Evidemment, la commission juridique de l'Assemblée nationale a constaté la vacance de la présidence de l'institution. Et donc que les heures de Saïd Bouhadja, du point de vue de ses opposants de la majorité parlementaire, quand ce ne sont pas les SG du FLN et du RND, qui sont à la manœuvre depuis le début de cette excommunication, sont comptées à la tête de la seconde chambre du Parlement. Evincé, démissionné, «dégagé» selon une interprétation douteuse du règlement de l'APN, Saïd Bouhadja aurait-il pris le parti de se taire, a-t-il abdiqué ? Pour le moment, il semblerait qu'il soit toujours dans la même posture, celle de la résistance, et que la déclaration de la vacance de la présidence de l'APN n'est qu'un simulacre politique de plus organisé par ses opposants pour accélérer son départ. Vu de l'extérieur, ce qui se passe au sein de l'APN donne une idée du délitement épouvantable et non moins condamnable des institutions de la République, devenues des terrains de jeux entre les partis politiques de la majorité présidentielle, beaucoup plus soucieux de dominer le Parlement que de gérer la vie publique et améliorer la vie de tous les jours de leurs électeurs. Faut-il s'étonner que le président de la commission juridique de l'APN soit celui qui fait partie de ceux, au sein du groupe parlementaire du FLN, qui ont encadré le mouvement appelant au départ de Bouhadja ? Peut-on être à ce point juge et partie dans un conflit majeur au sein de l'une des plus importantes institutions du Parlement ? Les enjeux de ce coup de force, de ce putsch ne sont pas encore clairs, même si les sénatoriales approchent. D'autant que la position du Premier ministre, Ahmed Ouyahia, qui a en tant que SG du RND appelé le président de l'APN à partir en des termes sibyllins au regard de sa position sur l'échiquier politique national, paraît suspecte. Si on met de côté les propos violents du secrétaire général du FLN appelant le président de l'Assemblée nationale à démissionner «dignement», que dire de ceux du SG du RND et Premier ministre lorsqu'il a, samedi dernier devant les militantes de son parti, en foulant lui aussi toutes les lois constitutionnelles et celles du Parlement, lancé que «mon souhait est que cette affaire se termine dans le calme et que le président de l'APN parte dignement» ? Il n'y a aucun doute en fait que le départ, devenu inéluctable, de Saïd Bouhadja du perchoir ouvrirait de nouvelles perspectives pour les prochaines sénatoriales, avec un jeu de chaises musicales déjà programmé. Toute la problématique, si toutefois le Conseil constitutionnel serait saisi, est de savoir si ce putsch contre le Parlement sera validé, sachant que la vacance de la présidence de l'APN a été «constatée» alors que son président a été empêché physiquement de se présenter à son bureau, et qu'ensuite soit organisé un simulacre de réunion de la commission juridique pour constater cette vacance. D'autant que la manœuvre s'est faite dans la plus parfaite illégalité, au regard de lois internes de l'APN, de la Constitution et des lois dont est dépositaire le Conseil constitutionnel. Cela paraît trop gros pour l'opinion publique qui s'est du reste détournée depuis longtemps de l'hémicycle, de ses intrigues et de ses faux jacobins, car le Parlement a mauvaise presse auprès des Algériens et reste boudé tant que les lois, qui ne sont pas votées démocratiquement, restent antipopulaires. Tant que les représentants du peuple se battent pour arracher plus de privilèges souvent «indus» que pour obliger le gouvernement à travailler dans le sens d'une plus grande transparence dans ses décisions impliquant l'avenir du pays.