Le prince héritier saoudien sera à partir d'aujourd'hui et pour deux jours à Alger pour une visite annoncée par Riyad à travers un communiqué du cabinet royal qui a indiqué que Mohammed Ben Salmane (MBS) se rendra, sur « instruction » de son père, le roi Salmane, dans « six pays arabes frères», parmi lesquels l'Algérie. «Le roi est soucieux de renforcer les relations du royaume aux niveaux régional et international et de poursuivre la coopération et les contacts avec les pays frères dans l'ensemble des domaines», précisait la même source. Après Abu Dhabi, Manama, Le Caire et Tunis, où il n'est resté que deux heures, MBS est attendu, aujourd'hui, à Alger où il devra rencontrer les hautes autorités du pays. En absence de communication officielle du gouvernement algérien, les observateurs ne sont appelés qu'à supputer sur cette visite. Même si les relations bilatérales ont connu, ces derniers mois, un léger mieux, on ne peut pas dire que c'est le grand amour entre Alger et Riyad du fait du passif relationnel entre les deux pays. La guerre au Yémen, le conflit en Syrie, la question sahraouie ou le dossier du Hezbollah libanais ne sont que quelques exemples des relations conflictuelles entre les deux capitales. L'absence de communication officielle sur cette visite donne également le sentiment qu'elle n'était déjà pas inscrite sur l'agenda des responsables algériens, mais qu'elle a été, quelque part, improvisée à la demande de Riyad, soucieuse de redorer l'image du prince héritier éclaboussée par l'affaire Khashoggi. Une visite marquée, malgré tout, par une vive polémique soulevée sur les réseaux sociaux, dénonçant l'arrivée de MBS et l'attaque franche de la porte-parole du Parti des travailleurs (PT), Louisa Hanoune, qui a fait part de sa grande indignation suite à cette annonce, allant jusqu'à la qualifier de « blague de mauvais goût » et de « grosse provocation ». Lors d'une conférence de presse animée au siège de son parti à El Harrach, elle avait dénoncé un régime barbare, « bourreau du peuple yéménite » et « protecteur des sionistes ». Hanoune l'accusant de saborder le consensus au sein de l'Opep sur la baisse de la production de pétrole sur l'instigation de Trump. Après l'annonce saoudienne de cette tournée, un communiqué du ministère algérien des Affaires étrangères avait pris fait et cause avec la version de la justice saoudienne qui dégageait toute responsabilité du prince héritier à propos du meurtre de Khashoggi tout en condamnant son assassinat. Pour la porte-parole du PT, ce document « n'engage que son auteur », refusant catégoriquement qu'il ne soit attribué à l'Etat et au peuple algérien. Alger sait qu'elle ne peut pas se permettre d'avoir Riyad constamment sur le dos et compte profiter de la brouille entre le Maroc et l'Arabie Saoudite pour se replacer sur l'échiquier régional. Elle a aussi intérêt à composer avec un régime qui développe un nouveau discours sur l'islamisme loin de la vision rigoriste des prédécesseurs du roi Salmane. Au plan économique, même si les relations bilatérales ne sont pas très importantes, Alger cherche à les développer et attirer des capitaux saoudiens. Le 9 juillet dernier, s'était d'ailleurs tenue à Riyad une journée de promotion des investissements en Algérie, organisée par l'Autorité générale de l'investissement saoudienne (Sagia) et l'Agence nationale de développement de l'investissement algérienne (ANDI). A l'occasion, l'Algérie et l'Arabie Saoudite avaient affiché l'ambition de porter le volume de leurs échanges et celui des investissements à près de 15 milliards de dollars au cours des dix prochaines années. Une ambition assortie d'une « volonté d'améliorer le climat des affaires de part et d'autre ». Pourtant, Alger cherche toujours à garder les équilibres régionaux, en sa qualité de partenaire incontournable, et la dernière visite « surprise » d'un haut dirigeant iranien, à quelques jours de la venue de MBS, en est une preuve supplémentaire.