Les chefs d'Etat et de gouvernement venus à Addis-Abeba pour prendre part au 28e sommet de l'Union africaine ont entamé les travaux de celui-ci par une «retraite» qu'ils ont consacrée à l'étude du projet de réforme de l'organisation dont ils avaient confié la préparation au président rwandais Paul Kagamé. Ce qui a résulté de cette «retraite» n'a pas encore été rendu public mais l'on peut gager sans grand risque de se tromper que le débat qui s'est déroulé autour du projet présenté par le président rwandais a donné lieu à de rudes passes d'armes entre des intervenants partagés sur la nature des réformes qu'il faut faire accomplir à l'Union africaine. Ce n'est pas tant la nécessité ou non à réformer l'organisation panafricaine qui pose problème aux chefs d'Etat et de gouvernement des pays membres, mais la question de savoir si les réformes doivent se cantonner à viser l'adaptation et l'ajustement institutionnel de l'Union africaine sans remise en cause de ses instruments fondamentaux en particulier son acte constitutif. Il y a en somme des Etats qui s'en tiennent à des réformes n'ayant pour but que des révisions liées à l'architecture institutionnelle, au fonctionnement ainsi qu'aux procédures et méthodes de travail sans qu'il faille remettre en cause les principes politiques qui lui ont été fixés à sa création. D'autres par contre estimant que certains de ces principes sont sujets à révision du fait des évolutions du contexte dans lequel ils ont été édictés. Les divergences que cette problématique a fait naître entre les deux camps sont aggravées par le fait qu'ils se soupçonnent mutuellement d'avoir pris position sur le sujet non pas pour contribuer à rendre l'Union africaine plus performante et mieux adaptée pour relever les défis auxquels elle est confrontée en tant qu'institution porte-voix du continent, mais en considération d'arrière-pensées qui tiennent à leurs différends sur la manière de régler certains problèmes dont l'Union est l'arène. Celui du Sahara occidental en est probablement le plus clivant. Il ne fait aucun doute qu'il y a corrélation entre ce dossier et l'attitude des uns et des autres d'entre les participants au sommet. L'admission du Maroc au sein de l'Union africaine pour laquelle se sont mobilisés ses alliés dans celle-ci ne peut aboutir comme espérés par le roi et sa diplomatie par le retrait à la RASD de sa reconnaissance en tant qu'Etat et son statut de membre à part entière au sein de l'organisation que s'il y aurait effectivement révision de caractère politique de la charte de cette dernière. Ce dont les défenseurs de la RASD ne veulent à aucun prix entendre parler et font de l'intouchabilité des fondamentaux contenus dans l'acte constitutif de l'Union africaine une ligne rouge non négociable. Le même problème que celui du conflit du Sahara occidental est pour une bonne part encore dans l'autre épineux dossier sur lequel les chefs d'Etat et de gouvernement ont à se prononcer: celui de la succession à la présidence de la Commission de l'Union africaine. C'est en bonne partie à l'aune de considérations liées à ce dossier que les cinq candidats en lice à la succession de la Sud-Africaine Nkosazana Dlamini-Zuma obtiendront ou non le quorum de voix indispensable pour accéder à la tête du stratégique organe de l'Union. Autant dire que ce qui va émaner du 28ème sommet de l'Union africaine va être éclairant sur les rapports de force interafricains que cristallise la question du Sahara occidental.