La chancelière allemande, Angela Merkel, sera à Alger ce lundi, et pour une journée, à l'invitation du président de la République, Abdelaziz Bouteflika. Une visite attendue après celle annulée en février 2017 à cause d'ennuis de santé du chef de l'Etat. A l'occasion de cette visite, sa deuxième en Algérie après celle de 2008, Merkel sera reçue par Bouteflika et s'entretiendra avec le Premier ministre, Ahmed Ouyahia. Selon le programme protocolaire, elle animera une conférence de presse conjointe avec Ouyahia où seront évoquées, notamment, diverses questions liées aux relations bilatérales ainsi que les questions d'intérêt commun. Au menu de cette escale, l'évaluation des relations économiques entre les deux pays et le renforcement des axes de partenariat. Plusieurs secteurs d'activité intéressent les Allemands dont les filières industrielles, particulièrement l'industrie mécanique, la sous-traitance automobile, les énergies renouvelables, la chimie et l'industrie pharmaceutique. Dans la filière mécanique, les deux pays sont déjà liés par des partenariats tels ceux de la production en Algérie de véhicules de la marque Mercedes-Benz entre le groupe allemand Daimler (société mère de Mercedes-Benz), la Société nationale de véhicules industriels (SNVI), le ministère de la Défense nationale (MDN) et le groupe émirati Aabar. Au total, plus de 200 entreprises allemandes, activant dans différents secteurs, sont implantées actuellement en Algérie et l'Allemagne a été classée 4e fournisseur de l'Algérie en 2017 avec 3,2 milliards de dollars. Mais au-delà de l'aspect économique de cette rencontre, c'est autour du dossier de l'immigration que gravite l'intérêt premier de Merkel. Mise en difficulté dans son propre gouvernement, la question migratoire fragilise la chancelière allemande et Berlin cherche à passer à la vitesse supérieure concernant les renvois de demandeurs d'asile originaires d'Algérie, du Maroc et de la Tunisie en les inscrivant, avec la Géorgie, dans la liste des «pays sûrs». La démarche n'étant pas nouvelle, puisqu'elle a déjà été proposée et rejetée, l'an dernier, revient à la faveur d'une loi adoptée en Conseil des ministres du gouvernement allemand. En inscrivant les trois capitales maghrébines sur cette liste, Merkel voulait une caution politique et surtout humanitaire pour renvoyer ces contingents de harraga chez eux sans même avoir à motiver le refus d'accorder l'asile. Pourtant, la chambre haute du Parlement allemand a rejeté le projet de loi visant à débouter plus facilement les demandeurs d'asile maghrébins. Adoptée l'an dernier par les députés de la chambre basse, le Bundestag, cette décision est perçue comme un revers pour la chancelière Angela Merkel, en difficulté sur ce dossier. Le gouvernement cherche à inscrire ces pays sur cette liste comme c'est déjà le cas pour les pays des Balkans non membres de l'Union européenne, ce qui permettrait aux services de l'immigration de rejeter de façon quasi automatique les demandes d'asile de leurs ressortissants, sans même avoir à motiver ces refus. Berlin justifie cette décision par le fait que les demandes d'asile en provenance de ces pays sont déjà quasiment toutes rejetées à plus de 99% pour la Géorgie et l'Algérie. Seuls 2,7% des demandes d'asile de Tunisiens et 4,1% des requêtes de Marocains ont reçu une réponse positive des autorités allemandes en 2017. Concernant l'Algérie, le sujet des sans-papiers algériens présents en Allemagne a été l'un des dossiers brûlants entre les deux pays, discuté au plus haut niveau de responsabilité. Le cas a été notamment abordé lors de la visite, en janvier 2016, du Premier ministre de l'époque en Allemagne où la chancelière Merkel, durement confrontée aux événements de la Saint-Sylvestre de Cologne, avait clairement demandé à Sellal de s'occuper sérieusement des harraga algériens en Allemagne. Steffen Seibert, porte-parole de la chancellerie, était revenu sur cette question indiquant qu'il existe «un accord de rapatriement» mais que «dans la pratique, il reste des cas problématiques», rappelant les discussions bilatérales avec l'Algérie qui doit étudier quelque 2.300 dossiers, puisque Sellal a fait savoir qu'avant tout renvoi en Algérie, «il faut naturellement s'assurer qu'il s'agit bien d'Algériens». En mai de la même année, l'ancien DGSN, Abdelghani Hamel, avait confirmé la coopération de son institution avec son homologue allemande. «La police algérienne est disposée à coopérer avec la police allemande afin de trouver une solution au problème des Algériens installés clandestinement en Allemagne», avait-il indiqué, à l'issue de l'audience accordée au directeur général de la police fédérale allemande, Dieter Romann, précisant la nature «technique» de cette solution. Il a évoqué la «réadmission» des clandestins algériens établis en Allemagne, rappelant les accords en vigueur «à respecter». La chancelière allemande avait plaidé l'accélération du renvoi vers leur pays des ressortissants algériens déboutés du droit d'asile en Allemagne, mais le problème qui se pose est de les détecter. Une fois arrivés en Allemagne par les filières turques et grecques, les Algériens se débarrassent de leurs papiers essayant de se faire passer pour des Syriens ou des Irakiens pour bénéficier du droit d'asile. La question qui se pose alors est de savoir si au cours de ce déplacement de lundi, Merkel aura les mêmes résultats que lors de sa visite en Tunisie en mars 2017 ? La chancelière allemande avait obtenu un accord rendant plus facile et rapide l'expulsion de quelque 1.500 Tunisiens, en situation irrégulière en Allemagne. La Tunisie s'est engagée à identifier dans «les trente jours» ses ressortissants en situation irrégulière et à leur délivrer en une semaine les documents de voyage nécessaires à leur rapatriement.