Les neuf pays détenteurs de l'arme nucléaire rejettent à ce jour le traité d'abolition de ces armes de destruction massive, traité défendu par l'ICAN, récipiendaire du prix Nobel pour cette année. Le prix Nobel de la paix est, donc, un acte éminemment politique. Son attribution, vendredi dernier, à l'ICAN, ce consortium international d'ONG qui rassemble, aujourd'hui, quelque 468 ONG, de 101 pays, agissant pour l'abolition progressive des armes nucléaires, exprime les réels risques qui pèsent sur la survie de notre monde, en ces temps de violences multiples et de guerres menées, d'abord par les plus forts dans (et contre) des pays « pivot » du jeu géostratégique mondial sous bien de prétextes nobles tels ceux des droits de l'Homme, de la démocratie et de la liberté. Un bref examen de l'atlas du monde renseigne, sans concession, sur qui paie en vies humaines et misères sociales, cette course folle à la domination et au leadership, dans notre monde. Un autre bref examen des pays signataires du Traité d'abolition des armes nucléaires révèle, à son tour, sur les intentions des uns et des autres, sur l'idée de paix et de justice: aucun des neuf pays détenteurs de l'arme nucléaire que sont les USA, la Russie, la France, la Grande-Bretagne, la Chine, l'Inde, le Pakistan, la Corée du Nord et Israël n'a encore signé ce traité international. Dans ce cas, à quoi sert ce traité et aussi pourquoi le Comité du prix Nobel distingue-t-il, cette année, l'ICAN puisque les détenteurs de l'arme de destruction massive le rejettent? Faut-il désespérer d'un monde débarrassé de la menace permanente d'un cataclysme qui l'emportera? C'est tout le défi, justement, auquel est appelé le monde, y compris les pays détenteurs de l'arme nucléaire, à relever, en ce début de siècle. C'est toute la symbolique de la distinction de vendredi dernier à Oslo. C'est que notre époque est entrée dans une spirale de violences et de guerres qui, sans une réaction dynamique de la Communauté internationale, nous mène droit vers l'apocalypse. L'actualité nous le rappelle, implacablement: tensions et appels aux armes entre les USA et la Corée du Nord, remise en question de l'Accord international sur le nucléaire iranien, alerte de la Russie, guerres en Syrie, au Yémen, dépeçage de la Palestine par Israël, gangrène du terrorisme international, réveil des nationalismes identitaires jusqu'en Europe (hier la Catalogne espagnole), tragédies des migrants de la violence et de la misère, désastres écologiques... Comment, alors, attendre un avenir quiet et heureux avec autant de plaies? Les menaces pour la survie de l'Humanité ne manquent pas et le déclencheur d'un cataclysme mondial est entre les mains des neuf puissances nucléaires, notamment les USA. Faut-il signaler que les USA ont envoyé l'année dernière plus de 30.000 hommes en Europe, aux frontières russes et installé leur « bouclier antimissiles » en Pologne et Tchéquie? Du coup, la Russie a renforcé sa présence militaire y compris en missiles nucléaires intercontinentaux, juste en face, aux frontières des Baltes. Faut-il rappeler l'enjeu géostratégique entre Occidentaux et Russes, non encore résolu en Syrie, en Ukraine, en Géorgie et dans tout le Moyen-Orient? L'appel d'Oslo, via la distinction de l'ICAN, au désarmement nucléaire jusqu'à l'abolition sur le moyen et long terme est un appel à toute l'Humanité. Désespérant des gouvernements des nations pour un engagement ferme pour la sécurité du monde, le Comité du Nobel en appelle aux sociétés civiles, aux ONG, aux peuples pour une mobilisation continue contre les armes de destructions massives. Faut-il croire que les peuples et les sociétés civiles puissent inverser la folie de gouvernements nantis et leur désir mortifère de mener le monde vers sa propre destruction? C'est qu'il n'y pas d'autres choix ou alternatives que la mobilisation citoyenne pour éviter le pire qui se fait de plus en plus, menaçant sur le fragile équilibre mondial. Si par le passé, il y eut, à juste titre, des critiques sur les distinctions du prix Nobel de la Paix tel celui attribué à Barak Obama avant même le début de son exercice de chef d'Etat, celui attribué, vendredi à l'ICAN ne peut, en effet, souffrir de quelque ambiguïté que ce soit, tant il prône l'action pour la sécurité de tous en ce monde. D'ailleurs dans l'histoire du prix Nobel de la Paix (depuis 1901), même des dictateurs se sont crus, ô combe de l'infamie et du ridicule éligibles avant de désillusionne: Mussolini, Staline et plus osé et insultant, Hitler.