Les blouses blanches (le personnel médical et paramédical) ont investi, hier, les rues dans plusieurs wilayas du pays pour dire «non à la prolongation du 4e mandat présidentiel», «oui à une rupture totale avec la gestion actuelle des affaires du pays», et «oui à la concrétisation des aspirations du peuple algérien». A Alger, la corporation de la Santé s'est donnée rendez-vous à l'hôpital Mustapha Pacha, avant de se rassembler à la place du 1er Mai et se rendre ensuite à la place qui est devenue l'endroit symbolique de ce mouvement populaire, la place de «la Grande Poste d'Alger». Les étudiants, pour leur part, se sont rassemblés aux environs de 10h, à la place Maurice Audin, et ont rejoint après les médecins à la Grande Poste d'Alger. Les revendications des universitaires sont les mêmes que celles du corps médical : le départ du système et l'édification d'un Etat de droit. Les blouses blanches se sont en fait, distinguées avec des slogans qu'on peut qualifier de «médicaux». Sur des banderoles on pouvait lire «On ne peut pas guérir l'Algérie avec des médicaments périmés» ou «Ni le système, Ni le générique, dégagez». Parmi cette foule de protestataires, il y avait les représentants d'autres corps, l'on cite certains éléments de la protection civile sans la tenue officielle, certains ont brandi une pancarte sur laquelle il était écrit «la protection civile est issue du peuple, et elle est avec les aspirations du peuple, pour une deuxième République». Toutes les personnes rassemblées hier se sont dit unies pour la même cause «un changement radical et l'édification d'un Etat de droit». Il y avait aussi cette détermination pour que ce mouvement populaire demeurera soudé. Des drapeaux algériens et amazighes, collés l'un à l'autre, pour dire non à toute sorte de manipulation de l'opinion publique ou contre toute tentative qui vise à semer la division. Dr Lyes Merabet, président du Syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP) qu'on a rencontré sur place, a estimé que le peuple « est sur la bonne voie, il y a tout de même des réactions, le retrait de la candidature de Bouteflika , mais on veut plus, une résolution à la hauteur des aspirations de notre jeunesse et de notre peuple, il y a eu des propositions mais qui n'arrivent toujours pas à calmer les esprits». Il dira que la mobilisation ne faiblit pas, «le vendredi passé, on a été très nombreux, ce vendredi on sera beaucoup plus nombreux car on n'est pas d'accord avec eux, on veut un changement réel, pas de bricolage, on veut une période de transition avec des gens qu'on connaît, des gens dignes de confiance, des gens qui n'ont pas été dans la gestion des affaires de ce pays». Et de poursuivre «quelqu'un qui a été à l'origine du problème ne peut pas être un élément de la solution». Lotfi Benbahmed, président du Conseil national de l'ordre des pharmaciens, a affirmé que cette manifestation du corps médical coïncide avec le 19 mars «une date symbolique de la victoire de l'Algérie, la corporation médicale, toute entière : médecins, pharmaciens, chirurgiens-dentistes ,ainsi que les vétérinaires sont là, humblement, en tant que faction de la population algérienne pour relayer les aspirations du peuple algériens et vivre dans un Etat démocratique avec des élections libres et transparentes». Il dira en outre que sa corporation est pour une Algérie libre et une République renouvelée avec du nouveau. Il conclut «nous sommes persuadés qu'avec cette jeunesse mature, l'Algérie prendra son envol et prendra la place qu'elle mérite dans ce monde avec toutes les dimensions et les potentialités dont elle dispose». Les protestataires, blouses blanches et étudiants préviennent : «Nous sommes unis, vous êtes finis», sur une grande banderole on pouvait lire «nul ne peut arrêter un peuple sur le chemin de son destin». Rassemblements et marches dans plusieurs wilayas A Oran, les blouses blanches ont été nombreuses à sillonner les rues de la ville, scandant des slogans revendiquant le changement et dénonçant l'allongement du quatrième mandat. A Tiaret, des dizaines de praticiens de santé du secteur public et privé ont battu le pavé pour exprimer leur «entière solidarité avec le mouvement populaire national et pacifique». A Bouira, médecins, paramédicaux, travailleurs des APC, de différentes administrations locales, de la fonction publique, de l'Algérienne des eaux, de Sonelgaz, des postes... etc., ont scandé des slogans demandant le départ du système et fustigeant ceux qui se sont rendu responsables du chaos et de la situation de grande désolation qui prévaut dans le pays. Constantine, des étudiants et des personnels de la Santé ont organisé, hier, des rassemblements au chef-lieu de wilaya, pour manifester leur rejet du report de l'élection présidentielle. L'adhésion à ces rassemblements, notamment celui initié par les étudiants, n'était pas massive, certainement en raison du fait que la plupart des étudiants étaient en vacances et se trouvaient chez eux, hors wilaya pour un grand nombre d'entre eux. Les blouses blanches de Skikda, en compagnie de paramédicaux, de pharmaciens et de vétérinaires ont marché hier, pour manifester leur opposition à la prolongation du 4e mandat et dénoncer les violations de la Constitution. Ils étaient plusieurs dizaines à tenir un sit-in devant le siège de la direction de la Santé, au pôle administratif, avant de se diriger, ans une longue procession en direction de la place du 1er Novembre 1954. Les forces de l'ordre ont tenté de stopper la marche à hauteur de l'Avenue Bachir Boukadoum mais c'était sans compter la détermination des marcheurs qui réussissent à se défaire, sans heurts, de l'étau policier pour rejoindre l'Avenue des Allées du 20 Août 1955 où ils continueront à «battre le pavé», salués par les badauds.