Depuis près d'un mois après son retour au gouvernement, Lamamra s'active à redonner ses couleurs à la diplomatie algérienne. En effet, soucieux de faire sortir rapidement notre diplomatie de son isolement, il n'a pas tardé à prendre son bâton de pèlerin pour enchaîner les visites dans certains pays africains avec pour objectif de réintroduire notre pays dans le jeu des luttes géopolitiques et géostratégiques régionales et lui faire retrouver sa place et son rôle d'acteur incontournable dans la région. L'exercice était incertain, périlleux et non dépourvu d'obstacles tant les dégâts causés à notre diplomatie, sont énormes et les signes de brisure visibles et béants. Ce qui a fait dire à un journaliste algérien avisé, que Lamamra a accompli en quelques semaines ce qui n'a pas été fait en deux ans. La tournée africaine de Lamamra a suscité beaucoup d'intérêt auprès des chancelleries étrangères et a résonné comme un séisme, dont les nombreuses répliques ont été ressenties dans plusieurs capitales ou les messages distillés, condensés et d'une grande subtilité ont été reçus. Il a réservé sa première visite après son retour aux responsabilités, à notre voisin tunisien, qui assure la Présidence en exercice du Sommet arabe et qui va devoir céder la présidence de la ligue arabe à notre pays. Face à la crise politique qui secoue la Tunisie, le message de Lamamra était aussi clair que précis. L'Algérie ne s'ingère pas dans les affaires intérieures de la Tunisie et demeure convaincue qu'elle est capable de relever l'ensemble des défis auxquels elle est confrontée. Cependant, aucune pression extérieure ne devrait s'imposer à la Tunisie et aucune instabilité n'est tolérée à ses frontières. Après Tunis, et mettant en pratique sa formule devenu un label, que l'Algérie est un partenaire pourvoyeur de sécurité et de stabilité, Ramtane Lamamra a mis le cap sur Addis Abeba, Khartoum et le Caire pour œuvrer à la promotion des solutions politiques aux crises de la région. En effet, à Addis Abeba, épicentre de l'Union Africaine, Lamamra a évoqué avec les autorités éthiopiennes outre, les questions bilatérales de nature stratégique et leur consolidation, la question controversée du barrage de la Renaissance objet d'une vive tension, entre l'Ethiopie, d'un côté, le Soudan et l'Egypte, de l'autre, après l'échec de toutes les tentatives de conciliation y compris, celle du Conseil de sécurité. Bien qu'il s'agisse d'une première étape de prospection et d'écoute, l'initiative algérienne appelant à la tenue d'une rencontre directe entre les dirigeants des trois pays pour résoudre leur conflit, a été saluée et accueillie avec une grande satisfaction voire de soulagement, par les trois pays concernés. A l'évidence, d'autres étapes seront nécessaires avant l'élaboration d'une vision algérienne sur une nécessaire voire une impérative issue au conflit, permettant de mettre ainsi, les relations stratégiques et privilégiées entre les parties africaine et arabe, à l'abri des risques de confrontation. En filigrane, il s'est agi d'affirmer aux acteurs régionaux et internationaux que l'Algérie sous l'autorité du Président Tebboune, est désormais de retour et a la capacité d'agir et de peser sur les dossiers les plus sensibles et les plus complexes. Elle s'engage à le faire en s'appuyant sur les relations historiques et stratégiques qu'elle entretient avec les trois pays mais aussi et sous l'autorité du Chef de l'Etat, sur l'expérience et l'ingénierie diplomatique de Lamamra, dans la gestion des médiations internationales à l'exemple de celles dans le conflit malien et le lourd dossier des grands Lacs. Il est en outre à rappeler que notre pays avait parrainé dans les années 90, l'accord de paix et de réconciliation entre l'Ethiopie et l'Erythrée, signé à Alger le 12 décembre 2000, sous l'égide de l'Onu, après une guerre fratricide entre les deux pays. Par ailleurs, au siège de l'Union africaine et sans surprise, Lamamra a réaffirmé la position de principe de notre pays en faveur des causes justes de libération nationale en tête la cause palestinienne, au moment où plusieurs pays arabes lui tournent le dos. Il a pris l'initiative de soulever la question du statut d'observateur à l'Union Africaine qui vient d'être octroyé à Israël par le Président de la Commission. Il s'est entretenu également avec l'équipe dirigeante de la Commission de l'Union Africaine et la représentation des Nations Unies auprès de l'Union Africaine, auxquels il a réitéré le soutien de l'Algérie aux efforts visant à améliorer l'efficacité du fonctionnement de l'Organisation continentale, tout en soulignant la nécessité d'inscrire ces efforts dans le respect des buts et principes consacrés dans l'Acte Constitutif. De même qu'il a partagé avec ses interlocuteurs les analyses et perspectives de l'Algérie sur l'état de paix et de sécurité en Afrique ainsi que sur le rôle attendu de l'UA dans ce contexte. Il a enfin réaffirmé la détermination de l'Algérie à appuyer l'action collective du continent visant à faire taire les armes et à consacrer le principe des «solutions africaines aux problèmes de l'Afrique». Autre message d'une grande clarté, celui délivré par Lamamra lors de sa visite au Caire, et qui a porté sur le barrage de la renaissance mais aussi sur la crise libyenne. L'Algérie entend reprendre la main sur le dossier, retrouver sa place dans son environnement régional et être un partenaire dont la voix compte sur les questions de paix et de sécurité dans la région. Il n'est plus possible désormais de jouer un quelconque rôle en Libye sans tenir compte des intérêts de l'Algérie. Intérêts qui s'inscrivent en évidence dans le sillage des déclarations du Chef de l'Etat qui, dès son investiture à la magistrature suprême, n'a pas manqué d'annoncer le retour de notre pays sur la scène régionale et internationale et particulièrement sur le dossier libyen. « Plus rien ne sera fait sans l'Algérie », avait-t-il martelé dans son discours. Son rappel de Lamamra en tant que MAE, il le veut sans nul doute, comme une preuve ou un gage de cet impératif retour diplomatique. Qui plus est, semble dire Lamamra de manière incisive et décisive, si la ville libyenne de Syrte est une ligne rouge pour les égyptiens, celle de Tripoli est aussi une ligne rouge pour les algériens, comme déjà souligné par le président, d'où l'intérêt pour les deux pays à travailler ensemble, de manière bilatérale ou dans le cadre du mécanisme des pays voisins de la Libye. L'objectif étant essentiellement d'aider les libyens à retrouver le chemin de la paix et de la stabilité. Dans tous les cas, notre pays, ne permettra pas à des forces locales ou étrangères et aux mercenaires qui leurs sont fidèles, de s'approcher de la frontière algérienne. Le Président de la République Abdelmajid Tebboune et le Chef d'Etat Major, le Général de Corps d'armée, Said Chengriha ont déjà exprimé des positions fermes à ce sujet. L'impact politique et médiatique de la tournée africaine effectuée par Lamamra, a été très positif et largement salué au plan national et par les pays africains et arabes, particulièrement dans cette conjoncture difficile que connaît l'Algérie au sein de son environnement régional mouvementé. Le retour de l'Algérie sur la scène diplomatique, régionale et internationale notamment, sur les dossiers sensibles, a été acté par le président de la République, dans son entrevue périodique avec les représentants de la presse nationale comme résultats positifs. Ceci, après qu'il ait reconnu objectivement, l'éclipse de notre diplomatie ces toutes dernières années ajoutant à propos du changement gouvernemental, que « ceux qui ont été exclus sont ceux qui n'ont pas obtenu de résultats positifs ». Tout est dit.