Devant les sénateurs auxquels il présentait le plan d'action de son gouvernement, le Premier ministre Abdelmadjid Tebboune s'est déclaré conscient qu'il y a nécessité de réaliser un large consensus sur les questions nationales d'importance pour atteindre les objectifs tracés dans cette feuille de route. Pour cela, Tebboune a assuré que le gouvernement qu'il dirige s'emploiera à «ouvrir les canaux du dialogue et de concertation avec toutes les composantes du paysage politique, syndical, académique et associatif pour expliquer les objectifs de l'exécutif, renforcer la confiance et susciter l'adhésion de diverses catégories de la société». Il est à saluer que la déclaration d'intention exprimée par le nouveau Premier ministre indique que les autorités du pays ont enfin conscience que la crise à laquelle est confrontée l'Algérie ne peut être surmontée sans que les Algériens accordent leur adhésion aux mesures prises par elles. Elle sous-entend néanmoins que ces autorités sont dans la crainte que le traitement qu'elles veulent appliquer à la crise risque de provoquer une contestation qu'elles ne pourront contenir par l'achat de la paix sociale comme cela leur a été possible tant qu'elles ont eu à disposition à cet effet d'une manne financière. Ce dont elles cherchent à se prémunir en tentant de relancer l'idée de forger un consensus national. La question est de savoir si la démarche qu'entendent entreprendre dans ce sens Abdelmadjid Tebboune et son gouvernement va être agréée par les acteurs et forces politiques et sociales auxquels ils vont la proposer. Ces derniers sont en majorité acquis à la nécessité pour l'Algérie de se forger un consensus national rempart aux menaces qui la guettent dans la conjoncture d'une crise économique et financière, mais aussi politique et sécuritaire. Ils ne sont pas pour autant résolus à se contenter de jouer les « faire-valoir » à une opération uniquement destinée à procurer aux autorités l'argument de la justesse de ce qu'elles ont décidé d'entreprendre pour faire face aux défis devant lesquels le pays est placé. C'est pourtant ce que le pouvoir a tenté d'obtenir d'eux dans toutes les séquences où il a été question d'aller au consensus national. Tebboune ne semble pas déterminé à ouvrir un dialogue avec eux susceptible de dégager un véritable consensus national. Son ouverture en direction des forces politiques et acteurs sociaux aurait été crédible à leurs yeux si elle avait été faite sur la base d'une concertation préalable avec eux sur le plan d'action de son gouvernement. Or Tebboune a présenté un plan « ficelé » établi sur la certitude que seule la médication à la crise pour laquelle son gouvernement a opté serait celle qui convient à l'état du pays. Cette méthode qu'ont suivie les précédents exécutifs gouvernementaux n'a fait que dévoiler leur incapacité à appréhender toute la gravité de la crise nationale et la nécessité primordiale de lui en administrer une autre découlant d'un véritable consensus national sur ses prescriptions. Pour qu'il en soit ainsi et possible, il est indispensable que soient prises en compte les revendications et propositions avancées hors pouvoir sur quoi baser un éventuel consensus. Faute de cette assurance l'ouverture envisagée par Tebboune restera un effet d'annonce destiné à installer l'illusion que les autorités du pays savent ce qu'elles font et sont en capacité de sortir l'Algérie de sa dangereuse situation.