Une première depuis 1999, à l'époque de la présidence de Liamine Zeroual, le dernier Journal officiel (n°75) a rendu public le rapport 2019 de la Cour des comptes. Le document de 412 pages «comprend dix-huit notes d'insertion reprenant les principaux résultats des travaux d'investigation réalisés en exécution de son programme de contrôle de 2017». Ledit programme s'est traduit par «l'établissement de 936 rapports de contrôle» dont «144» portant sur «la qualité de la gestion» et «792 rapports aux fins d'apurement des comptes de gestion des comptables publics». «Ces notes mettent en exergue les constatations, les observations et les appréciations les plus significatives portant sur les conditions de gestion des ressources financières, moyens matériels et fonds publics par les entités contrôlées», précise le préambule du rapport 2019 de la Cour des comptes. Divisé en quatre chapitres, le rapport s'intéresse à plusieurs «opérations» et «activités» dans différents secteurs comme la protection civile, l'éducation nationale, l'enseignement supérieur, les ressources en eau, les «collectivités territoriales» et les «établissements et entreprises». Le document rend compte également, dans un quatrième chapitre de «l'utilisation des moyens budgétaires» alloués à la Cour des comptes et «des ressources humaines dont elle dispose». Le rapport 2019 de la Cour des comptes s'est penché sur la mise en œuvre du «programme de formation des enseignants des cycles primaire et moyen de l'éducation nationale» portant sur la «formation de 214.000 enseignants», dont «136.000 maîtres de l'école primaire (MEF) et 78.000 professeurs de l'enseignement moyen (PEF)», étalée sur «une durée de dix ans» et «avec un coût estimatif de 45,920 milliards de DA» (MDA). Selon le document, l'évaluation de ce programme «laisse apparaître que les objectifs de formation» n'ont été «atteints que partiellement», notant qu'à la fin 2015, le «nombre de formés» était de «98.624 MEF (73%) et 27.710 PEF (36%)». Le rapport estime que «l'exécution du programme de formation s'est heurtée à plusieurs contraintes» dues au «décalage du dispositif mis en place avec les réalités du terrain». Plusieurs «contraintes» sont citées : le «caractère obligatoire de la formation», «l'âge arrêté à 50 ans», les «faibles incitations motivant» en direction des enseignants, «l'inadaptation du contenu des programmes et des modalités de déroulement d'évaluation de la formation», «l'insuffisance des supports pédagogiques» et «la faiblesse des mécanismes de coordination et de suivi du programme». Sur le plan financier, la Cour des comptes affirme que «la gestion de ce programme n'est pas suffisamment encadrée» et que des crédits ont été utilisés «à des fins autres que la formation à distance et en cours de service», «ainsi qu'à des reliquats budgétaires gelés depuis plusieurs années». «Faible disponibilité de données» Le rapport affirme que «le contrôle de la Cour s'est vu limité par la faible disponibilité des données qui sont parfois partielles et peu fiables et l'incohérence des données recueillies auprès des différents intervenants dans l'exécution du programme (de formation)». L'institution précise que son «appréciation (...) s'est limitée à l'analyse des indicateurs quantitatifs disponibles et ceux liés à l'exécution financière». Le document rappelle que le programme de formation visait «la mise à niveau des enseignants en activité dont les qualifications académiques ne répondaient pas aux exigences du profil ciblé par le ministère de l'Education nationale et retenu par la réforme du système éducatif». Ainsi, 214.000 enseignants «devaient poursuivre une formation à distance et en cours de service à partir de 2005». La formation est «obligatoire» à «tous les enseignants non détenteurs d'une licence d'enseignement ou d'un titre équivalent», à l'exclusion de «ceux dont l'âge a dépassé les 50 ans». Les organismes de formation associés à cette opération sont : l'UFC, l'ENS, l'INFPE et l'ONEFD. A fin 2015, le nombre d'enseignants formés était de 98.624 MEF (sur 136.000) et 27.710 PEF (sur 78.000), soit respectivement un taux de formation de 73% et 36%. Le rapport note que «dès les premières années», «les résultats ont été en deçà des prévisions» (annuelles), avec des taux de réussite des diplômés allant de 20,1% (promotion 2005-2006) à 21,3% (promotion 2010) et des «résultats insatisfaisants» en termes de notes et de moyennes obtenues par les diplômés. «Les investigations de la Cour ont permis de relever un ensemble d'insuffisances liées à une faible coordination du programme, à un cadre réglementaire en décalage avec les réalités du terrain et une gestion financière disparate et peu rigoureuse du programme», relève le rapport. Parmi ces contraintes, des «programmes», leur «déroulement» et «l'évaluation de la formation», qui «ne sont pas adaptés», des «cours et supports pédagogiques insuffisants». «Une gestion financière insuffisamment encadrée» La Cour des comptes estime qu'en dépit de «l'importance de l'enveloppe budgétaire mobilisée et la multiplicité des intervenants», le «dispositif mis en place pour l'exécution du programme n'a pas défini les procédures financières en vue d'une gestion transparente des crédits alloués à ce programme». Sur un montant global prévisionnel de 45,920 MDA, «le programme de formation a bénéficié de 16,998 MDA» répartis à raison de 350 millions de DA pour l'INFPE, 498,521 millions de DA pour l'ONEFD, 6,601 MDA pour les établissements scolaires centralisateurs et 9,548 MDA pour l'UFC. Pour ces différents organismes, «la Cour a relevé une gestion financière disparate de ces crédits». «Avec un même statut d'établissement public administratif, chaque organisme avait une organisation financière différente». Le rapport relève aussi qu'une partie des crédits a été utilisée «à des fins autres que la formation à distance et en cours de service». Ainsi, sur le montant total alloué à la formation à distance qui est de 6,601 MDA, 3,347 MDA soit 51% de l'enveloppe allouée ont été utilisés à d'autres fins. Il est également relevé un reliquat de 11,166 MDA sur les 16,998 MDA de crédits. Le rapport de la Cour des comptes recommande d'«adosser les programmes de formation d'indicateurs permettant une visualisation complète des actions de formation projetées» et de «mettre en place des procédures de suivi».