Les responsables de la Santé, à tous les niveaux, multiplient les appels, suivis par les plus hauts responsables politiques, afin que les Algériens s'impliquent dans la prévention et la lutte contre la propagation du Covid-19. Mais, malgré ces appels, malgré le danger, malgré les morts et les milliers de malades, malgré le confinement qui pèse lourdement sur la vie quotidienne et malgré les multiples rappels à l'ordre, procès-verbaux dressés, mise en fourrière de véhicules et de motos, un comportement irrationnel et dangereux continue d'être observé un peu partout. Le mal est profond, il a été entretenu pendant plusieurs décennies par des politiques qui n'ont pas su ou voulu- amener le peuple algérien à faire confiance à ses dirigeants, ces derniers ont d'ailleurs tout fait, sciemment ou non, pour augmenter cette cassure. C'est cette confiance perdue, cette suspicion, qu'il faudrait extraire des esprits de la majorité des Algériens par rapport à leurs dirigeants et c'est là le travail de fond que doit mener l'actuelle équipe dirigeante en Algérie. Une fois cela acquis, il sera facile de réunir tous les Algériens, une nation formidable, autour de leurs dirigeants à condition que ces derniers fassent montre d'intégrité, d'amour de la patrie, de volonté inébranlable pour mener le pays vers un épanouissement social et économique à la mesure de ses capacités, de ses aspirations et de ses compétences. Un Aïd morose Allah Akbar, Allah Akbar, La Ilaha Illa Allah ont commencé à lancer, dès l'aube, les haut-parleurs de toutes les mosquées du pays, faisant pousser des soupirs à la majorité des Algériens qui ont été privés cette année d'une communion entre eux, à cause du Covid19. En même temps, cela nous replongeait, enfin, dans l'ambiance, sinon du Ramadhan, du moins de l'Aïd, rendant l'espoir à chacun et nous faisant sentir que la vie continuait malgré tout. Pendant plus d'une heure, c'était les retrouvailles avec la norme, avec la foi, avec nos habitudes complètement chamboulées par une petite chose appelée coronavirus Mais une fois dans la rue, la morosité reprenait son droit, point d'enfants vêtus de neuf embrassant leurs voisins pour leur souhaiter bon Aïd, point d'hommes de blanc vêtus se dirigeant vers les mosquées pour accomplir la prière de l'Aïd, point de femmes se dirigeant aussi vers les mosquées ou les cimetières. Il n'y avait que quelques petits groupes de jeunes qui, malgré l'interdiction de se retrouver à plus de deux ou trois personnes, essayaient tant bien que mal de recréer cette ambiance féérique unique en Algérie, faite de communion, de fraternité, de pardon, d'amour des autres. De temps en temps, des intrépides ou des inconscients passaient en voiture, bravant l'interdiction de circuler de tout véhicule à moteur, risquant par là d'être verbalisés. Le nombre de récalcitrants étant très réduits, les services de police se faisaient très discrets, évitant de gâcher une journée, déjà oppressante car inhabituellement calme pour un Aïd. Tout cela durant la matinée, après que les fidèles eurent accompli la prière de l'Aïd chez eux, avec leurs familles. A partir de midi, les rues déjà vides sont devenues vraiment désertes, avec la chaleur qui montait, et rares étaient ceux qui s'aventuraient dehors. Ce n'est qu'après 18h, en plein confinement à domicile, que les quartiers ont recommencé à bouger, de nombreux jeunes et moins jeunes étant sortis pour se retrouver et se souhaiter un bon Aïd, oubliant même de prendre les précautions nécessaires dictées par la situation pandémique dans laquelle nous nous trouvons et qui a causé tout ce chamboulement de nos habitudes. Les bavettes, ce grand refus Par bravade, par inconscience, par habitude, par oubli ou pour toute autre raison déraisonnable, la quasi-totalité des personnes que nous avons rencontrées durant toute la journée de l'Aïd et celle d'après ne portaient pas de bavette, dont le port est obligatoire par voie réglementaire faisant risquer aux contrevenants d'être verbalisés. La campagne de sensibilisation, la distribution gratuite nous y reviendrons- de milliers de bavettes et l'obligation légale ne sont pas venus à bout de ce refus de porter un masque de protection indispensable pour éviter la propagation du virus. « J'ai oublié la bavette à la maison et je la mettrai peut-être tout à l'heure, pour moi cela ne pourra pas servir à grand-chose », « Bavette, bavette, je ne supporte pas de porter cela et puis cela servira à quoi ? Nous vivons dans la saleté, nous respirons la saleté, regardez le pain, il est toujours vendu sur le trottoir, les dattes sont exposées à tous les vents, la pastèque coupée en deux et vendue ainsi avec tous les risques que cela sous-entend, et vous me demandez de porter une bavette ? Je ne la porterai pas, quoiqu'il advienne », nous ont répondu des citoyens à qui nous avons posé la question pourquoi ne portaient-ils pas de bavette. L'un d'eux nous a même regardé d'un air de dire « tu es vieux jeu » et les autres réponses sont toutes dans le même ton. Il y a, quand même, des citoyens assez conscients, beaucoup parmi les jeunes, mais il faut dire que le niveau d'instruction joue un rôle prépondérant dans les comportements des gens. Un travail intelligent et de longue haleine devra être mené par les responsables et les spécialistes pour sensibiliser tous les citoyens aux exigences sociétales qui engagent l'ensemble de la nation et auxquelles ils doivent se conformer même s'ils n'y adhèrent pas ou s'ils ne les comprennent pas bien. Levée de confinement pour bientôt ? C'est ce qui pourrait ressortir aussi bien des déclarations de responsables que des faits, l'obligation du port de masques de protection en étant une condition incontournable. Il est devenu en effet, très contraignant pour les citoyens, pour l'économie nationale, pour le gouvernement, de continuer un confinement qui n'est respecté, somme toute, que d'une manière aléatoire mais qui a causé des blocages énormes à tous les niveaux de la vie national. Il n'y a qu'à voir les autres pays où le taux de mortalité par Covid-19 demeure encore élevé et qui ont, quand même, engagé une levée de confinement progressive afin de remettre sur rails leurs économies lourdement ébranlées et éviter à leurs habitants des situations bien difficiles, économiquement parlant. Et si le niveau de vie accuse une baisse sensible, les maladies ne peuvent plus être combattues et seront beaucoup plus mortelles que le coronavirus actuel. Chez nous, c'est surtout l'Etat qui se trouve face à des obligations très difficiles à tenir en plus d'une frange importante de citoyens qui se sont engagés dans la débrouille et la clandestinité pour subvenir à leurs besoins car leurs sources de revenus se sont, soudainement, taries, sans qu'il y ait rien qui puisse les remplacer, à l'image des professions libérales (coiffeurs, taxis, transport par bus, commerçants en habillement, commerçants dans les marchés couverts, etc ). Tout le monde attend donc avec impatience le 29 mai, c'est-à-dire vendredi prochain, avec l'espoir de voir les mesures de confinement levées, du moins partiellement, leur permettant de reprendre une vie plus ou moins normale, mais à condition aussi que tous les citoyens se conforment aux mesures de protection indispensables, comme le port de masques de protection et la distanciation sanitaire. L'espoir est permis !