Les experts sont unanimes, 75% des commentaires sur facebook sont l'œuvre de faux comptes qui tentent d'influencer et de manipuler politiquement les opinions publiques visées. C'est Facebook qui admet être envahi d'activistes politiques souhaitant manipuler l'opinion publique. Facebook a reconnu jeudi 27 avril 2018 qu'il existait des « opérations d'information » sur sa plateforme. Celles-ci sont menées par « des acteurs organisés » gouvernementaux ou non, dont l'objectif est de « fausser les tendances politiques nationales ou étrangères, dans le but d'impacter la géopolitique ». Le géant d'Internet a évoqué, dans un communiqué sur la sécurité, les méthodes utilisées par ces acteurs : « Les fake news, la désinformation et des réseaux de faux comptes visant à manipuler l'opinion publique. » Par désinformation, on désigne toute manipulation utilisant des informations fausses ou partiellement fausses pour influencer l'opinion publique. Ce terme très large peut dont s'appliquer à toute entreprise destinée à conditionner frauduleusement la population, à orienter son point de vue et éventuellement à déterminer ses actes. Cela va de la propagande aux techniques politiques de l'ère de la post-vérité en passant par les théories du complot. La désinformation joue de la rumeur, de la fausse information, de l'émotion, de la démagogie pour obtenir ce qu'elle souhaite des citoyens. Son origine est multiple et on ne saurait tenir pour responsable systématique telle ou telle catégorie d'acteurs sous peine de tomber soi-même dans la paranoïa. Une chose est certaine, cependant la démocratie n'est pas à l'abri de ces manœuvres. Sommes-nous donc entrés dans une ère de désinformation ? Selon Facebook, les opérations d'informations peuvent être conduites aussi bien par des gouvernements que par des acteurs non étatiques pour peser sur le sentiment politique national ou étranger pour obtenir « un résultat stratégique ou géopolitique ». C'est la première fois dans l'histoire que des leaders ont l'opportunité d'atteindre un public mondial par le biais de nouveaux médias comme Facebook. Une audience qui va relayer de bonne foi et de façon organique des campagnes lancées pourtant par des sources biaisées. Facebook distingue trois types d'action dont sa plate-forme est victime : la collecte de données ciblées : reconnaissance d'informations, cyber opérations contre des organisations ou des individus, hameçonnage, ou prise de contrôle de comptes, et vol de données. la création de contenus fallacieux : génération de spam, de même et d'histoires, création de faux comptes et personnages. l'amplification : des faux comptes diffusent des mêmes et du contenu, technique de l'astroturfing qui a pour but de donner une fausse impression d'un comportement ou d'un mouvement populaire spontané Contrairement à ce que l'on pourrait croire, et c'est l'un des grands enseignements de ce rapport, les contenus fallacieux ne sont pas diffusés par des bots. « La plupart des opérations d'information ne sont pas pilotées par des processus automatisés, mais par des personnes coordonnées qui se consacrent à l'exploitation de faux comptes », décrit le réseau social. Ce qui suggère un niveau d'organisation élevé. Cambridge Analytica ou comment laver le cerveau des citoyens On utilise des techniques 'psycho graphiques' qui mesurent les cinq grands traits de personnalité énoncés par la psychologie sociale : ouverture, conscience, extraversion, amabilité et névrose. Aux Etats-Unis, la firme Cambridge Analytica a développé les profils psychologiques de millions d'Etasuniens en utilisant les services d'une société appelée Global Science Research (GSR) pour diffuser des tests gratuits de personnalité. Les utilisateurs ont été attirés par la perspective d'obtenir gratuitement le résultat de leur test de personnalité, et Cambridge Analytica a recueilli les données, et accédé aux profils Facebook des utilisateurs. Le quotidien britannique The Guardian a rapporté que Cambridge Analytica a ainsi recueilli les données de plus de 300 000 utilisateurs de Facebook. En acceptant les termes et conditions de facebook, ces utilisateurs ont également accepté d'accorder à GSR (et par extension, à Cambridge Analytica) l'accès aux profils de leurs 'amis' Facebook - soit environ 50 millions de personnes. L'analyse psycho graphique utilise des algorithmes pour compter les 'like' des électeurs sur Facebook, les retweets et autres données des médias sociaux qui sont ajoutées aux informations ouvertes à tous : registres fonciers, données liées à la possession d'une automobile, achats préférentiels, abonnements à des clubs, abonnements à des magazines, et affiliation religieuse. Ces données combinées avec des documents publics, des listes électorales et des informations supplémentaires achetées auprès de marchands de données comme Acxiom et Experian, fournissent à Cambridge Analytica sa matière première pour façonner des profils. Les empreintes numériques peuvent être transformées en personnes réelles. C'est l'essence même de la psychographie : utiliser des algorithmes logiciels pour comptabiliser les 'like' sur Facebook, les retweets et autres données glanées dans les médias sociaux et les combiner avec les informations personnelles disponibles sur le marché. Des relations publiques à la guerre psychologique Cambridge Analytica n'a pas limité son activité aux seuls Etats-Unis. La firme a mené des 'opérations d'influence' dans plusieurs pays du monde. Par exemple, Cambridge Analytica a joué un rôle majeur dans les élections présidentielles de l'année dernière au Kenya, qui ont opposé le candidat sortant Uhuru Kenyatta du parti de droite, Jubilee Party, à Raila Odinga du Mouvement démocratique orange de l'opposition. Le Jubilee Party a engagé Cambridge Analytica en mai 2017. Des rapports récents révèlent que Cambridge Analytica a des opérations en cours au Mexique et au Brésil (qui ont des élections générales prévues en juillet et octobre, respectivement). L'Inde (qui a des élections générales dans environ un an) a également été courtisée par l'entreprise, et il est facile de comprendre pourquoi : le pays compte 400 millions d'utilisateurs de smartphones et plus de 250 millions d'abonnés à Facebook ou Whatsapp. La stratégie globale de Cambridge Analytica semble axée sur l'expansion de sa part de marché sur les marchés prometteurs.