Les dernières mises en garde du ministre du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale donnant un ultimatum aux organisations syndicales jusqu'au 31 mars, pour prouver leur représentativité, ont été perçues, par certains syndicats autonomes, comme « une menace sur la pluralité syndicale ». M. Zoubir Rouina, membre du Conseil des lycées d'Algérie (CLA) a affirmé dans ce sens « que pour pouvoir négocier avec l'administration, la loi exige la représentation de 20 % du nombre de travailleurs si on se réfère aux déclarations récentes du ministre du Travail, Mourad Zemali », dit-il. Une condition contraignante et restrictive qui n'est pas en faveur de la pluralité syndicale, notamment pour le secteur de l'éducation, précise-t-il. Et d'expliquer que le secteur de l'éducation compte déjà 12 syndicats « si on s'amuse à faire des calculs, l'on constate que si chaque syndicat compte 20 % de représentativité sur l'ensemble des travailleurs, le secteur de l'éducation ne pourra avoir que cinq organisations syndicales». Autrement dit, sept syndicats seront mis hors-jeu par le ministère du travail. « Ils seront carrément exclus des négociations ». Pourtant, affirme M.Rouina, la pluralité syndicale témoigne de la bonne santé de la classe sociale et est un bon indicateur pour la démocratie. Et d'ajouter que la pluralité syndicale permet l'encadrement des mouvements de protestation pacifique et organisé. « C'est la soupape de sécurité», explique-t-il. Notre interlocuteur regrette qu'au lieu de résoudre les problèmes en suspens depuis des années et au lieu d'œuvrer pour la stabilité du front social, «ce ministère est venu pour casser le thermomètre au lieu de traiter la fièvre». M. Rouina rappelle que le CLA avait agi en tant que collectif des enseignants des lycées, et ce, pendant des années, sans agrément. « On avait déclenché et participé à des mouvements de grève, on a été convié à des négociations autour des revendications socio-professionnelles. La pluralité syndicale est une valeur ajoutée au gouvernement, à la société et au monde du travail». Pour sa part, le président de la confédération générale autonome des travailleurs en Algérie, M. Rachid Malaoui a affirmé que ces critères de représentativité et le dépôt du dossier chaque année, avant le 31 mars, n'est pas une chose nouvelle, elle existe depuis longtemps dans la réglementation. Mais pour M. Malaoui, la loi stipule que seuls les syndicats ayant 20 % de représentativité sont concernés par les négociations, mais sans que cela touche au droit à la grève. Autrement dit, n'importe quel syndicat même s'il n'atteint pas les 20 % de représentativité peut appeler à un débrayage pour protester contre les mauvaises conditions de travail ou réclamer un droit, dit-il. Pour M.Maloui, le problème n'est pas relatif à la représentativité d'un syndicat ou un autre. Il est beaucoup plus profond : « L'administration ne veut plus négocier avec les syndicats autonomes, elle préfère négocier exclusivement avec l'UGTA ». Et de préciser que si on veut des syndicats crédibles et représentatifs, il faut faire des élections auprès de l'ensemble des travailleurs, et laisser ces derniers voter ou choisir en toute liberté le syndicat qui répond à leur aspiration. Le syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP), a indiqué sur sa page Facebook que ces « mises en garde sont carrément une guerre déclarée à la pluralité syndicale en Algérie». Le syndicat, par la voix de son président Lyes Merabet, a énergiquement dénoncé la décision du ministère du Travail d'imposer de nouvelles règles pour jauger la représentativité de chaque organisation syndicale.