Estimant de son point de vue les conditions réunies pour l'organisation de l'élection présidentielle, le président de l'Etat Abdelkader Bensalah a fixé au 12 décembre prochain la tenue du scrutin. Si la convocation du corps électoral dont il a fait l'annonce à la nation dimanche soir ouvre bel et bien la voie au processus électoral, il n'est pas certain toutefois que les oppositions qu'il suscite vont finir par s'éteindre faute de n'être pas parvenues à faire échec aux initiatives du pouvoir qui lui ont frayé le chemin. Paradoxalement, c'est le pouvoir qui offre aux plus déterminées de ces oppositions matière à entretenir la méfiance populaire à l'endroit du processus électoral qu'il vient de mettre en branle. Elles ont en effet beau jeu en la matière au regard que ce pouvoir a opposé une fin de non-recevoir à la proposition formulée par l'instance de dialogue et de médiation de mesures d'apaisement à même de susciter l'adhésion populaire à l'option électorale. En ayant amendé les lois relatives à l'autorité nationale indépendante des élections et au régime électoral, les détenteurs du pouvoir pensent avoir répondu à la revendication populaire primordiale et en cela avoir démontré qu'ils ont la volonté de mettre fin aux pratiques qui ont réduit les scrutins et consultations électoraux dans le pays à d'humiliantes mascarades. Mais pour que les marques de cette volonté apparaissent probantes à une population désormais irrévocablement déterminée à faire prévaloir la souveraineté populaire, il aurait fallu que ceux qui l'affichent en se targuant d'être à l'écoute du peuple et en phase avec ses aspirations et revendications fassent aussi droit aux mesures d'apaisement qu'il réclame et dont il manifeste qu'elles constituent pour lui l'étalon de jugement quant à cette volonté dont le pouvoir veut l'en convaincre. Au lieu de cela, ils ont administré la preuve qu'il n'est pas dans leur intention d'aller au-delà des formelles concessions qu'ils ont faites à travers leurs amendements aux lois organiques relatives au régime électoral et à l'autorité indépendante des élections et même démontré qu'ils vont être encore plus répressifs à l'encontre des opposants au processus électoral, en faisant le jour même où Bensalah a prononcé son discours à la nation pour annoncer la convocation du corps électoral incarcérer vingt sept manifestants des marches de vendredi. Ce durcissement répressif va probablement détourner encore plus de citoyens du processus électoral mis en branle par le pouvoir que pouvaient l'espérer les opposants politiques qui en prônent le boycott. S'il compte que l'adhésion populaire sera massive au rendez-vous électoral, le pouvoir ne semble pas pourtant disposé aux gestes qui rendraient possible cette perspective.