Le président de cette coordination, regroupant les principaux syndicats autonomes, menace de “conséquences sociales graves” si les pouvoirs publics continuent leur politique de verrouillage de l'espace syndical. Les syndicats autonomes montent au créneau. À la veille de la tenue de leur meeting populaire prévu demain à Alger, leurs animateurs mettent en garde les pouvoirs publics contre le verrouillage de l'espace de l'expression syndicale et de la remise en cause du droit de grève. “Il y a un recours abusif à la justice lorsque les syndicats autonomes déclenchent une grève”, dira d'emblée Tahar Besbes, le président du Comité national des libertés syndicales (Cnls), dans une conférence de presse animée au siège du Syndicat national des praticiens de la santé publique (Snpsp) à Alger. En présence de Redouane Osmane de la Coordination des lycées d'Alger (CLA), du Dr Khendek, du Snpsp, de M. Kassimi du Conseil national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Cnapest), de M. Bentahi du Syndicat autonome des travailleurs de l'éducation et de la formation (Satef), le président du Cnls expliquera que les pouvoirs publics ont tendance à “introduire simultanément au dépôt du préavis de grève, des actions en référé d'heure à heure pour contrarier la grève et faire discréditer par là même la justice en l'instrumentalisant”. Critiquant le Conseil de gouvernement d'octobre dernier qui a décidé de la suspension de la grève des médecins spécialistes de la santé publique et de leurs sanctions, Tahar Besbes regrettera que le “Conseil de gouvernement se soit rabaissé à un conseil de discipline”. Son argument est que “la grève est déclenchée par une assemblée générale des travailleurs et arrêtée lorsqu'il y a satisfaction des revendications intervenant à l'issue d'un dialogue et d'une concertation entre les syndicats et la tutelle”. “La loi, dit-il, autorise les grèves sans dire qu'elles soient limitées ou non”. Le gouvernement a bel et bien “violé les lois de la République : la Constitution et les lois 90-02 et 90-14 relatives à la législation du travail”, relance-t-il. Dès lors, Besbes fait un constat sans appel sur la situation des libertés syndicales : “L'espace syndical se rétrécit chaque jour telle une peau de chagrin.” “Quoi qu'il en soit, la matraque ne va pas nous soumettre”, martèle-t-il fermement. Intervenant dans le débat, M. Kassimi du Cnapest dénonce le reproche fait par les pouvoirs publics aux syndicats autonomes selon lequel ils feraient de “la politique”. “Si nous faisons une grève illimitée, c'est que les lois de la République le permettent”, indique le responsable du Cnapest. “En assimilant notre démarche à la grève illimitée du FIS, ils n'ont d'autres objectifs que de nous complexer par rapport à nos revendications socioprofessionnelles et nous faire renoncer à notre mouvement”, explique-t-il. Le Dr Besbes, de son côté, est on ne plus clair : “S'il y a grève, c'est qu'il y a malaise. Nous ne faisons pas grève de gaieté de cœur. Nous ne faisons grève que lorsque les pouvoirs publics ne respectent pas leurs engagements et les protocoles d'accord contractés avec les syndicats.” “Nous sommes des syndicalistes et notre rôle est uniquement de défendre les intérêts socioprofessionnels des travailleurs”, reprend le président du Cnls, tout en précisant : “Nous ne sommes pas intéressés par la prise de pouvoir, c'est l'apanage des partis politiques.” Abondant dans le même sens, le représentant du Satef dénonce la volonté des pouvoirs publics de “casser tous les organes conventionnels de médiation et tout mouvement de contestation pacifique”. De l'avis de Bentahi, “on peut assister à un remake d'octobre 1988 si les pouvoirs publics restent sourds aux revendications des syndicats”. Redouane Osmane du CLA n'est pas en reste sur les obstacles que doit affronter un syndicat pour travailler : “Les pouvoirs publics ne nous donnent pas de locaux, ni d' autorisations et nous attaquent systématiquement en justice refusant en plus tous les processus de médiation et de concertation prévus par la loi”. Selon lui, cette démarche ne signifie ni plus ni moins que “l'Etat est partisan”. Le Dr Khendek du Snpsp s'indignera quant à lui de la propension des autorités à “ne traiter qu'avec l'UGTA”. “Nous sommes l'expression d'une pluralité syndicale et les pouvoirs publics devront négocier avec les syndicats autonomes représentatifs des travailleurs”, explique Khendek. Par ailleurs, le meeting du Cnls initialement prévu dans un lieu public, aura finalement lieu au siège du Cnes à Alger pour cause de non-délivrance d'une autorisation du ministère de l'Intérieur. “Cela fait trois semaines que nous avons déposé notre demande d'autorisation et à 48 heures du meeting, nous n'avons pas reçu de réponse”, affirme Osmane. “Ce meeting aura à mettre en garde le pouvoir contre les menaces qui pèsent sur les libertés syndicales”, dit-il. N. M.