Les membres du panel ont remis, dans la matinée d'hier, au chef de l'Etat, le rapport final comportant l'ensemble des activités qu'ils ont menées et deux projets de lois organiques, le premier de création de l'instance indépendante d'organisation des élections et le second amendant la loi électorale. A moins que certains de ses membres soient chargés d'une nouvelle activité politique, c'est la fin de mission pour le panel de médiation et de dialogue après cette remise officielle à Abdelkader Bensalah, du rapport sur l'ensemble des consultations qu'il a menées, depuis le mois de juillet dernier. Rapport qui a été, aussi, remis aux partis politiques, aux personnalités nationales et à la presse. « Les revendications populaires légitimes constituent le noyau des activités entreprises par le panel (...), nous avons mené de larges consultations avec la société civile politique qui ont toutes convergé vers la nécessité d'assurer un climat favorable qui permet de tenir des élections présidentielles crédibles, transparentes et libres, » a déclaré, hier, son coordonateur en préambule à une conférence de presse qu'il a animée conjointement avec plusieurs de ses membres. Karim Younes assure que « toutes les propositions de sortie de crise de ceux avec qui on a dialogué, sont consignées dans ce rapport général en plus du projet de loi relatif à la création d'une instance indépendante d'organisation des élections, conformément à ce qui se fait dans les pays démocratiques de par le monde et un autre de loi électorale amendée. » Instance qu'il présente comme devant être « composée de 50 membres dont 20 doivent être des jeunes issus de la société civile, totalement indépendante, administrativement et financièrement, avec à sa charge la gestion de l'ensemble du processus électoral, de la réception des dossiers des candidats jusqu'à l'annonce des résultats préliminaires du vote ». Le projet de loi électorale présenté, hier, au chef de l'Etat comporte, par ailleurs, selon lui, près de 120 propositions d'amendements entre autres, celle qui renvoie à la suppression pour le candidat des 600 signatures d'élus et le maintien seulement des 50.000, l'exigence qu'il soit diplômé universitaire, la suppression de l'exigence de l'âge de 40 ans pour être membre de l'instance. Une conférence nationale serait une zerda politique « Nous avons rencontré 23 partis politiques, 2 ou 3 d'entres eux, à plusieurs reprises, et nous avons eu des discussions avec 6.570 représentants de la société civile, organisations socioprofessionnelles et personnalités nationales, après tout ça, la conférence nationale devient inutile, » a affirmé Younes. Surtout « après la décision de convoquer le corps électoral, le 15 septembre prochain et aussi après les conférences du 5, du 26 juin et du 6 juillet, la conférence nationale qu'on avait prévu de tenir n'a pas lieu d'être, sinon qu'elle sera une zerda politique, » a-t-il encore précisé. « Nous avons adressé des invitations à 50 partis politiques dont une grande partie nous sont revenues avec la mention personne à cette adresse, 23 y ont répondu, le MSP n'a pas participé officiellement, les autres comme le RCD, le FFS ou le PT ne sont pas venus, c'est leur choix, on n'a jamais dit qu'on a discuté avec tout le monde, ou avec tout le peuple algérien, on l'a fait avec ceux qui ont accepté de le faire, des citoyens nous ont demandé d'aller les rencontrer dans leurs régions, nous avons refusé, mais on a discuté avec beaucoup d'entre eux au siège du panel, » a répondu Younes, aux nombreuses questions qui tournaient autour de la légitimé du dialogue et du panel. «Le rapport ne représente pas le peuple ! » a-t-il lancé. Amar Belhimer intervient pour clarifier des arrière-pensées politiques et détendre une atmosphère devenue quelque peu électrique, « on est tous venus du Hirak, personne ne peut contredire les revendications populaires légitimes. » L'enseignant universitaire Mahmoud Bensari précise pour sa part que « les élections présidentielles vont montrer qui représente le peuple, personne ne peut se targuer de l'être, les partis qui exigent une constituante et une période de transition ont refusé de dialoguer, la majorité silencieuse veut des élections, ce sont des citoyens que nous approchons quotidiennement qui nous le disent, on n'a fait que reprendre toutes les propositions de ceux qui ont accepté le dialogue, tout est clair dans le rapport final, et dans cette atmosphère politique nuageuse, l'Etat va s'engager à le mettre en œuvre, ce sont des mesures d'urgence qui sont proposées, pour éviter le blocage, on s'est basé sur une interprétation large de la constitution et non à la lettre, on attend que le chef de l'Etat le lise (...). » Il interroge alors « pourquoi veut-on noircir le tableau, le parlement qui va voter les deux lois est légitime ou pas, on a trouvé dans ce tumulte les institutions qui ne peuvent barrer la route à tout ce que veut le peuple. » «Des élections dans trois mois» Fatiha Benabou continue la plaidoirie dans ce sens « je ne pense pas que le parlement remet en cause les articles 7 et 8 de la constitution, aujourd'hui, c'est la suprématie populaire qui doit primer sur la souveraineté constitutionnelle, le peuple veut ! Quand la souveraineté populaire est là, les représentants s'effacent ! » La constitutionnaliste recommande « il ne faut pas aller dans l'angélisme politique (...), il faudrait déverrouiller le champ politique et médiatique. » Karim Younes reprend « le panel a demandé, dès le départ, qu'il y ait un apaisement. » A ceux qui insistent sur quelles références repose le contenu du rapport, Belhimer répond « sur une tri constitutionnalité, le maintien du chef de l'Etat pour ce qui est du respect du cadre constitutionnel, et ce jusqu'à l'élection d'un président de la République, la démission du gouvernement Bedoui parce que impliqué dans la gestion du pouvoir déchu, éloigner les partis du pouvoir de ce nouveau processus avec la nuance entre leurs états-majors et leur base (...), la préservation constitutionnelle garantit ainsi la paix sociale, la sécurité et la stabilité, trois facteurs nécessaires pour des élections (...), on attend que le chef de l'Etat lise le rapport pour savoir ce qu'il en pense. » Benabou note au sujet de l'instance qu'elle sera « totalement indépendante, toutes les prérogatives des ministères de l'Intérieur, de la Justice et des représentations diplomatiques nationales à l'étranger doivent lui être attribuées, le ministère de l'Intérieur sera au chômage technique ! » Interrogé sur la date des élections présidentielles, Karim Younes a souligné que «ce n'est ni à nous panel, ni à l'instance de l'arrêter, c'est le chef de l'Etat qui doit convoquer le corps électoral et fixer la date des élections. » Benabou explique que selon « l'article 139 de la loi électorale, à partir du 15 septembre prochain, nous avons 3 mois pour tenir les élections présidentielles, nous avons donc largement le temps de faire adopter les deux projets de lois (électorale et instance), les textes sont prêts, ils vont passer formellement devant le parlement. »