Affichant la prétention d'être dans le «secret des dieux» grâce aux sources fiables dont ils disposeraient dans les hautes sphères du pouvoir, des milieux de la politique et des médias soutiennent avec une insistance jubilatoire que Bouteflika aurait non seulement renoncé à être candidat en avril prochain mais que forcé et contraint il a du même coup été obligé de remiser son projet de révision constitutionnelle. Dans ces milieux donc, l'on cultive la certitude qu'il va y avoir une élection présidentielle sans Bouteflika et que si révision de la Constitution il y aura, elle n'interviendrait qu'après ce crucial rendez-vous électoral. Certitude qu'en ses deux volets nous ne partageons avec ceux qui en sont les chantres. Il semble pour nous en effet que le président est loin d'avoir irrévocablement tranché pour ne pas se représenter à l'élection présidentielle et que de toute façon il est déterminé à faire aboutir son projet de révision de la loi fondamentale. Qu'il fasse la révision avant ou après l'élection présidentielle, cela ne tient qu'à la décision qu'il arrêtera concernant son sort personnel pour cette échéance. Il la fera avant dans le cas où il aura opté pour jeter l'éponge pour ce qui est de sa candidature. Après si au contraire il fait choix de se porter candidat. L'argument temps qui est avancé pour créditer la thèse qu'une révision de la Constitution n'est plus possible à trois mois de l'élection présidentielle ne tient pas la route pour une procédure dans laquelle seul l'avis de l'institution parlementaire serait requis. De cette façon l'affaire serait « pliée » dans le plus court délai. L'on peut avancer donc que le flou qui entoure la révision constitutionnelle promise par Bouteflika n'existe que parce que celui-ci n'ayant pas encore arrêté s'il se portera ou non candidat, il se garde bien de dévoiler le timing qui sera celui de cette opération. On peut accorder une probabilité de réalité à l'hypothèse du renoncement de Bouteflika à briguer un quatrième mandat, mais pas à son intention de partir sans avoir imposé les termes de sa succession. C'est cette obsession qui est en fait à l'origine de la volonté de Bouteflika de remodeler la loi fondamentale du pays. Candidat, Bouteflika s'estimera disposer du temps pour réaliser cet objectif et partir ensuite en ayant assuré à sa convenance et à celle de son clan la succession qui interviendrait. Non candidat, il s'assurerait la concrétisation de son projet avant l'échéance de son mandat en disposant de la latitude de peser de façon déterminante sur le choix du candidat officiel appelé à lui succéder et à gouverner avec les nouvelles dispositions constitutionnelles introduites par sa révision constitutionnelle. Qu'il ait donc décidé de rester ou de partir, Bouteflika tient toujours, à notre point de vue, à son projet de révision de la Constitution. Les partis ou milieux qui pensent que cette opération n'est plus à l'ordre du jour à court terme jugent mal, nous semble-t-il, le rapport de force au sein du pouvoir et ont tort totalement d'avoir conclu qu'il serait en défaveur du président malade et de ce fait dans l'impossibilité d'imposer ses desseins.