Les Américains reprochent à l'Algérie de changer ses lois «du jour au lendemain et sans préavis, l'excès de bureaucratie, les retards pour le dédouanement, les difficultés pour obtenir un agrément pour la création d'une entreprise, et les obstacles liés au rapatriement des dividendes par les sociétés étrangères.» C'est en substance ce qu'a souligné, hier, le représentant adjoint du Commerce pour l'Europe et le Moyen-Orient au Bureau du représentant américain du Commerce (USTR), lors d'une conférence de presse qu'il a animée au siège de l'ambassade des Etats-Unis, à Alger. Daniel Mullaney L. vient de passer deux jours en Algérie pendant lesquels, il affirme avoir eu des discussions avec des responsables économiques et commerciaux. Discussions, troisièmes du genre, menées dans le cadre de l'Accord pour le Commerce et l'Investissement (TIFA) qui a été signé par les deux pays, en 2001. Le directeur général du Commerce extérieur algérien a rencontré, à cette époque, les représentants de l'ambassade pour, disent les Américains, «demander une assistance technique dans une variété de domaines, notamment les lois commerciales, les cadres juridiques, la propriété intellectuelle et les obstacles procéduraux, pour le Commerce et l'Investissement ». Depuis, plus rien. Ce n'est qu'après dix longues années qu'Algériens et Américains ont repris leurs réunions parce que, indique le représentant américain « nous sommes plus que jamais convaincus du potentiel des relations algéro-américaines, en matière de commerce, ces dernières années, nous avons développé un intérêt croissant pour l'investissement hors hydrocarbures, en Algérie, et nous avons eu, durant ces deux jours, un bon démarrage avec les secteurs concernés». Les deux pays prévoient, dit-il «de faire du Conseil TIFA un élément permanent de nos relations commerciales et d'investissement». Daniel Mullaney fait savoir que les échanges commerciaux entre l'Algérie et les Etats-Unis ont atteint, en 2014, près de 7 milliards de dollars. «Notre volonté est de voir ce volume augmenter, en qualité et en quantité, et de passer des hydrocarbures à une diversification des investissements,» a-t-il noté. «IL FAUT REVOIR LES POLITIQUES ENCOMBRANTES» Les entretiens qu'il dit avoir eu avec les responsables algériens ont porté sur «les moyens de renforcer la croissance, l'économie, l'investissement et des emplois mieux rémunérés». Ce qui contribuera, selon les Américains à «renforcer la stabilité et la paix, en Algérie et à accroître nos relations». Des emplois mieux rémunérés peuvent être atteints, selon lui, au niveau de sociétés exportatrices. «Une étude américaine a montré qu'une société qui exporte peut assurer des salaires de 15 à 20% plus élevés que ceux d'une société qui n'exporte pas, si ça a marché aux Etats-Unis, il n'y a pas de raison pour que ça ne marche pas en Algérie, » explique le conférencier. Les Américains veulent que l'Algérie facilite la création de PME parce qu'elles peuvent, selon lui « vendre leurs services à des clients étrangers, c'est très prometteur pour le pays». Il assure même que « les entreprises américaines sont très intéressées par les opportunités d'affaires en Algérie ». Il fait d'ailleurs savoir que des missions d'affaires américaines, accompagnées, entre autres, par des représentants du département d'Etat, viendront le mois prochain, en Algérie. Mais il insiste sur la nécessité pour les responsables algériens de revoir « les politiques économiques et commerciales encombrantes, notamment, en matière d'investissement et les difficultés pour la protection de la propriété intellectuelle ». Il estime que «la levée de ces obstacles est importante parce que si les entreprises peuvent manœuvrer, entre ces difficultés, pour investir en Algérie, les PME ne pourront pas le faire parce que ces barrières peuvent leur peser très lourdement, cela empêchera la création d'emplois». Ce qui le laisse dire que «les opportunités d'investissement en Algérie ne sont pas toujours faciles à exploiter mais à travers un dialogue ouvert et franc, on pourra arriver à une entente ». Pour lui, « les obstacles peuvent être surmontés (puisque ndlr), les dernières discussions algéro-américaines ont porté sur comment, petit à petit, lever les protections sur les secteurs économiques et commerciaux même si nous estimons qu'elles sont parfois nécessaires. » «IL FAUT OUVRIR LA VOIE AU PRIVE» Daniel Mullaney promet aussi qu' «on ne touchera pas aux textes qui protègent contre la concurrence déloyale. » Ce qui ne sera pas le cas pour les lois et règlements régissant le Commerce et l'Investissement, puisque, dit-il « nous devons les revoir et déployer des efforts pour appuyer la création de PME, en Algérie et aux Etats-Unis ». Il souligne que « nous allons examiner toutes les lois et politiques qui existent pour voir si elles contiennent des obstacles ou pas et aussi pour offrir plus de protection au monde du travail ». Il recommande à l'Algérie de disposer d'un cadre législatif et réglementaire clair pour prétendre à des investissements hors hydrocarbures. « A condition, dit-il, que les lois ne doivent pas être changées, du jour au lendemain et sans préavis ». Il lui reproche, dans le même ordre « l'excès de bureaucratie, le retard dans le dédouanement, les difficultés pour l'agrément de création d'entreprise, et pour le rapatriement des dividendes par les sociétés étrangères ». Il pense, même, qu'«être membre de l'OMC permet moins de bureaucratie, plus de transparence et donne plus de possibilités d'investissements étrangers.» D'ailleurs, affirme-t-il « les Américains posent beaucoup de questions à l'Algérie dans le cadre des négociations pour son accession à l'OMC, c'est parce que nous voulons l'aider à en être membre et en tirer profit, on espère pour cela, travailler avec des groupes conjoints ». Daniel Mullaney explique, par ailleurs, que « nous voulons aider l'Algérie à régler ses différends avec l'Union européenne parce que nous devons avoir des discussions d'égal à égal, pour plus d'avantages économiques avec pour objectif, permettre à l'Algérie davantage d'investissements et de commerce ». Il conseille aussi à l'Algérie de diversifier ses partenaires commerciaux « parce qu'en cas de crise comme c'est le cas pour l'Europe et non pour les Etats-Unis, elle aura assuré une marge de manœuvre ». Il est, cependant, convaincu que « le privé doit être partie prenante dans le commerce et l'investissement ». Les Américains pensent, selon lui, à investir dans les domaines de la Santé, l'Agriculture et les Technologies de pointe. « Mais il faut, d'abord, ouvrir la voie au privé, » suggère-t-il. Daniel Mullaney fait savoir que «la prochaine réunion pour identifier les opportunités d'affaires, en Algérie, aura lieu dans une année ou au plus tard dans 18 mois ».