Le report de la prochaine élection présidentielle devient de plus en plus une éventualité politique pour les partis d'opposition comme pour ceux de l'alliance présidentielle. Abderrezak Makri, président du MSP, préconise le report d'au moins une année de cette élection présidentielle prévue en avril prochain, et affirme que le président Bouteflika ne sera pas candidat. En clair, il n'y aura pas, selon lui, un 5e mandat, appuyé et soutenu jusque-là par les partis de l'alliance présidentielle (FLN, TAJ, RND et MPA). Makri affirme même, dans un entretien à TSA, que son appel au report de cette élection a trouvé un bon écho tant au sein de l'opposition qu'au sein des partis du pouvoir. Affirmatif, il souligne qu'«il n'y aura pas de cinquième mandat, pour des raisons évidentes de santé du président Bouteflika. Des gens au sein du pouvoir, certains parmi ceux qui appelaient au cinquième mandat, veulent le remplacer et c'est pourquoi ils souhaitent aller vers des élections sans réformes». Il souligne également que son parti a contacté «tous ceux que nous avons estimé qu'ils pourraient être utiles pour le succès de l'initiative, mais par respect pour eux et pour moi-même, je me refuse de les citer.» Il estime qu'un consensus politique est vital pour aller vers des réformes profondes, autant sur le plan politique qu'économique, car il faut, selon lui, qu'il y ait un changement radical de la nature du régime, dont les prérogatives actuellement «impériales» du chef de l'Etat. Makri préconise également la révision du code électoral, puis la concrétisation de l'indépendance de la justice, de la liberté d'expression et d'association. Mais, pour lui, il est urgent d'arriver à un consensus entre les forces politiques nationales pour éviter un scénario catastrophe et l'impasse politique actuelle. «Il y a une impasse, le pouvoir vit une crise, sans solutions, à cause en grande partie de la maladie du président. On peut facilement arriver à la situation du Venezuela, en tout cas la situation sociale et économique est très difficile. Le pouvoir ne peut pas assumer ses responsabilités et l'opposition n'a pas les moyens de faire bouger les choses. Tout le monde s'est donc rendu à l'évidence qu'on doit se rencontrer. Cela pourrait prendre la forme d'une conférence nationale qui ne doit pas être exclusive», a-t-il expliqué, cité par la même source. Pour lui, le report de la prochaine élection doit donner «toutes ses chances de succès» à la conférence nationale sur le consensus. «Le report de l'élection présidentielle est très probable. C'est une demande de nombreux partis, même le pouvoir pourrait l'accepter, il y a des échos dans ce sens. On sait qu'en l'état actuel des choses, il n'y a aucune possibilité d'organiser des élections honnêtes en 2019. Il faut prendre le temps qu'il faut pour engager des réformes. Néanmoins, il y a une différence entre le report et le prolongement du mandat du président Bouteflika, a-t-il encore expliqué. «Si on reporte le scrutin sans aller vers des réformes, ce serait un prolongement. Et ce n'est pas là notre revendication.» Les propos de Makri et son appel au report de la prochaine présidentielle s'expliqueraient par la nécessité de parvenir à un compromis politique entre le pouvoir et l'opposition. Il avait au lendemain du discours du président début décembre à la conférence gouvernement-walis indiqué dans une déclaration postée sur sa page facebook qu'«il se confirme jour après jour que l'horizon est bouché en prévision de la présidentielle 2019», et que «l'option du cinquième mandat n'est pas à l'ordre du jour. Les gens du pouvoir ne sont pas capables de s'unir sur une seule candidature consensuelle et l'opposition ne peut participer à ce scrutin dans ce flou ambiant et l'absence de garanties», avait-il ajouté. Quant à «la conférence nationale dont on parle, elle doit avoir pour objet l'engagement de réformes politiques profondes qui permettront d'aller vers de vraies réformes économiques», a-t-il insisté. Avec les critiques des partis d'opposition, dont le RCD, il est de plus en plus évident que le soudain silence des partis de l'alliance présidentielle sur cette prochaine élection est porteur de lourdes incertitudes, et qu'un virage à 180 degrés est en train d'être amorcé. La proposition du président du MSP serait une perche tendue notamment vers les partis de l'alliance présidentielle, qui seraient favorables à un report, même s'ils ne l'ont pas exprimé directement. Car le président de TAJ, Amar Ghoul, avait appelé tout naturellement à une conférence nationale du consensus pour trouver une issue à une impasse politique de plus en plus évidente. Une proposition qui a été reprise et soutenue dimanche lors de la réunion des quatre partis de l'alliance présidentielle. Cette réunion, tenue au siège du RND, a été sanctionnée par une déclaration dans laquelle le FLN, le RND, TAJ et le MPA ont accueilli favorablement l'appel à cette conférence pour le consensus, comme ils appuient toutes les initiatives qui visent «l'approfondissement des réformes économiques» et «le renouveau du projet économique». Le parti d'Amar Ghoul a annoncé qu'il va entamer des discussions avec les personnalités politiques pour débattre de sa proposition d'organiser une conférence pour le consensus national, avant la présidentielle d'avril 2019. «Nous proposons une conférence pour le consensus national pour construire une nouvelle Algérie», a affirmé Tahar Chaoui, président du groupe parlementaire de TAJ. Au fond, le président de TAJ comme les autres partis de l'alliance présidentielle ne seraient pas défavorables au report de l'élection présidentielle, car, selon Tahar Chaoui, «on n'écarte pas au sein du parti de débattre lors de cette conférence du report de la prochaine présidentielle». «Nous sommes ouverts à toutes les propositions et avis à condition qu'ils soient dans l'intérêt national», a t-il précisé. «Cette conférence est ouverte à tous les partis du pouvoir et de l'opposition», a encore précisé dans des déclarations de presse ce confident du président de TAJ, un parti au sein duquel on estime que «la tenue de cette conférence est plus importante que la présidentielle».