Alors que de nombreux pays sont durablement installés dans la crise et que la question des solutions au chômage revient au premier plan des préoccupations politiques et sociales, se pose la question de nouvelles politiques en la matière. Va-t-on procéder comme par le passé en multipliant, comme l'ont déjà fait les pays les plus touchés, les mesures de flexibilisation du marché du travail ? Va-t-on empiler à nouveau les mesures d'urgence pour les groupes les plus touchés : jeunes, chômeurs de longue durée ? Ou bien est-ce que les partenaires sociaux et les pouvoirs publics (désormais pour la plupart désargentés) sauront innover ? Si beaucoup de pays sont sous de terribles contraintes, pour une dérégulation très forte de leurs marchés du travail, l'Algérie s'est engagée dans un vaste programme de négociations qu'il s'agisse de la sécurisation des parcours professionnels, de l'emploi des jeunes ou de la qualité de vie au travail. A quoi aboutiront-elles ? Ouvriront-elles la voie à des solutions non seulement équilibrées mais permettant une amélioration significative et une réduction des inégalités en matière d'accès à l'emploi, à la formation ou encore de mobilité professionnelle et à la stabilité socio économique ? Pour quels effets d'entraînement sur les entreprises et les personnes ? Autant d'interrogations aujourd'hui sans début de réponse. Du niveau collectif, n'attendons rien de très substantiel : l'heure n'est pas à un agenda social ambitieux qu'il s'agisse du gouvernement ou des partenaires sociaux. Quant aux initiatives locales entreprises selon la spécificité de chaque wilaya, rien n'a été fait, on attend seulement ce qu'a été décidé au niveau central et on croise les bras! La décision cascadée ! Dans ce contexte pesant, je voudrais formuler plusieurs idées : - Il est grand temps de changer de paradigme et de ne plus se focaliser sur la question du placement au niveau du secteur administratif qui continue à aller creuser au niveau de la trésorerie publique. C'est la notion de restructuration qui doit aujourd'hui prévaloir, au moins dans les entreprises d'une certaine taille de manière à pouvoir ouvrir un vrai dialogue sur les mutations en cours et à venir, à traiter la question de l'emploi dans un cadre purement économique et à sortir d'un théâtre social qui ne débat que de subvention quand il faudrait soutenir les transitions, l'innovation et la création d'activités nouvelles. - Si l'on veut accompagner durablement ces mutations, il devient urgent de déplacer le curseur de la grande entreprise vers son écosystème : sous-traitant et principaux fournisseurs. Alors que la tendance générale en Algérie est à la négociation d'entreprise, c'est vers son développement à l'échelon des branches, filières et territoires qu'il convient de s'atteler. Celui-ci conditionne en effet l'émergence de dispositifs permettant aux employeurs et aux salariés des PME de faire face plutôt que de subir non seulement les conséquences du contexte général, mais aussi les décisions des grands groupes qui trop souvent ne les considèrent que comme des variables d'ajustement - Il est temps aussi de regarder les réserves de flexibilité interne dont nous disposons, du moins dans certaines régions. S'il n'est pas impensable de rediscuter, dans des cas exceptionnels de salaires, il est beaucoup plus urgent de rouvrir le débat sur les organisations du travail. - Pour revenir à la question des inégalités, dont il est désormais prouvé qu'elles sont un frein au développement durable, celles qui se sont forgées en matière de formation ne sont pas les moindres. Dans plusieurs pays, dont l'Algérie, la formation initiale doit être repensée du fait des exclusions qu'elle ne cesse de générer et la formation professionnelle doit être réorientée en faveur des plus vulnérables mais qui doit être obligée. Trop de dispositifs ne corrigent pas les inégalités initiales, pire ils les accentuent. Il devient donc impératif de se doter ici d'obligations collectives de résultat et non plus d'obligations, inutilement coûteuses, de moyens. Pour tout et en tout, nous ne pouvons pas faire l'économie de projets et même de grands desseins. Les Spécialistes comprennent bien plus qu'on ne le dit les nécessités d'ajustements plus ou moins douloureux. Mais c'est la question du sens qui fait aujourd'hui cruellement défaut. On l'a vu avec la crise du travail dans les entreprises notamment non organisées. On le voit aussi à l'échelle de beaucoup de sociétés, où la méthode pyramidale comme règle de gouvernement crée plus de problèmes qu'elle n'en résout et conduit à une sorte de déprime collective plus qu'aux sursauts espérés ! De la volonté de vouloir et de pouvoir entreprendre ensemble surgira, ou non, une bonne part, de la solution à la crise Notamment des propositions de la base c'est à dire le terrain.