Alors que le dossier de l'immigration devient un enjeu politique qui fragilise la Chancelière allemande, Berlin veut passer à la vitesse supérieure, concernant les renvois de demandeurs d'asile originaires d'Algérie, du Maroc et de la Tunisie, en les inscrivant, avec la Géorgie, dans la liste des «pays sûrs». La démarche n'est pas nouvelle, puisqu'elle a déjà été proposée et rejetée, l'an dernier, et revient à la faveur d'une loi adoptée, hier, au Conseil des ministres du gouvernement allemand. Rappelons que pour mettre le droit de son côté, Berlin avait placé l'Algérie, tout comme ses deux voisins, le Maroc et la Tunisie, sur la liste des pays «sûrs». En inscrivant les trois capitales maghrébines sur cette liste, Merkel voulait une caution politique et surtout humanitaire pour renvoyer ces contingents de harraga' chez eux, sans même avoir à motiver le refus d'accorder l'asile. Pourtant, la Chambre haute du Parlement allemand a rejeté le projet de loi, visant à débouter, plus facilement, les demandeurs d'asile algériens, marocains et tunisiens. Adopté, l'an dernier, par les députés de la Chambre basse, le Bundestag, cette décision est perçue comme un revers pour la Chancelière Angela Merkel, en difficulté sur ce dossier. L'opposition du Bundesrat était prévisible, dans la mesure où les Verts' et la gauche radicale, Die Linke', avaient déjà signifié leur veto, à ce texte controversé. Le gouvernement cherche à inscrire ces pays sur cette liste comme c'est déjà le cas pour les pays des Balkans, non membres de l'Union européenne, ce qui permettrait aux services de l'immigration de rejeter de façon quasi-automatique les demandes d'asile de leurs ressortissants, sans même avoir à motiver ces refus. Berlin justifie cette décision, par le fait que les demandes d'asile, en provenance de ces pays sont déjà quasiment toutes rejetées, à plus de 99% pour la Géorgie et l'Algérie. Seuls 2,7% des demandes d'asile de Tunisiens et 4,1% des requêtes de Marocains, ont reçu une réponse positive des autorités allemandes, en 2017. Pourtant, les Associations de défense des droits de l'Homme s'opposent à cette action, en raison notamment, des discriminations visant les homosexuels, les atteintes à la liberté d'expression et les cas de torture qui y sont recensés. Concernant l'Algérie, le sujet des sans-papiers algériens, présents en Allemagne, a été l'un des dossiers brûlants entre les deux pays, discuté au plus haut niveau de responsabilité. Le cas a été, notamment, abordé lors de la visite, en janvier 2016, du Premier ministre de l'époque en Allemagne où la Chancelière Merkel, durement confrontée aux événements de la Saint Sylvestre de Cologne, avait clairement demandé à Sellal de s'occuper, sérieusement, des immigrés clandestins algériens, en Allemagne. Steffen Seibert, porte-parole de la Chancellerie, était revenu sur cette question indiquant qu'il existe «un accord de rapatriement» mais que «dans la pratique, il reste des cas problématiques», rappelant les discussions bilatérales avec l'Algérie qui doit étudier quelque 2.300 dossiers puisque Sellal, tout en condamnant les violences de Cologne, a fait savoir qu'avant tout renvoi en Algérie, «il faut naturellement s'assurer qu'il s'agit bien d'Algériens». En mai de la même année, l'ancien DGSN, Abdelghani Hamel, avait confirmé la coopération de son institution avec son homologue allemande. «La police algérienne est disposée à coopérer avec la police allemande afin de trouver une solution au problème des Algériens installés clandestinement en Allemagne», avait-il indiqué, à l'issue de l'audience accordée au directeur général de la police fédérale allemande, Dieter Romann, précisant la nature «technique» de cette solution. Il a évoqué la «réadmission» des clandestins algériens établis en Allemagne, rappelant les accords en vigueur «à respecter». La Chancelière allemande avait plaidé l'accélération du renvoi vers leur pays des ressortissants algériens déboutés du droit d'asile en Allemagne, mais le problème qui se pose est de les détecter. Une fois arrivés en Allemagne par les filières turques et grecques, les Algériens se débarrassent de leurs papiers essayant de se faire passer pour des Syriens ou des Irakiens pour bénéficier du droit d'asile.