Cette présente contribution d'une brulante actualité se propose d'analyser l'impact de la crise ukrainienne sur la stratégie gazière européenne, russe et algérienne. 1.-Situation et potentialités de l'économie russe : une économie rentière La fédération de Russie, est le plus vaste Etat de la planète. Sa population était estimée à 143,3 millions d'habitants en 2013. Le pays est à cheval sur L'Asie du Nord (74,7 %) et sur L'Europe (25,3 % de sa superficie). Son territoire sur une superficie de dix-sept millions de kilomètres carrés (soit deux fois celle des USA trente et une fois celle de la France , 560 fois celle de la Belgique) La Russie prend la première place dans le monde par ses stocks de gaz (32 % des stocks mondiaux, 30 % de la production mondiale); la deuxième place par son niveau de la production du pétrole (10 % de la production mondiale); la troisième place par ses stocks de charbon (22 bassins houillers, 115 gisements, y compris en Russie européenne - près de 15,6 %; en Sibérie - 66,8 %; sur l'Extrême-Orient - 12,9 %; sur l'Oural - 4,3 %). Par les stocks des minerais de fer, la Russie prend aussi la première place, de l'étain - deuxième, du plomb - troisième. Aussi la Russie prend la position dominante au monde de l'approvisionnement en bois. Russie, l'Iran et le Qatar détiennent 53% des réserves mondiales. La Russie restera le premier exportateur mondial d'hydrocarbures jusqu'en 2035, couvrant jusqu'à 4% de la demande mondiale en énergie, estiment les experts de la compagnie pétrolière britannique BP "La Russie restera le premier exportateur d'énergie dans le monde avec des exportations s'élevant à 736 millions de tonnes d'équivalent pétrole par an d'ici 2035", lit-on dans le document. Toujours selon le rapport, de 2012 à 2035, le volume de la production et de la consommation d'énergie en Russie augmentera de 21 % et 20 % respectivement. Dans le même temps, d'ici 2035, la production d'hydrocarbures liquides en Russie atteindra, selon BP, 11 millions de barils par jour, soit la troisième position mondiale après l'Arabie saoudite et les Etats-Unis. Après 2020, la Russie devrait en outre entamer la production du pétrole difficile à extraire. Le produit intérieur brut russe PIB a été évalué par le FMI à 1.954 milliards de dollars pour une population de 142,6 millions d'habitants en 2012. Les exportations ont été de 529, 255 milliards de dollars et les importations 335,446 milliards de dollars. C'est une économie rentière, la croissance économique reposant sur la consommation des ménages, avec des prix subventionnés grâce aux hydrocarbures subventionnée, donnant des taux de chômage et d‘inflation fictifs. Grâce aux hydrocarbures, la Russie est devenue la huitième économie mondiale. Ce secteur représente aujourd'hui les deux tiers des exportations russes et 35/40% du PIB. Et comme en Algérie le pouvoir d'achat en est tributaire à plus de 70%. Que l'on se rappelle la crise russe des années 1980où il était impossible de payer les retraités du fait de la chute des cours des hydrocarbures, les longues files d'attente avec des réquisitions des produits de première nécessité. Depuis 10 ans la part de la production industrielle dans le PIB russe avoisine les 17% et représente seulement 7% des exportations. Donc la puissance russe dépend de la stratégie du géant Gazprom qui s'assimile à l'Etat russe, société cotée en bourse. Comme en Algérie les recettes d'hydrocarbures ont permis d'importantes réserves de change et des placements à l'étranger. Les réserves de change russes étaient de 509,6 milliards de dollars au 1er janvier 2014, contre 537,618 milliards au 1er janvier 2013, et elles sont estimées à 493,326 milliards de dollars le 1er mars 2014, ayant connu une baisse depuis la crise ukrainienne contre 498,926 milliards le 1er février 2014 selon, la Banque centrale de Russie. Les bons de trésor américains représentent en moyenne en 2013 1700 milliards de dollars, le Japon 1200 milliards de dollars contre la Chine qui en détient le plus (près de 1300 milliards) et la Banque centrale russe détenait seulement 138 milliards de dollars. Aussi, La menace de retirer les bons de trésor russe aurait un faible impact sur l'économie américaine. Certes, la Russie bénéficie d'une situation enviable: elle affiche un déficit budgétaire inexistant, une dette extérieure limitée à 15% du PIB, et une stabilité politique relative avec Mais du fait de sa dépendance aux hydrocarbures, l'économie russe reste vulnérable aux chocs externes. La production pétrolière stagne et devient chère, et la place de la Russie parmi les Brics est souvent remise en question. Ainsi, l'économie russe fait face à de nombreux défis: sa dépendance aux matières premières faisant d'elle une économie de rente, la corruption responsable d'un mauvais climat des affaires, l'absence de réformes structurelles, une population vieillissante, la vulnérabilité vis-à-vis de l'instabilité économique de la zone euro et du possible ralentissement de la Chine, la chute du rouble, ou encore le repli du cours du pétrole. Commencé en 2012, En 2013 la Russie est entrée dans une phase de récession entamée en 2012 pour trois raisons - La baisse des investissements des entreprises, surtout des grands groupes d'Etat, notamment dans le secteur énergétique. Pour Alexeï Balaev du Groupe d'Expertise économique, c'est la raison essentielle du ralentissement économique. La baisse de la consommation, notamment à cause de l'endettement de la population. Selon la Banque Centrale, le poids du crédit sur le salaire mensuel moyen est environ de 3,7%.La troisième raison, au lieu d'affecter ses ressources au développement, Moscou a augmenté ses dépenses militaires de 44% en 3 ans et devrait consacrer près de 72,4 milliards d'euros par an à ses forces armées d'ici 2016, contre actuellement environ 51 milliards, ce qui place déjà la Russie devant le Royaume-Uni, le Japon et la France En 2013, le budget militaire de Russie a été de 66,8 milliards de dollars pour devenir le troisième budget mondial selon IHS Jane's Annual Defence Budgets Review) établi par la société d'analyse IHS Inc. Face à ces richesses du fait d'une gouvernance mitigée, les résultats sont donc dérisoires. Le problème de la Russie n'est pas tant celui des richesses naturelles que celui de l'acheminement de ces matières premières vers la Russie « utile », celle d'Europe mais surtout de sa gouvernance. Comment un pays si riche. Et là il faut retourner à l'histoire des civilisations. Les régimes dictatoriaux (culte de la personnalité de type César), faute de contrepoids politiques, de débats contradictoires, en fait faute de démocratie tenant compte des anthropologies cultuelles à quelques exceptions près, ont toujours anesthésié la société et ont contribué à la régression intellectuelle, sociale et économique solidaires. Au XXIème siècle le management tant politique que des entreprises reposent essentiellement sur le collectif et non l'individualisme n'existant pas de femmes et d'hommes providentiels. Un livre intéressant de l'ancien premier ministre français de Lionel JOSPIN « Le mal napoléonien » Paris 2014-Le Seuil » détruit un mythe et confirme cette tendance ; je le cite : « j'examine si les quinze années fulgurantes du trajet du Premier consul et de l'Empereur ont servi la France et ont été fructueuses pour l'Europe. À mesurer l'écart entre les ambitions proclamées, les moyens déployés, les sacrifices exigés et les résultats obtenus, la réponse est non... et de conclure.... Napoléon n'a pas servi les intérêts de la France ! Au cours des quinze années du Consulat et de l'Empire, il a au contraire entraîné la France dans une chute qui lui interdira ensuite de figurer parmi les grandes puissances mondiales et à cause des guerres qu'il a menées dans toute l'Europe, les peuples vont se dresser contre lui et la nation qui l'a conduit au pouvoir ».Mais, le pays possédant d'importantes potentialités, la plus sure étant ses ressources humaines, et donc son intelligentsia, la Russie sous réserve d'une gouvernance renouvelée passant par l'Etat de Droit, peut enclencher un développement durable et devenir une grande démocratie à l'instar de la Chine qui réalise une transition vers l'économie de marché maitrisée. 2.-L'Europe dépendante du gaz russe et la Russie dépendante de l'Europe pour ses recettes en devises Gazprom a écoulé 162,7 milliards de m3 vers l'UE et la Turquie en 2013, dont 86 milliards ont transité par l'Ukraine. Par le passé, l'Ukraine est l'un des deux passages historiques du gaz avec la Biélorussie jusqu'à 80% du gaz russe destiné à l'Europe. Cette part a diminué depuis la création du Gazoduc North Stream, (55 milliards de mètres cubes gazeux) qui va de la Russie à l'Allemagne en passant par la mer Baltique. Elle tend à diminuer encore plus avec le Gazoduc South Stream (65 milliards de mètres cubes gazeux), qui reliera l'Europe par la Bulgarie et la Hongrie et qui sera mis en service fin 2015. Qu'en sera-t-il de la menace du géant public russe Gazprom d'interrompre ses exportations de gaz en raison d'impayés de 1,89 milliard de dollars, comme ce fut le cas pendant l'hiver 2009, quand des coupures avaient perturbé l'approvisionnement de pays européens ? Or, la part de marché russe en Europe est passée de 25,6 % en 2012 à 30 % en 2013, Mais Moscou n'a aucun intérêt économique à priver l'Europe de ses hydrocarbures. Un arrêt total des exportations vers l'UE ferait perdre 75 milliards de dollars à la Russie et pourrait entrainer « un repli de l'ordre de 3,7 % du PIB », selon Charlotte de Lorgeril, du cabinet SIA Partners. La Russie est de plus en plus « pétro-dépendante » : l'énergie représente 71 % de ses exportations contre 54 % en 2000. L 'Europe ne peut pas se passer des hydrocarbures russes, ayant importé en 2013 225 millions de tonnes de pétrole par an de Russie et une bonne partie de son gaz. A terme cela favoriserait les USA où la crise ukrainienne permettrait l'utilisation de l'arme économique, le gaz /pétrole de schiste. La technique de la fracturation hydraulique a permis aux Américains de devenir le plus gros producteur mondial de gaz alors que certains scénarios en 2000 prévoyaient l'importation du gaz russe par les USA.. Cependant cela ne peut se faire qu'à moyen terme (horizon 2017/2020 selon l'AIE) et nécessite de lourds investissements afin de mettre en place les infrastructures de liquéfaction et de transport à la rentabilité incertaine (voir le New York Times du 05 mars 2014) en cas où la Russie qui a d'importantes réserves décide de baisser ses prix, sans compter le marché asiatique en plein expansion. Aussi, ni la Russie, ni l'Europe n'ont intérêt à court terme à provoquer une guerre commerciale surtout avec la crise économique et le niveau d'endettement élevé de l'Europe et des besoins de financement croissant des russes. Christian Schulz, de la banque Berenberg, juge que des sanctions «feraient un peu de mal à l'Europe» mais que c'est surtout «la Russie (qui) se nuirait à elle-même», dans un contexte de croissance poussive (1,3% en 2013) et de fuite déjà conséquente de capitaux privés (17 milliards de dollars depuis le début de l'année). L'institut de recherches Oxford Economics dans des simulations débouchant sur une interruption des livraisons de gaz russe via l'Ukraine, le prix du gaz sur le marché en Europe augmenterait de 15% et celui du pétrole de 10%, la zone euro subirait un recul de 1,5% du Produit intérieur brut (PIB) d'ici 2015 par rapport au «scénario de base» (hors escalade militaire), s'aggravant à -3% pour certains pays de l'Est. Etats-Unis et Asie connaîtraient un impact «plus limité».Mais la Russie serait la plus grande perdante « le rouble déclinerait fortement, l'inflation flamberait et le PIB russe baisserait de 2% en 2014 puis 4,5% en 2015 par rapport au scénario de base. Ainsi le 03 mars 2014, la banque centrale russe a dû dépenser 11 milliards de dollars pour défendre sa devise. C'est cinq fois plus qu'elle n'avait jamais dépensé pour une intervention sur les marchés. En cas de sanctions commerciales majeures, par exemple d'embargo sur 80% des ventes russes de gaz et de pétrole, les prévisions d'Oxford Economics sont encore plus sombres, avec un PIB russe en recul de 10% d'ici fin 2015 par rapport au scénario de base. Il s'ensuivrait d'importants remous sociaux et politiques. Qu'en sera t-il du devenir de Gazprom contrôlant plus de 80% de la production de gaz russe, le groupe cherche en priorité étant de poursuivre son expansion à l'international., les marchés européens lui assurant en particulier des revenus plus conséquents et plus stables que le marché intérieur russe ? Tour en n'oubliant pas que le 22 aout 2012 , la Russie a adhéré à l'organisation mondiale du commerce ( OMC) après 18 ans de négociation et a conclu 39 accords bilatéraux concernant l'accès au marché pour les servies et 57 accords concernant l'accès au marché pour les marchandises ? 3.-Sonatrach peut-elle suppléer au déficit en gaz de l'Europe ? Le marché européen est de longue date, le marché naturel de l'Algérie pour ses hydrocarbures, notamment pour le gaz naturel. Cependant, la part de l'Algérie dans les approvisionnements gaziers de l'Union européenne a baissé de façon significative dans les dernières années et les crises économiques en Europe n'en sont pas la seule raison. A moyen terme, de nouveaux concurrents vont apparaître, tels que les Etats-Unis, des pays de l'Afrique de l'Est (Mozambique, Tanzanie) et des pays de la Méditerranée orientale (Israël, Chypre, peut-être le Liban) ; certains pays européens tenteront de développer leur propre potentiel de gaz non conventionnel ;les exportateurs traditionnels vers l'Europe, dont la Russie, devraient adopter un comportement plus agressif pour préserver leurs parts de marché ; et la souplesse commerciale du Qatar dont la part du marché en Europe approche celle de l'Algérie en 2012 (8/9%) et étant le concurrent le plus sérieux avec Gazrpom en Asie, l'Algérie devant contourner toute la corniche de l'Afrique avec des couts de transport exorbitants pour arriver en Asie.. Des clients européens du groupe pétrolier et gazier algérien Sonatrach ont demandé à la compagnie de revoir à la baisse ses prix du gaz et le Mémorandum avec l'Europe insiste sur la révision des clauses des contrats à moyen et long terme, du fait qu'il existe depuis des années une déconnexion du prix du gaz par rapport à celui du pétrole. L'effet domino est là, il n'y avait pas qu'Edison qui a demandé à revoir les prix (à la baisse). Il y a aussi l'ENI (Italie) et GNF (Gas Natural Fenosa, Espagne)", selon le PDG de Sonatrach. Rappelons l'arbitrage international ayant opposé Sonatrach à l'italien Edison, contrôlée par le Français EDF, dans une affaire de demande de revoir à la baisse ses prix de gaz. Sonatrach a perdu cet arbitrage à cause de la clause de "bouleversement" contenue dans le contrat d'approvisionnement, qui stipule que les prix peuvent faire l'objet d'une réduction en cas de changement des conditions économiques. La demande en gaz naturel en Europe est en déclin, et les exportations algériennes vers ce marché traditionnel aussi. L'Italie, qui reçoit prés de 34% de ses importations de gaz d'Algérie a considérablement réduit la consommation de ses centrales électriques au profit des énergies renouvelables et en s'adressant à d'autres fournisseurs sur le marché libre. C'est en tout cas, l'une des explications fournies par la Snam Rete Gas, la principale entreprise de transport et de liquéfaction de gaz naturel en Italie. Dans son bilan financier au titre de l'année 2013, la compagnie italienne rapporte un volume de gaz injecté dans le réseau italien de 69,01 milliards de mètres cubes (- 8,9% sur une année) dont 61,53 milliards de mètres cubes importés, en baisse de 9%. Dans le détail, les flux en provenance d'Algérie par le biais du point d'entrée Mazara del Vallo ont chute de 40,2%, s'établissant a 12,46 milliards de mètres cubes (20 % du total des importations). Ils s'établissaient a 7,49 milliards de mètres cubes en provenance d'Europe du Nord par Passo Gries, en baisse de 17,1% et a 5,7 milliards de mètres cubes et de Libye par Gela, en baisse de 11,9%. Inversement, les importations de gaz de Russie gaz dans le Tarvisio a augmente de 26,9% à 30,26 milliards de mètres cubes. Cela confirme que l'Algérie est en train de perdre ses parts de marché de gaz en Europe. Ce qui n'est pas du seulement à des difficultés d'approvisionnement après l'attaque terroriste de Tiguentourine, mais aussi à la volonté de l'Europe de réduire ses approvisionnements d'Algérie au profit d'autres acteurs du marché libre dont le prix est plus bas. L'Algérie se voit donc contrainte de revoir les débouchés pour son gaz. Dans ce contexte face à la crise ukrainienne l'Algérie ne peut suppléer à court terme au manque de gaz de l'Europe posant la problématique des réserves de gaz algérien ? Se pose forcément la forte consommation intérieure, le prix de l'électricité étant plafonné depuis 2005 entrainant un déficit structurel de Sonelgaz plus de 44 milliards de dinars en 2012. Sont posées les limites des réserves de gaz traditionnels en Algérie où en 2017 la consommation intérieure risque de dépasser largement les exportations ayant doublé les capacités d'électricité horizon 2017 à partir des turbines de gaz allant vers plus de 70 milliards de mètres cubes gazeux, dépassant les exportations actuelles qui peinent à atteindre 50/55 milliards de mètres cubes gazeux . L'on devrait arriver, sauf découvertes exceptionnelles, à un cout compétitif à un épuisement horizon 2030 des hydrocarbures traditionnels, devant produire plus de 155 milliards de mètres cubes gazeux annuellement, si l'on veut exporter 85 milliards de mètres cubes gazeux. Selon des études spécialisées les prévisions de la consommation nationale en Algérie horizon 2030 doubleraient pour l'ensemble des hydrocarbures. En 2040, celle de gaz naturel serait de 100 milliards de m3 pour une production escomptée du double, ce qui compte-tenu des volumes indispensables au maintien de la pression dans les gisements (88 milliards de m3 réinjectés en 2011) ne laisserait alors qu'une dizaine de milliards de m3 disponibles pour l'exportation, soit cinq fois moins qu'en 2011. La consommation électrique (200 milliards de kwh en 2040 pour une population de 60 millions d'habitants) exigerait de brûler au moins 50 à 60 milliards de m3 de gaz. Pour le court et moyen terme doit être pris en compte la concurrence de Gazprom avec le North et le South Stream, qui contourne l'Ukraine (120 milliards de mètres cubes gazeux, expliquant le gel du projet Galsi 8 milliards de mètres cubes gazeux pour un cout qui est passé de 2,5 à plus de 4 milliards de dollars donc non rentables au vu du prix actuel). Et également la concurrence américaine avec la révolution du pétrole-gaz de schiste, ce marché représentant 20% des recettes de Sonatrach. L'Algérie perd de plus en plus des parts de marché étant passée de 13/14% du marché européen entre 2009/2010 à 9% en 2013. L'on peut découvrir des milliers de gisements non rentables par rapport au vecteur prix international, Hass R'mel et Hassi Messaoud ayant épuisé environ 45/50% de ses réserves. La rentabilité au prix constant 2013 pour les GNL doit être de 15/16 dollars le MBTU et 9/11 dollars pour les canalisations. En cas d'un fléchissement des prix, les gisements marginaux seront fermés car non rentables. Le départ des chinois de la raffinerie d'Adrar reprise par Sonatrach qui supporte les surcouts doit être médité. Je pense qu'un large débat sur les subventions devra impérativement avoir lieu après les présidentielles, l'Algérie étant le pays qui généralise et subventionne le plus au monde l'électricité et le carburant. Le pays ne peut continuer à généraliser les subventions sans ciblage, ne profitant pas toujours aux plus défavorisés et aux secteurs inducteurs de valeur ajoutée durable. –Cela explique d'ailleurs les conflits actuels sur le prix de cession du gaz avec la rupture de contrat entre Total et Sonatrach pour le projet, d'une usine de vapocraquage de l'éthane à Arzew .Mais cette rupture du contrat ou gel, n'est pas propre à Total dans la mesure et pose toute la problématique de la politique des subventions en Algérie (prix intérieur environ 1/10ème du prix international) où plusieurs projets très fort consommateur de gaz avec des partenaires étrangers ont achoppé et achoppe toujours sur le prix de cession du gaz. Comme la joint-venture entre Sonatrach et le consortium émirati Dubaï-Moubadala unité d'aluminium à l'Ouest du pays ( Béni Saf) prévu pour 5 milliards de dollars. Ainsi se posera le prix de cession de l'importante unité sidérurgique de Bellara wilaya de Jijel de 4 millions de tonnes d'acier par an en vitesse de croisière pour un cout estimé à 1,7 milliard de dollars , l'unité d'ammoniac entre le groupe Sonatrach et El Djazairia El Omania Lil Asmida, pour 3 milliards de dollars portant sur la fourniture, à compter de 2012, de deux milliards de mètres cubes de gaz naturel devant produire quatre mille tonnes par jour d'ammoniac et sept mille tonnes par jour d'urées granulées, sans compter les conflits de prix avec Arcelor Mittal à Annaba et d'autres partenaires étrangers. Comment ne pas rappeler également le conflit récent avec la société espagnole Fertial, Sonatrach lui reprochant une consommation excessive de gaz du fait du bas prix, avec plus de 245 000 tonnes d'engrais produits ainsi que 858 000 tonnes d'ammoniac - l'un des constituants des engrais, essentiellement vendues à l'export. Même les Russes lors de leurs négociations avec l'OMC, qui a vu leur adhésion en aout 2012, se sont engagés à réduire l'écart entre le prix administré et le prix du marché dans le temps. Il ne peut y avoir d'exception pour l'Algérie. Conclusion : Dans la situation actuelle, je ne pense pas à une rupture économique entre l'Europe et la Russie, l'Algérie n'ayant pas les capacités actuelles pour suppléer au déficit, tout au plus un très petit appoint. Selon Africa Energy Intelligence du 02 novembre 2013, le méga-champ gazier d'Hassi R'mel connaît une baisse sensible de sa production, faute, de travaux de développement et d'entretien. Le site gazier en question, qui produisait 75 milliards de m3 en 2008, n'en livre que 55 milliards de m3 en 2012. Les exportations algériennes de gaz seraient passées de 60 milliards de m3 en 2007 à 52 milliards de m3 en 2011 et 55 milliards en 2012 ». Par ailleurs, le pétrole algérien ( identique à celui de la Libye qui tant du point de vue du gaz et du pétrole sera très prochainement le concurrent direct de Sonatrach) traditionnellement il bénéficiait d'une prime de 3 dollars environ en raison de son absence de soufre et de sa proximité de l'Europe, aujourd'hui il n'est acheté qu'avec un rabais de 2 à 3 dollars du fait notamment de la crise des raffineries D'autant plus que suite à l'attentat de Tinguentourine (Illizi) qui représente 18 % de ses exportations et aux cours mondiaux actuels, des revenus annuels de 3,9 milliards de dollars, toutes les installations ne sont pas encore opérationnelles. L'Algérie se trouve confrontée surtout à sa forte consommation intérieure de gaz qui risque de dépasser les exportations en 2017 et devra arbitrer entre la consommation intérieure et les exportations en déclin du moins pour le gaz traditionnel, pour le gaz de schiste du fait de son cout cela n'est pas pour demain. Et cette situation sera d'autant plus intenable (subventions et transferts sociaux représentant 30% du produit intérieur brut soit 70 milliards de dollars en 2013) si le cours des marchés tendaient à fléchir comme le prévoient les organismes internationaux entre 2015/2017, 98% des exportations entre 2013/2014 relevant du seul secteur des hydrocarbures et important 70% des besoins des entreprises dont le taux d'intégration-public et privé- ne dépasse pas 15%. Tout cela renvoie à l'urgence d'un nouveau modèle de consommation énergétique lui même liée au renouveau de la gouvernance pour réaliser la transition d'une économie de rente à une économie hors hydrocarbures s'insérant dans le cadre des avantages comparatifs mondiaux en termes de coût/qualité dont les avantages comparatifs sont dans les espaces maghrébins, africains et euro-méditerranéens.