Un professeur en archéologie de l'université Mentouri de Constantine, M. Aziz Tarek Sahed, a déploré, hier, que la recherche et les écrits portant sur l'époque préhistorique de l'Algérie ont été complètement perdus de vue, ou à la limite ils ont été délaissés, et tout l'intérêt des chercheurs et des historiens s'est porté uniquement sur les monuments mortuaires. Ce qui fait que nous ne possédons pas, ou très peu, d'information sur cette période de l'histoire du pays. Ce constat qui a été relayé par d'autres conférenciers, a été fait dans le cadre du colloque national sur le thème : «Cirta et les Royaumes Numides», qui a été ouvert hier pour deux journées, les 20 et 21 mai, au musée public national Cirta de Constantine, situé dans le quartier du Coudiat Aty, dans le cadre du mois du patrimoine qui se tient cette année sous le slogan «Le patrimoine et le territoire». Selon M. Foughali, directeur de la culture, qui a présidé à l'ouverture de la manifestation, et Mme Dahou-Kitouni Keltoum, directrice du musée, ce colloque est la continuation de l'exposition qui est organisée actuellement au palais de la culture Mohamed Laid Al Khalifa. Ce colloque a réuni d'éminents spécialistes de l'archéologie et de l'histoire venus de tout le territoire national, dont la plupart ont fait des communications intéressantes sur le thème retenu. Il en est ainsi de M. Hocine Taoutaou, docteur en archéologie et responsable de l'annexe de Ain-M'lila du centre national de recherches sur la préhistoire, qui a avancé une thèse originale et inédite sur la ville de Cirta au temps des royaumes numides et de Massinissa. Il a centré son propos sur ce qu'était la cité, son architecture, ses bâtiments et tout ce qui concerne l'organisation générale de la ville. Dans sa conférence d'une quinzaine de minutes, il s'est référé aux vestiges de l'époque et aux archives grecques et romaines. «Au cours de mes études et recherches sur cette époque, a dit M. Taoutaou, je suis parvenu à élaborer une hypothèse tout à fait personnelle, et selon laquelle celui qui veut savoir comment était Cirta à cette époque n'a qu'à regarder la ville romaine de Tiddis». Cette cité a été construite comme Constantine, sur un rocher, et nous constatons que les habitants de ce rocher de Tiddis ont construit leur ville en taillant le rocher pour faire les rues, les canalisations ; et même les chambres des maisons étaient taillées dans le rocher. Aussi, je pense que Cirta ressemblait un peu à ce qu'à été Tiddis. Cirta était une ville cosmopolite. Ses habitants étaient composés d'un amalgame de gens venus d'ailleurs de tout le bassin méditerranéen. Le système hydraulique était assez développé et l'eau à cette époque était puisée dans les rivières. Cirta avait le Rhumel dont les eaux étaient limpides à cette époque-là qui correspond au 3ème siècle avant Jésus-Christ. Et l'orateur de poursuivre devant un auditoire captivé par les détails et les informations inédites qu'il donnait, en disant que Cirta était, à cette époque, une cité avec ses portes, ses remparts et renfermait même un château. Au royaume de Massinissa, dira encore M.Taoutaou, Cirta avait connu un développement énorme. Le territoire du royaume de Massinissa était immense et s'étendait des frontières de la Libye à l'Est jusqu'au royaume de Maurétanie qui correspondait globalement à l'actuel Maroc. En ce qui concerne le commerce qui était très florissant à l'époque, il s'étendait sur tout le bassin méditerranéen puisque nous avons trouvé des pièces de monnaie numides dans toute l'Europe occidentale». A la fin de sa conférence, M. Taoutaou fut assailli de questions. Et des notabilités de la ville, parmi lesquelles nous avons remarqué l'ancien président de l'APC, M. Mohamed Tahar Arbaoui, ont reconnu l'originalité des informations apportées par le conférencier et qu'ils entendent pour la première fois. «Il a jeté une lumière crue sur une époque de l'histoire de Constantine qui comporte encore beaucoup de zones d'ombres», nous a confié, à la fin de la conférence, un ancien professeur de lycée en retraite.