Un vrai gâchis : sur 23 nouveaux marchés couverts, 15 sont toujours fermés et tombent déjà en décrépitude. A qui la faute? Aux communes qui n'ont pas pu ou su les faire fonctionner? Trop facile de faire grief de défaillance aux APC seules pour justifier cet échec. Le vrai problème, c'est le projet en lui-même. En absurdité, il n'a rien à envier au fameux projet des 100 locaux par commune. Il y a pratiquement cinq ans, alors que la plupart des municipalités n'arrivaient toujours pas à rentabiliser leurs nouveaux marchés couverts, version Batimétal', et ce malgré la souplesse de la directive de la tutelle leur permettant d'exploiter ces équipements à leur guise, une nouvelle option semblait créer la tendance. Il s'agit de l'offre de services proposée alors par l'EPIC de gestion du marché de gros de la wilaya d'Oran (EGMGWO), en vertu de laquelle celle-ci se chargeait de la gestion-exploitation de ces structures de commerce de proximité, en contrepartie d'un prix de concession. L'accord entre l'APC, en tant que propriétaire de l'équipement public, et l'EPIC, en sa qualité de concessionnaire, était formalisé, bien-sûr, par une convention entre les deux parties. C'est la commune de Sidi Chahmi qui avait ouvert le bal et donné la marche à suivre pour les autres collectivités (intéressées), en ayant confié ses deux marchés couverts de Haï Sabah et de Haï Yasmine à l'EGMGWO. Selon l'accord conclu, l'APC devait en tirer 40 millions/mois pour chaque structure. Plus qu'une bonne affaire pour la trésorerie de cette commune, c'était le dénouement d'un problème, un vrai casse-tête. En effet, depuis la réception des clés de ces deux équipements, auprès de Batimétal', en 2013, l'APC de Sidi Chahmi n'a pas pu les ouvrir et les mettre en activité, malgré la pression des walis et des SG successifs et leurs tapes sur les doigts. Avec le même prétexte, tout fait, qui revient en boucle : « Les jeunes recensés ne veulent pas rejoindre leurs box, malgré leur mise en demeure par nos services, avec menace de remplacement par d'autres bénéficiaires ». L'OPTION DE GESTION DELEGUEE FAIT LONG FEU Raisonnement plutôt simpliste, qui contourne les problèmes sur le terrain. Car avant de se précipiter vers les mises en gardes par huissier de justice, il fallait tout logiquement vérifier si les deux marchés étaient fin prêts pour ouvrir. C'est ce qu'avait fait la direction de l'EGMGWO. Relevant pas mal de lots « restent à réaliser » et autres commodités manquantes, dont certaines incombaient aux entreprises intervenantes et/ou à l'usure du temps, le (nouveau) maître des lieux a rapidement remédié à la situation. Après quoi, il n'avait plus besoin de prier les marchands locataires de lever rideau. La convention EPIC-APC Sidi Chahmi a donc abouti : le marché de Haï Sabah est opérationnel, celui de Yasmine devait le suivre. La même démarche a été entreprise pour ce qui devait être le nouveau marché à poissons de Aïn El-Beïda jouxtant le marché de fruits et légumes qui était bien parti pour basculer sous la gestion de l'EPIC. Pareil pour le marché de Oued Tlélat, qui avait toutes les chances de passer devait sous la gestion de l'EPIC, après l'avis d'adjudication infructueux lancé par l'APC. Ayant pour objectif d'étendre son champ au Groupement urbain d'Oran, dans un premier temps, et au territoire de la wilaya tout entier, à terme, l'EGMGWO avait ratissé large depuis, avec comme feuille de route : signer un maximum de contrats de gestion. Cependant, le processus a fait long feu et bon nombre d'annonces en sont restées au stade des intentions, des vœux pieux plutôt. Le fait est là : sur un total de 23 marchés de ce genre, à l'actif de la wilaya d'Oran, une quinzaine sont à ce jour fermés, et se dégradent à petit feu. MEME LE PASSE-PARTOUT SALLES DE SPORTS / FETES NE MARCHE PAS Faire en sorte que les marchés de proximité, version Batimétal', servent à quelque chose, quitte à les transformer en salles de sports ou de fêtes. C'était la quintessence du fax du MICL envoyé, la mi-2016, aux walis. Lue de l'extérieur : l'instruction de l'Intérieur voulait limiter les dégâts et sauver les meubles après le quasi-fiasco du plan anti-informel, d'une lourde facture de 14 milliards de DA. Un plan qui n'a pas eu les résultats escomptés, le moins qu'on puisse dire, car l'on a supposé au départ, par un raisonnement causal, qu'il suffisait de construire, à chaque coin de la ville, une structure, un abri-commerçants, pour éradiquer de facto, le souk informel d'à-côté et faire disparaître, par effet dominos tous les aspects négatifs qui lui étaient liés. L'on savait, évidemment, que le basculement informel-formel n'allait pas s'opérer du jour au lendemain, que le déménagement (des marchands) du trottoir et de la baraque vers la halle couverte, n'allait pas se produire par simple clic et que, pour cela, il fallait recourir à des mises en demeure ainsi que d'autres méthodes pour faire remplacer les « déserteurs » et, qu'à la longue, le marché sauvage finira par se lasser, s'essouffler, se plier sur soi, se contracter dans l'espace et se concentrer, finalement, en quelques mètres carrés d'enclos. LA «DESERTION» COLLECTIVE QUI A FAUSSE LES CALCULS Or, ce qui a échappé, a priori, aux concepteurs de plan anti-informel, c'est cette allergie, cette répugnance maladive, contractée et développée, au fil de plusieurs dizaines d'années passées à l'air libre, dans le marché illicite, chez les vendeurs de tout bord, vis-à-vis des marchés, sous forme d'enclos. A plus forte raison, lorsque ceux-ci sont mal-pensés, sur les plans emplacement, architecture, génie civil, aménagement, fonctionnalité. Ce constat de gâchis, comparable à celui du projet des 100 locaux par commune, n'est pas propre à Oran, cela s'entend, puisqu'à l'échelle nationale, des dizaines de marchés « fin prêts » depuis 2013-2015, sur un total de 291 marchés couverts et 768 marchés de proximité et autres infrastructures de commerce, à travers les 1.541 communes, sont logés à la même enseigne. Ceci sans parler du reste à réaliser du même programme Batimétal', projets au sort inconnu, faisant partie d'un vaste projet gouvernemental, doté de 14 milliards de DA, alors que le pays était en plein confort financier, répartis entre les services du ministère du Commerce à hauteur de 10 milliards de DA et ceux de l'Intérieur pour 4 milliards de DA. Ce sont ces données, auxquelles il faut ajouter la dégradation progressive de ces équipements neufs et non-fonctionnels, qui ont poussé d'ailleurs les pouvoirs publics centraux à instruire les walis, à l'effet de rentabiliser ce gros investissement public, sous une forme ou une autre. UN QUASI FIASCO QUI VAUT 1.400 MILLIARDS Ainsi, en vertu de la décision notifiée par le MICL à la mi-2016, les APC avaient toute latitude de disposer de ces équipements, « pourvu que ça soit fonctionnel, avant la fin 2016 ». Cette échéance est dépassée depuis sept mois, les 3⁄4 des structures concernées demeurent toujours fermés et cherchent désespérément preneurs. Il importe de noter qu'à l'échelle nationale, une enveloppe de 14 milliards de DA a été dépensée pour la réalisation des marchés de proximité, des boxs avec ridelles et des boxs en systèmes tubulaires avec bâches et ce, dans le cadre de la lutte contre le phénomène des marchés informels et de l'insertion des intervenants sur ces marchés dans l'économie réelle. Cette enveloppe a été répartie sur 2 programmes. Le 1er d'une enveloppe de 4 milliards de DA, a été intégré dans les PCD 2011et 2012 et le 2ème doté d'une enveloppe de 8 milliards DA, a été confié à l'entreprise publique Batimetal'.