La présidente du Parti des travailleurs Louisa Hanoune a dénoncé hier mardi avec une rare virulence les partisans de l'application de l'article 102 de la Constitution, comme ceux qui ont lancé un appel au peuple à sortir dans la rue. Elle a expliqué dans une intervention à la radio nationale qu'au sein du PT, «nous sommes contre, car (l'armée) doit se réserver exclusivement à l'exercice de ses missions, donc protéger l'intégrité du pays, ses frontières, etc.». Et même «le ministre de la Défense doit être un civil», a-t-elle ajouté, avant de souligner que «ceux qui appellent l'armée à intervenir sont ceux qui veulent être propulsés sur le dos des chars. Et ceux qui appellent à l'intervention étrangère n'ont aucune dimension politique nationale, car ils n'ont aucune chance d'être élus». Et, «à ce moment, ils appellent l'armée, et cela peut provoquer l'irrémédiable. Nous sommes contre». Louisa Hanoune estime par ailleurs que «ceux qui appellent la population à sortir dans la rue, c'est exactement la même chose». «Très souvent, ce sont des personnes qui ont été dans le pouvoir, et quand ils sont éjectés, ils deviennent des opposants d'une extrême violence», avant de relativiser : «mais pas tous, il y a ceux qui ont gardé la boussole». Pour elle, «quand on n'est pas un dirigeant politique, qu'on n'est pas capable d'encadrer, quand on n'est pas capable de mettre des garde-fous, et qu'on appelle les gens à sortir dans la rue, cela veut dire qu'on peut préparer le terrain au chaos». «C'est le printemps arabe en quelque sorte, tardif, mais un printemps arabe quand même», précise-t-elle. Elle poursuit : «Quand j'entends des personnalités appeler les gens à sortir dans la rue, comme ça, ou l'application de l'article 102 de la Constitution, cela soulève moult interrogations». «Mais, ajoute-t-elle, si le peuple veut révoquer ses élus à tous les échelons, ( ) il faut que ce soit sur le terrain de la démocratie, sinon, cela devient un putsch en fait». «Nous sommes à quelques années des élections, c'est étrange comme démarche et en même temps on appelle les partis de l'opposition à se réunir. De quel droit ? Nous sommes souverains, nous ne permettons à personne de nous dicter quoi que ce soit, ni dans les institutions ou à l'extérieur», poursuit la présidente du PT. «Personne, souligne-t-elle, ne peut appuyer sur un bouton et dire demain il y aura une révolution en Algérie». Le PT milite, par ailleurs, «pour une assemblée constituante», a-t-elle annoncé en abordant les prochaines élections locales. «Nous allons vers des élections de guerre contre le multipartisme et contre la démocratie politique, c'est extrêmement dangereux, et le système en place n'est plus capable de s'auto-réformer». Le PT a décidé de participer à ces élections locales du 23 novembre car «on ne peut rester les bras croisés alors que le pays traverse une conjoncture dangereuse de par la conjugaison de facteurs sociopolitiques et économique». Les élections sont «un instrument de la démocratie, et on doit défendre tous les segments de démocratie qui restent, car nous ne sommes pas sur l'orientation du suicide, mais sur celle de la résistance et de la mobilisation pour aider à la clarification politique. C'est un moyen de combattre la décomposition politique dans notre pays». Le PT va engager 500 listes pour les élections communales et 38 listes pour le renouvellement des assemblées de wilaya. Pour la présidente du PT, il y a cependant depuis 2012, «une régression du rôle des APC à cause de la décomposition politique avec un mélange effrayant entre l'argent et les institutions. C'est devenu un moyen d'enrichissement». «Nous allons (à ces élections) pour combattre les dérives, combattre la prédation et la corruption. Notre bataille nationale est aussi déclinée au niveau des mairies et des wilayas, comme aux assemblées nationales», a expliqué la présidente du PT. La liste des candidates du PT à ces élections locales compte 35% de femmes, a-t-elle indiqué. Par ailleurs, la campagne électorale du parti portera sur «une clarification de la politique d'austérité, ses impacts mortels sur les communes, la perte de 50% de la TAP, alors que la majorité des APC puisent dans cette TAP pour la moitié de leurs budgets. Et cette politique d'austérité est maintenue, même si le budget d'équipement a été en hausse», a-t-elle dit. Par ailleurs, elle estime que ces élections locales seront marquées par un fort taux d'abstention. «Nous n'allons pas faire pression sur les consciences, nous n'avons aucun moyen pour assurer la transparence du scrutin, nous n'avons aucun moyen entre nos mains. S'il y a abstention, la responsabilité incombera au gouvernement, à ceux qui ont les moyens de décider, de modifier le cadre politique et réglementaire de ce scrutin». Elle prédit alors «qu'il y aura un taux d'abstention plus important que les législatives». Selon elle, «ce ne sont plus les compétences qui guident l'action politique, mais c'est l'argent. Et donc, comment voulez-vous que les citoyens renouent avec la confiance et l'acte de voter. Je doute fort qu'il y ait un taux de participation comme par le passé, car pour les locales il y avait toujours un taux de participation important». Estimant qu'il faut «réviser la loi électorale», Louisa Hanoune relève que «ce ne sont pas toujours les partis politiques qui sont à l'origine de ce taux d'abstention, ce sont les institutions, qui élaborent le cadre juridique et réglementaire, qui en sont responsables». Louisa Hanoune, qui a déclaré que «la République est en danger», a également rappelé que «nous avons toujours appelé à la révision du code communal et la majorité actuelle a été fabriquée et ne représente pas la volonté populaire». Enfin, le PT, selon sa présidente, «se dressera contre toute action qui menace la stabilité du pays, de son intégrité, l'ingérence étrangère. Le PT se dressera et sera prêt a faire unité avec tous les partis qui le désirent, qu'ils soient au gouvernement ou en dehors, et la souveraineté du pays ne peut être séparée de la transparence».