La situation économique du pays reste toujours préoccupante, avec d'importants déficits, commercial et budgétaire, une baisse drastique des recettes d'hydrocarbures et l'inefficacité des autres secteurs pour proposer des solutions alternatives à la chute du prix du pétrole, alors que sur le plan monétaire, les banques peinent à soutenir l'investissement et la relance de la croissance. Les réserves de change restent « confortables » cependant à 114 milliards de dollars, comparativement à la chute vertigineuse des recettes pétrolières, entre 2014 et 2016, à moins de 30 milliards de dollars. Dans son rapport au Conseil de la Nation, hier, mercredi, sur « les évolutions financières et monétaires du pays p,our 2015 » et « les grandes orientations de 2016 », le gouverneur de la Banque d'Algérie Mohamed Loukal a donné des indicateurs inquiétants sur l'Economie nationale. Même si le taux de croissance, en 2016, était de 4%, un peu plus que les 3,8% de 2015, cela est le résultat des performances, seulement, du secteur des hydrocarbures. Car la croissance hors hydrocarbures est restée faible avec, seulement, 3,6% contre les 5 et 6% de la fin des années 2000, et même 5%, une année auparavant. Par contre, la croissance du secteur des hydrocarbures, dont la production a augmenté, est de 5,6%, en 2016, nettement en hausse par rapport à 2015. Globalement, le secteur des hydrocarbures a progressé de 5,2 points, en 2016, par rapport à 2015, alors que les autres secteurs économiques (industrie, agriculture, services) ont traversé un trou d'air, avec un recul de 1,3 point, durant la même période. Le rapport de la Banque centrale revient, en outre, sur les recettes des exportations pétrolières, durant les 3 dernières années, depuis la crise de juin 2014. Les recettes sont passées de plus de 63 milliards de dollars en 2014, (à 100,2 dollars/baril), à 27,66 milliards de dollars en 2016, avec un prix du baril à 45 dollars, et 33,08 mds de dollars, en 2015, avec un prix du baril à 53,1 dollars en moyenne annuelle. L'année 2016 a enregistré, en outre, une hausse des volumes exportés de 10% par rapport à 2015. Résultat : la fiscalité pétrolière chute et passe à 1.805,4 mds de DA, en 2016, contre 2.273,5 mds de DA en 2015, alors que le Fonds de Régulation des recettes (FRR), le bas de laine algérien, a fondu, ayant atteint, fin 2016 son seuil légal de 740 mds de DA et donc supprimé par la loi de Finances 2017. Par ailleurs, du fait des très faibles exportations hors hydrocarbures, soit 1,9 md de dollars contre 1,49 md de dollars en 2015, la balance des paiements reste dangereusement, déficitaire à 26,03 mds de dollars en 2016 contre 27,54 mds de dollars en 2015 et seulement 5,88 mds de dollars en 2014, selon M. Loukal. Par ailleurs, les autres indicateurs macroéconomiques restent, plus ou moins, stables, avec une certaine soutenabilité des pressions monétaires. La dépense publique est restée quasi-stable en 2016, par rapport à son niveau de 2015, à 7.303,8 mds de DA (contre 7.656,3 mds de DA en 2015), alors que le matelas de réserves de change est maintenu à un niveau confortable soit à plus de 100 milliards de dollars. « La situation financière externe du pays demeure tout de même solide et relativement confortable », commente M. Loukal, qui a précisé que les réserves de changes étaient à 114,14 mds de dollars, à fin 2016 contre 144,13 mds de dollars à fin 2015 et 178,94 mds de dollars en 2014. Soit une perte de 60 milliards de dollars en 2 ans. D'autre part, le dinar a retrouvé un peu de vigueur, en 2016, et a atteint le taux de parité de 116,4 DA/euro, en janvier 2016, et continue dans la même tendance, durant le 1er trimestre de 2017, selon le gouverneur de la Banque d'Algérie, qui a rappelé que l'endettement externe reste faible, soit 2,45% du PIB à 3,85 mds de dollars, à fin 2016. Le rapport du gouverneur de la Banque centrale a, également, rappelé le retour des tendances inflationnistes de l'Economie algérienne, ces dernières années, avec une inflation moyenne de 6,4 fin 2016 contre 4,8% en 2015.Selon lui, ce retour en force des tendances inflationnistes est le résultat de « situations dominantes, dans certains marchés », et cela n'est pas le résultat « d'une expansion de la masse monétaire ou bien d'une hausse des prix à l'importation ». Et puis, il y a le phénomène dangereux de l'endettement du Trésor vis-à-vis des banques, entre 2015 et 2016. « L'Etat est, en effet, passé d'un créancier net des banques avec 1.992 mds de DA à un débiteur net avec une dette de 2,73 mds de DA, envers les banques », indique le rapport de la BA. Selon M. Loukal, cette situation est le résultat de 3 actions simultanées: recours soutenu au FRR (3.688 mds de DA entre 2014 et 2016), rachat en 2015 et 2016 des créances bancaires, non performantes dues sur des entreprises publiques par le Trésor public (767,1 mds de DA) à travers l'émission d'obligations, et la hausse des crédits bancaires au profit de l'Etat après la souscription des banques à l'Emprunt obligataire, pour la croissance, avec un montant de 158,9 mds de DA. Sur le marché monétaire, enfin, les liquidités bancaires ont chuté à 821 mds de DA à fin 2016 contre 1.833 mds de DA, à fin 2015 et 2.731 mds de DA, à fin 2014, une baisse qui a relativement relancé le marché interbancaire, figé jusque-là. Enfin les crédits à l'Economie ont baissé à 15,28%, en 2016 contre une croissance de 16,57% en 2015.