Ils sont au rendez vous en ce vendredi 16 aout, le 26 ème du genre, aussi nombreux que le vendredi précédent, soit près d'un millier de personnes. En djellaba ou en bermuda, en jean ou en « survet », en tenue négligée ou, au contraire en tenue impeccable pour de vieux citadins des classes moyennes, en hidjab ou en robe fleurie, ou encore couverts de l'emblème national, ils se sont regroupés pacifiquement devant le siège préfectoral, sous le regard impassible des hommes bleus. Puis vers 15 heures 30, sous le soleil assommant, les manifestants ont entamé leur marche en empruntant comme de coutume le boulevard de l'ALN suivi du boulevard Ibn Sina. Au niveau du square Emir Abdelkader, la procession a, cette fois-ci, bifurqué vers Ain el Fouara et longé l'avenue du 8 mai 1945 pour enfin arriver au point de départ, c'est-à-dire le siège de la wilaya. Les slogans criés ou chantés portent les mêmes exigences des vendredis précédents : le départ du personnel politique disqualifié avec qui aucune élection crédible n'est envisageable, la libération des détenus politiques et d'opinion, l'état civil. A cela, il faut ajouter le slogan disqualifiant le panel de médiation et de dialogue que préside Karim Younès et la menace réitérée de la désobéissance civile aux conséquences qui pourraient dramatiques pour la nation. Sur l'agora du hirak, au bas de la façade du siège de la wilaya, s'agglutine un petit groupe de près d'une dizaine de jeunes gens qui visiblement se distingue du reste des « hirakistes » et affiche une hostilité réciproque. A leur côté, est déployée une grande banderole, coûteusement imprimée au numérique. Elle porte un message difficile à décoder tant le texte était verbeux et elliptique brassant plusieurs choses à la fois. Il est successivement question de personnages historiques, de sous entendus confus adressés on ne sait à qui, d'islam et d'arabité, de salut à l'ANP et enfin de scrutin (supposé celui de la présidentielle). Une petite pancarte en papier parlait de « badissia » et de « novembaria », nouveaux mots d'ordre mystérieusement parus depuis environ 3 mois sans que l'on sache leur signification exacte. Les slogans criés par ce groupe sont rendus inaudibles tant ceux des « hirakistes » dominent. Ces derniers semblent être renseignés sur l'obédience du groupe insolite à qui ils lançent « Fi Ain El Fouara makanche el kachir » (A Sétif, il n'y a de cachir). Il semblerait que c'est le même groupe qui s'est manifesté le vendredi précédent. Très vite et à titre préventif, un double cordon de sécurité s'est formé, celui des forces anti-émeute puis celui des hirakistes, pour séparer les deux parties belligérantes. Fort heureusement, aucun incident ni empoignade ne sont à relever. Le slogan magique « selmia, selmia » (pacifique, pacifique) a, de toute évidence, fait son effet sur la foule, un moment, électrisée par cette intrusion. Comme pour semer le doute et aggraver la confusion, un élément un peu bravache de ce groupe, crie à qui veut l'entendre que « c'est Rebrab qui nous paye ». Bien sûr, personne ne semble croire à cette fallacieuse tartarinade. Le mystère de ce groupe aux allures vaguement martiales reste entier. Mais son but est probablement celui de semer le doute et la division au sein du hirak. Hamoud ZITOUNI.