté internationale à soutenir les nouveaux hommes forts de ce pays. Le chef de la diplomatie égyptienne dira, à ce sujet, que l'armée de son pays est intervenue sur demande du peuple pour écarter un dictateur. La mouvance islamiste ne se limite pas, seulement, aux Frères musulmans, ajoute encore M. Fahmy qui soutient que «le peuple égyptien a prouvé qu'il pouvait se libérer du joug de n'importe lequel, en l'espace de trois années». «Il n'y aura plus de place au terrorisme dans le futur, en Egypte» tonne le conférencier qui a plaidé pour le retour de son pays au sein du conseil de l'UA. «Nous voulons que le conseil de l'UA revoit sa décision car ce qui s'est passé en Egypte est simplement une opération de reprise de la légitimité», a déclaré le ministre égyptien qui soutient pour ce qui est des centaines de Frères musulmans emprisonnés, que la justice dans son pays est «indépendante». Evoquant le dossier syrien, Nabil Fahmy affirme que son pays partage des «points convergents» avec l'Algérie, à leur tête une issue pacifique au conflit qui a déjà fait des dizaines de milliers de victimes. Enfin pour ce qui est de sa visite en Algérie, le ministre des Affaires étrangères affirme que cela entre dans le cadre de la reconstruction de la politique égyptienne à l'étranger.