Paul Watzlavick, le sous-directeur et porte-parole du Bureau presse et diplomatie pour le Proche-Orient au département d'Etat a avoué que les Etats-Unis agissent souvent sur la base d'informations qui ne sont pas toujours fiables. Watzlavick a séjourné à Alger, mercredi et jeudi derniers. Il est venu discuter avec les journalistes algériens sur des questions d'actualité. Comme les Américains sont impliqués, directement ou indirectement, dans tout ce qui se passe dans le monde, toutes les questions étaient donc permises. Il en a répondu à de nombreuses, posées jeudi dernier, par un groupe de journalistes qu'il a rencontré autour d'un déjeuner à l'ambassade américaine. Il est vrai qu'en avouant que les Américains agissent, très souvent, sur la base d'informations qui ne sont pas toujours fiables, le responsable américain n'a pas violé de secret. Leur occupation de l'Irak, «le procès» et la condamnation à mort de Saddam Hussein, seront, durant toute l'histoire de l'humanité, le parfait exemple de la faute commise à cause de faux arguments. L'Afghanistan n'en est pas moins un scénario mensonger qu'ils ont confectionné pour, disaient les responsables de l'OTAN, «liquider les Talibans terroristes en un printemps.» Leur formation (formatage ?) de 5.000 Syriens issus du mouvement de rébellion contre El Assad, mais dont 90% ont rejoint Daech, en est une autre faute. C'est ce qui appelé «le pragmatisme américain qui est d'intervenir puis de réfléchir après,» disait l'intriguant Robert Ford, le diplomate américain qui a fait parler de lui, en Algérie, à la fin des années 90 et en tant qu'ambassadeur durant celles 2000 et plus tard en Syrie. Le chaos des pays et des peuples et les dommages collatéraux n'importent pas aux Américains. «Ce sont les historiens qui peuvent juger des interventions, en Irak et Afghanistan,» estime le responsable américain. Le Moyen-Orient «du Maroc à l'Iran» Paul Watzlavick a affirmé que «les Américains offrent leur aide aux chargés de la presse et de la diplomatie «du Maroc à l'Iran», une région qui ressemble à l'objectif de l'Amérique « de Tanger à Kaboul » du Grand Moyen-Orient (GMO) «Nous agissons sur trois volets : le premier est de briffer (débriffer) les journalistes pour expliquer la politique étrangère américaine, le second est de préparer des réponses aux officiels américains, sur les politiques étrangères des pays comptés dans le grand « Middle East» et le troisième, c'est qu'il siège dans une commission composée de représentants institutionnels américains et d'autres de gouvernements étrangers, chargée de «travailler et développer le message médiatique, pour contrer le discours de Daech.» Le petit Moyen-Orient pour les Américains englobe des pays d'Afrique du Nord mais «du Maroc à l'Egypte.» Le déplacement de Hafter, le haut gradé militaire libyen, à Moscou ces derniers jours, le diplomate américain n'en sait rien. « Je n'en ai aucune idée.» Le Maréchal Khalifa Hafter, faut-il le rappeler, a vécu plus de 20 ans aux Etats-Unis. Paul Watzlavick l'a lui-même confirmé, tout autant que les contacts qu'il entretient avec les Américains. «Les Etats-Unis soutiennent le gouvernement d'Union nationale que préside Esseradj,» dit-il. Le président du Conseil présidentiel du gouvernement libyen, Fayez Esseradj est, ajoute-t-il «pour nous l'unique représentant légitime du peuple libyen, il faut travailler avec lui, on lui assure -à lui uniquement- une assistance militaire pour contribuer à la réussite de ses actions pour la résolution de la crise libyenne, les actions d'autres pays qui sont contre ne sont pas utiles, la concurrence internationale n'est pas bénéfique pour la Libye.» Les USA soutiennent en évidence «les efforts de Kobler, le représentant onusien pour la Libye et espèrent que sa mission sera couronnée de succès». Mokhtar Belmokhtar tué par les Français ? «Nous travaillons avec le département de la défense pour confirmer ou infirmer l'information rendue publique ces derniers jours,» a-t-il répondu. «68 pays luttent contre Daech» L'interlocuteur américain du groupe des journalistes précise que «les Américains focalisent, en Libye, sur la lutte contre l'extrémisme violent, avec la même stratégie qu'en Irak». Comme l'a déjà dit Kobler, à Alger, «les Etats-Unis ont mené en Libye, un certain nombre de raids militaires à partir de bases militaires en Europe, à la demande du gouvernement libyen, ceci pour éviter à Daech d'y installer ses bases», dit Watzlavick. Au moment où le ministre des Affaires maghrébines, de l'Union africaine et de la Ligue des Etats arabes reconnaît que le terrorisme s'est propagé dans d'autres villes maliennes et dans d'autres pays comme le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire et plus récemment le Niger, la Communauté internationale pense que les interventions militaires en Libye sont en train de pousser Daech, dans ses derniers retranchements. Il est vrai que les groupes terroristes se sont retranchés dans une partie de Syrte mais la problématique du désordre reste entière. Le terrorisme et la prolifération des armes en Libye ont d'effroyables effets sur toute la région. Abdelkader Messahel parle même de reprises des recrutements dans la région «des combattants terroristes étrangers» revenus d'Irak et de Syrie. Ce sont, dit Watzlavick, «68 pays en plus de ceux partenaires qui luttent contre Daech, pour tarir ses sources de financement et limiter ses capacités de nuisance.» Daech, explique-t-il «n'est pas une armée mais une idéologie.» La question sur l'existence ou non de bases américaines en Tunisie était inévitable. «Il y a seulement des drones américains, en Tunisie, qui ne sont pas équipés militairement mais uniquement de caméras pour la reconnaissance des lieux en Libye, les drones sont dans une base militaire tunisienne, il n'y a aucune base américaine en Tunisie,» a affirmé encore Watzlavick. Avec Trump «pas de grands changements» L'élection de Donald Trump comme président des Etats-Unis changera-t-elle toutes les donnes ? «Les citoyens n'en sont pas préoccupés parce que les Etats-Unis sont un pays fort avec des institutions fortes,» dit le responsable américain. Donc pas de grands changements dans la politique interne et externe des Etats-Unis avec un nouveau président, combien même il s'appelle Trump. «Son élection prouve que le peuple américain est prêt pour un changement,» dit Watzlavick. Elle est, selon lui «pour permettre aux Américains défavorisés d'exprimer leurs frustrations.» Pourtant, le vote populaire a été bien remporté par la démocrate Hillary Clinton mais le vote des grands électeurs a créé un certain équilibre qui a permis à Trump de triompher. L'invité américain d'Alger avait commencé ses discussions avec les journalistes par noter que «l'Algérie est aux yeux des Américains, un pays important dans la stabilité et la sécurité de la région». Il reconnaît qu'elle a «des problèmes économiques mais ce n'est pas propre à elle, il y a d'autres pays qui en ont aussi.» Il relève que «l'Algérie adopte une politique de non interventionnisme, en raison de son refus de ne pas intervenir dans les affaires internes des pays mais elle a une politique importante pour le maintien de la sécurité et la paix, les Etats-Unis apprécient ce rôle.» Les Américains considèrent aussi que «l'Algérie et le Maroc sont des pays stables, ils ont parfois des problèmes entre eux mais leur rôle dans la sécurité, dans la région est important,» dit Watzlavick.