Tant attendu et réclamé par les pharmaciens d'officines, un décret exécutif (n° 19-379 du 31 décembre 2019), «fixant les modalités de contrôle administratif, technique et de sécurité des substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes», a été publié au premier journal officiel (JO) de la nouvelle année. Par «contrôle administratif, technique et de sécurité des substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes», le décret vise «toutes les opérations visant la traçabilité de ces substances et médicaments depuis la réception des matières premières jusqu'à la dispensation par le pharmacien d'officine ou le pharmacien hospitalier», indique l'article 2. Le décret est composé de cinq chapitres. Le premier concerne le «contrôle en matière d'importation et d'exportation de substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes» par «les services compétents du ministère chargé de la Santé» (Art. 4). Ce contrôle se fait sur la base de documents permettant une «comptabilité» et une «traçabilité» de ces produits, établis par «le pharmacien directeur technique et le pharmacien assistant d'un établissement pharmaceutique d'importation et d'exportation des substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes» (Art. 5). Les documents (présentés en annexe) concernent «le registre des entrées et des sorties», «le registre de ventilation» et «le registre des matières premières, déchets ou produits non conformes». Le deuxième chapitre précise les modalités de «contrôle en matière de production, de fabrication, de conditionnement, de transformation, de distribution, d'offre et de cession des substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes». L'article 7 sous le chapitre 2, attribue ce contrôle à «l'agence nationale des produits pharmaceutiques» qui doit mener «des inspections périodiques et inopinées au niveau des locaux des établissements pharmaceutiques de production, de fabrication, de conditionnement, de transformation, de distribution, d'offre et de cession, notamment en ce qui concerne les règles de bonne pratique et au niveau des stocks, qui sont effectuées sur la base des documents prévus à l'article 8 ci-dessous». L'article 8 précise que l'établissement pharmaceutique doit détenir les documents relatifs au : «programme d'importation de la matière première» ; l'autorisation d'importation de la matière première et/ou du produit fini (certificat officiel d'importation), délivrée conformément à la réglementation en vigueur ; le registre des entrées des matières premières destinées à la fabrication de substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes ; le registre des sorties des produits finis à partir de la matière première ; le registre de ventilation ; le registre des matières premières, déchets ou produits non conformes». Comptabilité séparée pour les psychotropes Au chapitre 3 de ce décret, le décret précise les règles de «contrôle en matière d'acquisition et de détention de substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes». Ce chapitre concerne particulièrement les pharmaciens d'officines et des structures hospitalières. L'article 9 stipule que «la commande de substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes, doit être formulée séparément des autres médicaments, sur un bon de commande, comportant la signature du pharmacien avec sa griffe et son numéro d'inscription à l'organe chargé de la déontologie des pharmaciens». L'article 10 précise aussi que ces substances «doivent faire l'objet d'une facture séparée correspondant au bon de commande y afférent». Dans la gestion par les pharmaciens, c'est l'article 11 qui énumère l'ensemble des responsabilités. Sont concernés : «Le pharmacien directeur technique d'un établissement pharmaceutique, le pharmacien d'officine, le pharmacien assistant et le pharmacien hospitalier d'établissement de santé public et privé». Ils doivent «s'assurer à chaque réception des substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes, des informations suivantes : la conformité de la facture au bon de commande émis ; le numéro du lot ; la quantité livrée ; (et) la date de la péremption». La mention « service fait » doit être transcrite sur la facture «lorsque la livraison est conforme», avec «signature» et «griffe», «accompagnées de la date de réception et du cachet de la structure et/ou de l'établissement». «En cas d'enlèvement auprès du fournisseur», chaque intervenant est appelé à vérifier «la conformité de la livraison par rapport à la facture», avant de valider «sur la facture» les références «de sa pièce d'identité ainsi que sa fonction et adresse et le cachet de la structure et/ou de l'établissement». «Les substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes» doivent être conservées «dans une armoire ou un local fermant à clef qui leur est dédié» (Art. 12). Leur «élimination doit être pratiquée conformément à la législation et à la réglementation en vigueur» (Art. 13). «Des inspections périodiques et inopinées pour contrôler le respect des modalités et conditions d'acquisition et de détention» de ces substances doivent être menées par : «l'agence nationale des produits pharmaceutiques pour les établissements pharmaceutiques», «les pharmaciens inspecteurs de santé publique pour les officines pharmaceutiques et les établissements privés et publics de santé» (Art. 14). «En cas d'infractions ou de manquements constatés, un rapport est établi par les pharmaciens inspecteurs de santé publique et transmis à la commission de wilaya, territorialement compétente, prévue à l'article 38 ci-dessous. Une copie du rapport est adressée à la structure compétente du ministère chargé de la santé», indique le même article. Gestion de la prescription et de la remise Le chapitre 4 traite du «contrôle en matière de remise des substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes». «Les substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes ne peuvent être prescrits que par les médecins» (Art. 15), «sur une ordonnance établie en trois exemplaires de couleurs différentes : blanche, jaune et rose» (Art. 16). «Les exemplaires de couleurs blanche et jaune sont remis au patient. L'exemplaire de couleur rose doit être conservé par le médecin prescripteur pour une durée de deux (2) années. La durée maximale de prescription est limitée à trois (3) mois», ajoute l'article 16. L'article 20 note que : «Tout médecin prescripteur doit enregistrer ses prescriptions sur un registre ouvert à cet effet, coté et paraphé par le directeur de la santé et de la population de la wilaya, pour les médecins exerçant dans les structures et établissements privés de santé, et par le directeur de l'établissement de santé pour les médecins exerçant dans les établissements publics de santé. Il est conservé pendant cinq (5) années». En milieu hospitalier, seul «un médecin spécialiste en psychiatrie de l'établissement hospitalier d'exercice» peut en prescrire (Art. 21), pour une «durée maximale ( ) d'un (1) mois» (Art. 22). «Les échanges ou transferts des substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes entre les établissements de santé et entre les officines, se font par décharge qui précise la nature et la quantité des produits échangés ou transférés. Les quantités échangées ou transférées sont notifiées à la commission de wilaya, territorialement compétente » (Art. 29). Les attributions de la «commission nationale et commission de wilaya des substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes» sont précisées dans le chapitre 5 du décret. Cette commission est créée au niveau «auprès du ministère chargé de la santé» (Art.37). Ses missions (Art. 37 également) : «évaluer le risque de pharmacodépendance et d'abus », «entreprendre toutes études, recherches et enquêtes entrant dans le cadre de ses missions», «donner des avis sur les mesures à prendre pour préserver la santé publique dans le domaine de la lutte contre la pharmacodépendance ou l'abus», «proposer toutes mesures nécessaires visant une meilleure maîtrise et un contrôle efficace en matière de substances et médicaments ayant des propriétés psychotropes», et «d'établir un rapport annuel de ses travaux qu'elle adresse au ministre chargé de la santé». L'article 40 évoque des «sanctions administratives et disciplinaires» en cas «d'inobservation des dispositions du présent décret». «Les structures et les établissements publics et privés de santé sont tenus de se conformer, dans un délai de trois (3) mois, aux dispositions du présent décret, à compter de la date de sa publication au Journal officiel», précise encore l'article 41.