J'observe sans ambiguïté une offensive impressionnante de propagande simultanément pro-Russe et anti-Russe. Je me retiens de rentrer dans ce débat car dans ces conditions c'est illusoire d'essayer de démêler le vrai du faux, essayer de départager un gentil et un méchant dans ce conflit c'est déjà avoir tort. Je rappelle juste à tout le monde que face à des enjeux géopolitiques aussi importants que ceux-là on ne peut accorder aucune confiance aveugle aux informations qui circulent et bonne chance aussi pour en vérifier le bien-fondé de manière fiable. Il n'y a donc pas grand-chose à penser de tout ce vacarme d'après moi. Cependant je suis très tenté d'y voir le chant du signe d'un pôle de pouvoir à l'agonie après une série d'échecs cuisants qui ne fait sans doute que commencer. Il parait évident que beaucoup de choses vont changer dans un avenir très proche et c'est légitime de s'inquiéter de si ça sera dans le bon sens ou non. Moi non plus je n'espère pas que la Russie prenne la place des Etats-Unis dans le leadership mondial. Pas plus que je ne souhaite que les Etats-Unis conservent leur position actuelle pour l'éviter. Mais il y a une troisième voie à ce faux dilemme : c'est que les citoyens se réveillent politiquement, réalisent que si on veut la paix il faut de la démocratie et que la démocratie ça ne fonctionne pas en autopilote, on ne peut pas se contenter de laisser des élus penser pour nous les problématiques politiques, il faut qu'on s'active et qu'on fasse l'effort de chercher comment départager le vrai du faux et qu'on s'assure de prendre les meilleures décisions avec les moyens dont on dispose. La seule solution pour éviter ce monde bipolaire qu'on nous présente dans les médias, comme s'il fallait nécessairement choisir entre la peste étasunienne et le choléra Russe, c'est que chaque pays joue son rôle politique et que ce rôle soit celui voulu par les citoyens de chaque peuple. C'est les élites qui veulent la guerre Les peuples ne veulent jamais la guerre, c'est les élites qui la veulent, car ils y voient des bénéfices politiques et économiques à faire, pour lesquels ils n'auront pas à payer le prix contrairement aux citoyens qui sont ceux qui devront mettre leur vie en jeu dans un conflit armé. Défendre la démocratie c'est donc permettre à chaque peuple d'exprimer ce à quoi, finalement, ils aspirent tous : œuvrer ensemble dans la paix, en coopérant tous pour améliorer les conditions de vie de chacun de manière équitable et durable. C'est ça que doit être l'objectif de tous : viser à construire un monde où tout le monde peut vivre dignement, ne pas vivre soi-même dans un pays qui soit le seul à avoir la meilleure qualité de vie du monde quitte à ce que ça se fasse au détriment de tous les autres. On est au 21ème siècle, on a l'internet pour supprimer toutes les frontières de distance et on a des objectifs à poursuivre qui dépassent totalement les intérêts individuels des nations et concernent ceux de l'humanité entière. Ce n'est plus une utopie de parvenir à penser en tant que citoyen du monde et non pas juste en tant que citoyen d'une nation (l'un n'a d'ailleurs pas à exclure l'autre), c'est une nécessité : nous ne pourrons plus nous permettre encore longtemps de penser nos rapports sur la base de la compétition au lieu de celle de la coopération. Soit on parvient à dépasser cette logique, soit le simple principe d'inertie s'en occupera pour nous et on payera le prix fort de notre incompétence, car chaque minute que l'on passe à ne pas s'occuper de ces enjeux communs de l'humanité, c'est une minute qui nous rapproche un peu plus d'un risque très concret d'extinction de notre propre espèce, ou du moins de la fin de sa civilisation telle qu'on la connait. Les peuples commencent à avoir conscience Je pense que les peuples du monde ont conscience de cette situation, ou qu'en tout cas ils commencent à en avoir conscience. C'est cette voie là qu'il faut suivre : défendre la démocratie la plus large afin de permettre à chaque peuple de choisir sa politique nationale, mais surtout de le faire dans la perspective d'une coopération mondiale. ça ne peut se faire que dans le respect de la souveraineté de chaque pays et de la pluralité des cultures, pas en imposant par des traités impérialistes ou une domination économique et stratégique, une vision unique du monde supposée supérieure à toutes les autres. La seule bonne solution c'est de donner l'exemple, de tendre les premiers la main vers un dialogue international orienté vers une volonté commune de paix et de développement durable et équitable de tous les pays, dans le respect de la pluralité des cultures. On n'a pas besoin de tous être d'accord sur tout pour s'entendre sur les objectifs importants. Il n'existe pas de solution unique et miracle à imposer à tous au prétexte que ça serait pour le plus grand bien. Il n'y a qu'un seul objectif valable à soutenir : faire l'effort individuel, aussi bien en tant que citoyens qu'en tant que nations, de poursuivre le plus sincèrement possible cet objectif de coopération mondiale. La démocratie est donc un prérequis à ce but, commençons par défendre ça chez nous et essayons de cette manière de donner l'exemple aux autres pays du monde au lieu de chercher à leur faire la leçon. On ne peut pas légitimement décider à leur place de la politique qu'ils veulent, mais on peut légitimement décider pour nous-mêmes de la politique qu'on veut et démontrer ce qu'il est possible d'accomplir quand on s'implique avec conviction dans notre rôle de citoyen. Ce n'est pas une utopie, c'est une nécessité. Restons pragmatiques, quand bien même les tensions actuelles font peur c'est inutile de céder à la panique, analysons calmement la situation dans laquelle nous sommes et cherchons y des solutions concrètes en établissant des priorités, c'est à dire commencer par rétablir la démocratie chez nous. Une fois qu'on aura accomplis ça (pas avant) il sera temps de se poser toutes les autres questions.