En prenant les devants à la veille du ramadan, période d'explosion des taux d'audimat et de diversité des grilles spéciales des programmes, l'Autorité de régulation de audiovisuel (ARAV) veut corriger le prisme des chaînes TV algériennes en usant de moyens pédagogiques, avant d'être amenée de recourir à d'autres mesures pas très loin de la censure. Dans ce sens, l'Autorité que préside Zouaoui Benhamadi a rendu public jeudi dernier un communiqué à travers lequel elle prône l'autocensure déontologique, objective et constructive, incitant l'ensemble de ses partenaires du champ audiovisuel à «souscrire volontairement à une forme d'autorégulation éthique et esthétique, en élaborant des programmes spéciaux qui soient pendant la période du ramadhan un espace d'éveil à la fois spirituel et rationnel, conciliant authenticité et modernité». Bien sûr, le principal conseil s'oriente vers les émissions de «caméra cachée», qui virent au cauchemar, avec des scènes de prise d'otage par des terroristes, d'autres séquences tirées tout droit de films d'horreur, de violence et de tortures psychologiques, et qu'il faudrait songer à humaniser et leur rendre leur caractère humoristique, pur et simple, sans chercher à faire dans le sensationnel afin de faire monter l'audimat. «Des émissions, comme par exemple celles de caméra cachée, doivent faire l'objet d'un examen attentif », a relevé l'ARAV, faisant observer qu' «il arrive souvent que ce genre d'émissions livre, sous couvert de divertissement, des séquences dont la brutalité et la vulgarité sont une insulte à la dignité humaine». Non sans lancer en guise d'avertissement que l'ARAV a déjà reçu de la part de citoyens des «plaintes contre certaines chaînes qui les ont filmés à leur insu dans une situation plus dévalorisante qu'humoristique», appelant par cette occasion «ces chaînes, qui se reconnaîtront, à respecter le droit à l'image de chaque individu». L'ARAV a ainsi invité les chaînes de télévision algériennes au respect des «principes d'intérêt général» afin d'éviter les «dérives» constatées les années précédentes, tout en élaborant pour le ramadhan des programmes spéciaux «qui soient un espace d'éveil à la fois spirituel et rationnel, conciliant authenticité et modernité». Sans viser une chaîne ou une autre d'une manière nominative, l'ARAV souhaite saisir cette opportunité «à l'approche du mois de ramadhan, pour faire valoir auprès des chaînes de télévision des principes d'intérêt général, afin d'éviter les dérives constatées les années précédentes», est-il encore souligné dans le communiqué. «Le mois de ramadhan doit nous offrir une nouvelle opportunité pour nous réapproprier, et ce de manière ferme, notre tradition religieuse immémoriale, menacée par les assauts de la mondialisation et de ses nouvelles formes d'hégémonie médiatique». «Durant ce mois sacré, la spiritualité devrait prévaloir sur toute autre considération, notamment en veillant au dosage et à la programmation de certaines publicités qui poussent à une surconsommation préjudiciable à la santé, qui proposent des produits inappropriés au moment de la rupture du jeûne, sans oublier la publicité mensongère», déplore l'Autorité. Les plus gros budgets de pub sont réservés au ramadan, et l'on assiste à l'occasion du mois sacré à un matraquage sans répit des marques qui vantent leurs bienfaits, d'où la préoccupation de voir passer tout et n'importe quoi. «Ces principes expriment la volonté de l'ARAV d'apporter sa contribution à une amélioration des programmes, spécialement durant la période du ramadhan qui mérite un traitement à la mesure des valeurs partagées par tout un peuple spirituellement uni et solidaire », précise le communiqué de l'ARAV. Sera-t-il possible de rehausser la production audiovisuelle en ce mois de ramadan 2017, ou aurons-nous droit à un remake de l'année précédente, à celui qui choquera le plus le téléspectateur ? Enfin, faut-il le souligner, il n'y a pas que du mauvais dans le programme spécial ramadhan 2016, certaines séries méritent toujours leurs places sur le petit écran. Pour le moment, tout le monde garde un jaloux secret sur les grilles spéciales ramadhan, faisant que cette mise en garde «pédagogique» de l'ARAV tombe justement à pic. Une dernière révision pourrait s'avérer salutaire.